La situation européenne est franchement préoccupante. Évidemment, pour les habitués de mes billets, la surprise est assez mince. En revanche, les autres vont de découvertes en découvertes à mesure que les alarmes se font plus pressantes de la part de personnalités de plus en plus en vue…
Bien sûr, la presse française est aux premières loges pour décortiquer avec délectation les résultats d’une élection qu’une quasi-majorité des Français a boudée, ce qui lui laisse quelques pages, dans les sections intérieures de leurs journaux sur-subventionnés, pour évoquer les douloureuses alertes que lancent des financiers de plus en plus reconnus.
Ainsi, pendant que les quotidiens se tortillent la nouille sur les déclarations fracassantes d’un Nasri, joueur de foot d’une équipe incolore, inodore et sans saveur, sur les tweets de la première gaffe de France ou sur la nouvelle loi contre le harcèlement sexuel sans laquelle l’ensemble de la société française menaçait de basculer dans la barbarie la plus complète et le retour évident au droit de cuissage, on découvre que Christine Lagarde, dans une interview à CNN, confirme l’analyse déjà particulièrement gratinée de George Soros, qui estimait que les pays européens avaient au plus trois mois pour sauver la monnaie unique.
Les arguments de Soros (ceux de Lagarde se résumant à les reprendre) sont brefs mais efficaces : pour le milliardaire, seuls les Allemands disposent du réel pouvoir d’infléchir la marche entreprise actuellement, et disposent de trois mois avant que l’Allemagne ne soit elle-même en difficulté. Si l’on regarde les chiffres macro-économique du pays, résumés dans l’analyse de Loïc Abadie qu’on peut lire ici, force est de constater que Soros a raison : dans les mois qui viennent, la récession qui s’installe en Europe provoquera inévitablement une forte contraction des exportations allemandes et, par voie de conséquence, entamera sa croissance comme ce fut le cas en 2008 et 2009.
Et la question n’est plus de savoir si l’Allemagne va avoir des problèmes, ni même quand. Le chat est maintenant sorti du sac lorsqu’on regarde quelques indicateurs clés :
- ce mois de mai, le secteur manufacturier s’est contracté avec le rythme le plus soutenu en trois ans,
- l’indice de pouvoir d’achat est en berne,
- la production industrielle a déjà baissé,
- le nombre de création d’entreprises aussi,
- les commandes à l’export aussi,
- et le sentiment des investisseurs et des analystes marque lui aussi le pas…
Bref : oui, l’Allemagne a des soucis. Reste donc à savoir ce qui va se produire ensuite car une fois l’Allemagne elle-même en récession, il ne faudra pas compter sur ce pays pour bailouter tout le petit monde européen dans la bonne humeur et relancer le petit atelier d’imprimerie d’art de Draghi La Bonne Combine…
Quant à la France… Elle ne semble pas aller de mieux en mieux non plus. Malgré le retour messianique du socialisme triomphant incarné par un Hollande à la fois majestueux, affûté et redoutablement populaire, un récent commentaire par William Porter, analyste au Crédit Suisse, ne laisse aucun doute sur l’avenir de l’Hexagone dans cette crise : cela fait quatre mois qu’on cache les problèmes par des recapitalisations bancaires au moyen de refinancement auprès de la BCE (LTRO), et compte-tenu de la capacité d’apprentissage des marchés, il estime que cela peut durer encore un maximum de deux mois. Après quoi, l’analyste évoque clairement la faillite des mécanismes de soutien et/ou celle de la France.
Autrement dit, début août, la France devrait connaître une phase difficile et si Soros, Lagarde et les analystes du Crédit Suisse ont raison, la rentrée de septembre s’annonce particulièrement mouvementée. De toute façon, si on s’en tient exclusivement aux sommes mobilisées jusqu’à présent pour subventionner sauver les banques en difficulté, on comprend que la route vers la croissance et la résorption des problèmes n’est pas celle qui fut prise et que si la route actuelle est droite, la pente est non seulement raide, mais savonneuse, parsemée de mines antichars, et terminée par un mur bien solide en béton armé :
Devant ce constat, on comprend l’empressement quasi-maladif de nos « élites » à vouloir tenter l’intégration européenne politique et fiscale totale : les dirigeants ont bien saisi l’intérêt qu’ils pouvaient tirer d’un sentiment de panique générale. Et laisser perdre une bonne crise majeure comme celle-là serait du gâchis !
Dans l’idéologie socialiste dominante, bruyamment relayée par les frétillants collectivistes à morale souple comme Attali, seul un Gouvernement mondial permettra à l’Humanité de réaliser sa plénitude à base d’égalité totale et de planisme étatique débridé (le soviétisme, mais « en mieux », quoi). Et le chemin évident pour ce gouvernement mondial passe par la coagulation des nations entre elles, ce que la construction politico-technocratique européenne permettait dans une certaine décontraction au moins jusqu’à dernièrement, la crise ayant quelque peu crispé les peuples.
La prochaine étape, avec l’accélération de la déliquescence de l’euro et l’enchaînement prévisible des faillites d’États, sera parfaite pour pousser l’agenda fédéraliste en clamant à la face du monde affolé qu’il est LA solution aux crises financières, aux problèmes économiques, aux sexes tordus et aux motos russes qui refusent de démarrer. Et ne croyez pas qu’il s’agit de conspiration, l’agenda existe bel et bien, au moins dans la tête de certains députés : l’union politique et fédérale avance, à petit pas, pour ne pas faire peur.
…
Il reste quelques jours avant les résultats des élections. Je parle ici des grecques, les législatives françaises n’ayant à peu près aucun intérêt, si ce n’est pour les petites grimaces des uns et des autres à l’arrivée ou au départ de certains députés. Le 17 juin au soir, la Grèce va, implicitement, choisir de rester dans l’euro, ou de s’en séparer. Dans ce dernier cas, notez qu’aucun député fraîchement élu, aucun ministre nouvellement en place, aucun Président des Bisous ne semble avoir montré la moindre préparation à ce qui suivra.
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Photo : « Tempête, côtes de Belle-Ile” de Claude Monet, 1886, 65 x 81 cm – Huile sur toile, Musée d’Orsay, Paris.
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