En ce 15 Août, on aimerait dire tout le bien que l’on pense du pape François… Malheureusement la plupart de ses interventions sont décevantes aussi bien sur le plan intellectuel que sur le plan idéologique. Le discernement est l’une des exigences qui s’imposent à l’esprit des catholiques. Or, on trouve dans les propos du Souverain Pontife une tendance à la confusion, à l’amalgame conceptuel et historique, qui est le même que celui qui s’épanouit dans les débats publics du plus faible niveau. On sait aussi que cela relevait d’une méthode de propagande très volontaire utilisée par les marxistes. Ce sont deux raisons de s’étonner, et de prendre distance par rapport au discours du pape quand il aborde des sujets politiques. Il a récemment fourni un malencontreux exemple de cette dérive de la pensée tellement contraire à la précision méticuleuse de Benoît XVI. Le pape a fustigé le souverainisme et le populisme en les identifiant l’un à l’autre dans une approximation qu’il a aggravée par une « reductio ad hitlerum », elle-aussi symptomatique du journalisme de bas niveau et de l’idéologie de gauche.
Ainsi donc, la souveraineté d’un Etat, certes acceptable, serait mauvaise parce qu’elle correspondrait à une « fermeture », à un « isolement ». Certains pourraient voir dans cette ambiguïté un signe du jésuitisme. Il est quand même assez étonnant q’un Chef d’Etat souverain, même s’il est physiquement minuscule, s’en prenne à une souveraineté millénaire, dans ce cas précis, et qui n’a pu être sauvegardée que difficilement. La souveraineté n’est pas l’autarcie. Elle repose au contraire sur la reconnaissance de l’indépendance d’un Etat et de la légitimité du pouvoir à l’intérieur de ses frontières, par les autres Etats. La souveraineté n’est donc nullement un isolement, mais une participation au concert des nations. C’est le fondement même du droit international, et le rapprochement du souverainisme avec Hitler est d’autant plus incongru que celui-ci n’a cessé de violer la souveraineté de ses voisins, garantie de leur indépendance. Le champion de la souveraineté est Churchill et non Hitler ! La protection des frontières, le contrôle de leur franchissement sont indissociables d’un Etat souverain. Lorsque celui-ci ne peut plus ou ne veut plus les assurer, il perd sa souveraineté, et le peuple, son indépendance, garantie de sa dignité. L’invasion, militaire ou démographique, d’un Etat lui fait perdre la maîtrise de lui-même au profit du chaos ou d’une perte d’identité et d’indépendance. Les grandes invasions du Ve siècle ont revêtu un aspect plus démographique que militaire. Beaucoup d’envahisseurs ont été « accueillis », ont occupé des territoires dépeuplés, ont fourni à l’armée ses supplétifs et ses alliés, jusqu’au jour où ils se sont emparés de l’Empire et l’ont dépecé. L’identification du populisme au souverainisme est doublement malhonnête. Soit le populisme est confondu avec le nationalisme, ce qui expliquerait le recul surprenant du pape devant le mot « nous », soit il vise à critiquer la notion de peuple souverain, et c’est une critique de la démocratie.
Or, si le nationalisme agressif est condamnable d’un point de vue chrétien, le défensif ne l’est nullement puisqu’il vise à protéger l’identité et la liberté des personnes qui forment un peuple et qui ont un droit légitime à la transmission de leur héritage culturel et spirituel. Les prédécesseurs de François, dans la ligne de Saint-Thomas d’Aquin, avaient été très clairs à ce sujet, parce que ce respect de l’identité fait partie de « l’écologie humaine », de cette primauté de la recherche de la dignité. La menace évidente que l’extension de l’islam dans de nombreuses villes d’Europe fait peser sur le christianisme devrait alerter le Chef de l’Eglise catholique. De même, l’idée que l’Europe technocratique doit être préférée par un chrétien à la démocratie au sein de laquelle les citoyens choisissent leur destin collectif est un contre-sens. Certes, on a pu croire qu’à son origine la construction européenne était d’inspiration démocrate-chrétienne face à la menace totalitaire, communiste en l’occurrence. Or l’Union Européenne a renié ses racines chrétiennes et pratique une politique où la priorité est donnée à l’économie, non pas celle qui serait profitable aux Européens, mais celle qui se soumet aux impératifs des lobbys mondiaux et continentaux, qui ont peu de rapports avec le christianisme. « L’ouverture » dont elle se vante et qui pourrait passer pour sa part d’esprit chrétien correspond d’abord au soutien qu’elle apporte à la migration économique, laquelle pèse sur les salaires au grand bénéfice des employeurs. Le véritable christianisme repose sur la volonté de faire en sorte que les migrants restent chez eux avec leurs coutumes et leurs talents plutôt que de les apporter à l’Europe. Aujourd’hui, le nationalisme l’emporte partout dans le monde. Le destin de notre continent serait celui d’une proie soumise aux prédateurs sous prétexte de sa puissance passée ? Si le populisme exprime la volonté d’un peuple de rester fidèle à son héritage, de demeurer lui-même, et de s’en donner les moyens, il n’y a rien là qui ne puisse servir de règle à tous les hommes.
Le « nous » chrétien, ce doit d’abord être l’affirmation d’une solidarité des chrétiens, en Europe et dans le monde, et ensuite une charité ouverte à l’humanité de manière cohérente en privilégiant l’aide aux Etats les plus pauvres dans le respect de leur… souveraineté. La satisfaction narcissique que le membre d’une ONG peut ressentir à avoir participé à une chaîne de passeurs dont les autres maillons ne sont pas aussi désintéressés que lui est une illusion. Il est triste que le Saint-Père entretienne cette illusion, et prenne ainsi parti dans la politique italienne contre Matteo Salvini et une grande partie des Italiens.
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