Éditorial d’Éric Martin*
La déferlante migratoire ? La zone euro qui n’en est qu’au commencement de la crise de la dette des États avec effet domino à venir (après la Grèce, l’Espagne, etc) ? Les États-providence en faillite et manifestement irréformables ? La spoliation des citoyens (toujours les mêmes) organisée par les gouvernants de gauche mais aussi de “droite” ? Le vote de lois immorales par des politiciens “[obnubilés] par le contrôle étatique du sexe, qui [s’arrogent] le pouvoir de dire par la loi ce qui est anthropologique et ce qui ne l’est pas” (1) ? Autant de raisons de continuer à se mobiliser, le plus intelligemment possible, pour convaincre les hommes et vaincre les idéologies. Autant de raison, aussi, de préparer nos arrières en cas de nouvelles défaites. Car, depuis quarante ans, la droite libérale est terrassée par l’étatisme et le fiscalisme, la droite identitaire par l’immigrationnisme et le multiculturalisme et la droite sociale par la culture de mort, des fléaux qui constituent le “mondialisme”. Il n’est donc – malheureusement – pas complètement farfelu de prévoir de nouvelles défaites à l’avenir. Peut-être (souhaitons-le) provisoires. En partant. Ailleurs ou en France. Pour survivre.
Le retour à la terre est un phénomène encore marginal mais le succès du livre (2) de Piero San Giorgio laisse supposer qu’il pourrait prendre de l’ampleur. Parce qu’en situation de crise grave, on vit mieux à la campagne qu’à la ville où l’interdépendance est la règle. À celle-ci, les survivalistes, puisqu’on les appelle ainsi, préfèrent l’indépendance, aujourd’hui perdue contre soi-disant services rendus, dans la droite ligne des penseurs conservateurs et de leur anti-contractualisme. Indépendance ne signifie pas égoïsme, mais plutôt partage consenti avec les personnes de son choix. Partage ou… échanges matériels, aisés à ne pas déclarer et impossibles à taxer. Utile en ces temps de socialisme galopant.
L’expérience est sacrément tentante quand on compare le prix des fermes abandonnées en France profonde avec ceux des appartements en villes où il fait de moins en moins bon vivre lorsqu’on n’est ni bobo ni immigré, alors que les nouvelles technologies permettent à de plus en plus de personnes de travailler à distance, que les prix de l’énergie ne cessent de monter et, surtout, qu’en de telles conditions, nos destins économiques, sociaux et moraux, sont plus que jamais influencés par des événements ou des personnes sur lesquels nous n’avons plus la moindre prise ni le moindre contrôle.
L’idéal est, à mon avis, de partir vivre à la campagne en couple. Par exemple, le mari continue à travailler dans le monde, tant que cela est encore possible tandis que la femme crée un potager, achète des bêtes et tente de retrouver les gestes familiers de ses lointains ancêtres. Une belle manière d’élever et d’éduquer ses enfants, ce retour à la terre. Si d’autres familles partageant ces idéaux habitent à côté, pourquoi ne pas se regrouper pour instruire les enfants et les dégager de l’emprise néfaste de l’Éducation nationale ? Pourquoi ne pas faire revivre les fêtes d’antan ? Pourquoi ne pas se présenter aux prochaines élections municipales et désengager la municipalité (par exemple de l’éducation en laissant les parents s’en charger. Après tout, il n’est pas obligé d’avoir une école publique sur le territoire communal) donc réduire les impôts locaux ?
Vous l’avez compris, ce retour à la terre n’a que l’apparence d’une retraite. En plus d’être un réflexe de survie économique, sociale, morale donc idéologique pour la femme et/ou l’homme de droite qui le peu(ven)t, il est un autre terrain sur lequel doit être menée la guerre culturelle, un terrain cette fois-ci choisi donc plus propice à la victoire. Évidemment, cette expatriation vers le pays réel nécessite des sacrifices et de la cohérence. Pas facile pour des êtres qui sont tous la somme de leurs incohérences ! Il n’est pas dit non plus que les pouvoirs publics voient d’un bon œil cette soustraction partielle et pacifique à leur autorité qui pourrait contribuer à faire enfin comprendre aux partisans des trois droites évoquées supra qu’ils ont bien plus en commun que ce que la gauche ne leur dit et qu’eux-même le croient.
*Éric Martin est rédacteur en chef des Nouvelles de France.
1. comme l’écrit la blogueuse catholique “Nystagmus” dans un post intitulé “Vivement le 7 mai”.
2. Survivre à l’effondrement économique, par Piero San Giorgio, Le retour aux sources, 2011, 422 pages, 23 €. À commander auprès du service abonnements des Nouvelles de France (+ 5 € de frais de port), 18-24 quai de la Marne 75164 Paris Cedex 19.
> Cet éditorial est extrait du magazine Nouvelles de France de juin 2012 (n°8), dont pouvez consulter le sommaire ou commander un numéro ici.
3 Comments
Comments are closed.