Nous étions un certain nombre à prendre la parole devant le Conseil d’Etat, mardi 12 Décembre à partir de 18h30 à l’initiative du SIEL et de son président Karim Ouchick. L’objet de cette manifestation était de protester contre les décisions de notre justice administrative prises au nom de la défense de la laïcité. La plus symbolique est celle qui contraint la ville de Ploërmel à abattre la croix qui surmonte la statue de Jean-Paul II. Notre protestation n’était pas émise par des chrétiens mécontents, mais par des Français, des Européens, puisque des Polonais s’étaient joints à nous, drapeaux rouges et blancs déployés. La laïcité aveugle et stupide qui s’attaque aux symboles chrétiens dans l’espace public se trompe évidemment de cible et menace l’identité paisible de notre pays et celle de l’Europe, dont les racines chrétiennes ne peuvent être oubliées que par ignorance ou sectarisme. Une personne dénuée de foi, mais possédant un minimum d’amour pour notre histoire et pour nos paysages, doit considérer les signes chrétiens, les croix ou les crèches, comme les marques d’une tradition millénaire et comme des éléments qui font partie intégrante du décor de notre vie. Le droit dans ce domaine ne doit s’appliquer ni mécaniquement, ni hypocritement au nom d’un pays légal qui ne tiendrait pas compte du pays réel. Les Suisses, qui ont la chance de vivre dans une véritable démocratie, et qui ont, comme plusieurs autres pays européens une croix sur leur drapeau national, ont dit « non » aux minarets parce qu’à juste titre ils ne font pas partie du paysage suisse.
La justice administrative, cette exception française qui souligne le poids de l’Etat, y compris dans des domaines qui tiennent à la liberté, a fait preuve d’une tartuferie dans sa dévotion à la laïcité qui relève du paradoxe. Le Conseil d’Etat a ainsi préservé la statue de Jean-Paul II, mais enjoint de détruire la croix qui la surmonte. Ce jugement de Salomon, sans doute inspiré par une inconsciente imprégnation biblique, est en fait celui de Tartufe, sauf qu’ici, c’est le « Saint » qu’on peut montrer et la croix que l’on doit cacher. Le Conseil d’Etat, à qui on ne va quand même pas prêter une pudibonderie tartufesque, a en revanche annulé les interdictions du burkini sur les plages, sauf en Corse… Des tribunaux administratifs ont autorisé les crèches de Vendée, non celles de Béziers ou de Lyon. Il est difficile de ne pas voir dans ces décisions contradictoires de la casuistique jésuite, étrange et presque drôle au sein d’une défense de la laïcité.
Loi de 1905, neutralité religieuse de l’Etat et de l’espace public, liberté de conscience et de culte, sauvegarde de l’ordre public forment un réservoir pour les arguties qui justifient ces décisions. Les signes chrétiens anciens doivent être conservés, les oeuvres d’art ne peuvent être censurées, mais de nouveaux symboles chrétiens ne doivent pas être implantés. En revanche, rien n’empêche en France la construction de minarets totalement étrangers à notre paysage urbain. Les crèches peuvent être installées dans des édifices publics des régions où elles sont de tradition, mais pas ailleurs. En revanche, on peut sans problème fêter la fin du Ramadan à la Mairie de Paris, et bloquer des rues pour des prières musulmanes, sauf lorsque cela trouble l’ordre public. On peut, pour la même raison, être en burkini à Cannes, mais pas en Corse, parce que les insulaires réagissent plus vigoureusement. Il faut d’ailleurs souligner à ce sujet que les Corses, en s’éloignant de la France, manifestent une identité beaucoup plus combative, au point même d’exiger une préférence régionale, déclinaison locale de la préférence nationale devenue politiquement incorrecte sur le continent.
Ce mouvement de décrucifixion qui crucifie notre identité s’étend pour des raisons commerciales, et non plus politiques, à des produits qui subrepticement effacent les croix ou remplacent le mot « Noël » par celui d’hiver. Il est plus que temps de réagir face à cette débandade. Une immigration excessive en provenance de pays musulmans a permis à l’islamisme financé par les pétrodollars de pays enrichis sans effort de trouver un terrain fertile pour propager une forme de religion incompatible avec nos institutions politiques et notre mode de vie. Des frictions se sont produites, sur le vêtement, sur la nourriture, sur les comportements qui ont réveillé une laïcité endormie dans un pays au christianisme peu militant. N’écoutant que ses habitudes d’un autre âge et son manque évident du courage, le laïcisme s’en prend par réaction aux symboles chrétiens. Pourtant, ceux-ci sont inscrits dans le coeur de notre identité culturelle. Interdire une crèche à Lyon, la ville de Fourvière, la colline qui prie, capitale aujourd’hui de la Région où se trouvent Le Puy-en-Velay ou Notre-Dame de la Salette, est tout simplement aussi bête que de vouloir dessiner la France avec une gomme. Le christianisme est consubstantiel de la France, née du baptême de Clovis, et couverte d’un blanc manteau d’églises dès l’an Mille. D’autres religions peuvent s’y déployer paisiblement, mais ne peuvent avoir un poids semblable sur ce qu’est notre pays. Malheureusement, l’islam, contrairement au judaïsme, confond souvent la présence et la provocation. Lorsque les tribunaux font semblant de ne pas distinguer ces deux façons d’occuper l’espace public, ils laissent se développer les germes de tensions et d’affrontements beaucoup plus graves.
Notre civilisation est imprégnée de pensée chrétienne, jusqu’à la laïcité, jusqu’à la séparation de l’Eglise et de l’Etat, qui sont conformes au Royaume du Christ qui « n’est pas de ce monde » et à la distinction évangélique entre Dieu et César. L’islam repose au contraire sur une confusion du temporel et du spirituel. Traiter les deux religions de la même manière est évidemment inepte car c’est un encouragement à l’agressivité de l’une, qui n’est d’ailleurs pas le fait de tous les musulmans. Dans le Génie du Christianisme, Chateaubriand écrivait en faisant référence aux grandes invasions : « Sans le christianisme, le naufrage de la société et des lumières eût été total. » Cette formule est malheureusement redevenue d’actualité !