Tribune libre d’André Picard
Après le succès de la Manif pour Tous du 13 janvier, l’opposition enfourche le cheval de bataille du référendum, en essayant de faire accepter au Gouvernement et au Président de la République l’idée d’une consultation populaire sur le « mariage pour tous », seule issue possible pour espérer un retrait du projet de loi. S’il peut paraître contestable de soumettre à la vox populi une institution dont le fondement relève de la réalité anthropologique et de la loi naturelle, il n’est certainement pas plus acceptable de laisser à des politiciens le soin d’en redéfinir la nature.
La droite espère en effet que le succès historique de manifestation de dimanche dernier permettra de maintenir la pression sur François Hollande et son Gouvernement, qui se sont engagés, lors de la campagne des élections présidentielles et législatives de 2012, à dénaturer le mariage. Et à regarder de plus près la préoccupante et sombre conjoncture économique – qui devrait pourtant monopoliser l’attention du Gouvernement – les sujets de société sont pourtant les rares auxquels la majorité peut s’attaquer, sans risque de devoir renoncer une nouvelle fois à des promesses électorales, de faire déraper les déficits ou exploser les chiffres du chômage. L’enjeu est simple : le « mariage » homosexuel, que Christiane Taubira elle-même qualifie de « réforme de civilisation », permettrait de rassurer sur le long terme un électorat qui commence sérieusement à douter de l’ancrage à gauche et de la détermination de la majorité actuelle.
À cet égard, l’opposition – et elle en est parfaitement consciente – a peu à attendre du Gouvernement et du Président de la République, qui, aux termes de l’article 11 de la Constitution, sont en pratique les seuls à pouvoir décider de la mise en place d’un référendum. Et bien évidemment, ces derniers se garderont bien de se tirer une balle dans le pied, et d’offrir à l’UMP, encore groggy de ses luttes internes, une occasion inespérée de se refaire une santé !
Pourtant, celle-ci aurait pu bénéficier d’une opportunité inespérée de redonner la parole au peuple français. En effet, l’article 11, modifié par la réforme constitutionnelle de 2008, prévoit désormais la possibilité de convoquer les électeurs sur des questions de politique sociale notamment (le mariage en faisant partie, pour de nombreux constitutionnalistes), à l’initiative d’1/5e des parlementaires, soutenus par 1/10e du corps électoral, soit environ 4,4 millions d’électeurs. Mais la loi organique, indispensable pour déterminer les modalités d’application de l’alinéa 3 de l’article 11 de la Constitution, n’a même pas été examinée par la majorité précédente, qui avait pourtant 4 ans pour le faire !
Alors, qui est vraiment responsable de l’éventuelle absence d’un référendum ?
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