52% des Français seraient favorables à une majorité présidentielle aux législatives. Même si ces chiffres sont annoncés par la « voix du président », BFM, sur la base d’un sondage maison « Elabe », ils font réfléchir. On dira que c’est dans la logique de la Ve République d’offrir une majorité au président élu. Ce serait oublier que cette élection a été obtenue sinon par un « coup d’Etat » au moins par un tour de « passe-passe » qui a associé l’Elysée, les médias et une instance judiciaire soumise au pouvoir socialiste, avec une opportunité et une rapidité que le commun des justiciables ignore. Une « affaire » grossie sans mesure, puis multipliée en bouquet, a torpillé le candidat issu de la primaire de droite et a voilé l’essentiel des débats qui aurait mis en lumière le bilan calamiteux d’un mandat auquel Macron était associé. Une fois Fillon éliminé, « l’affaire » disparue des médias, et le candidat sorti du chapeau élyséen seul face à Marine Le Pen, là encore le débat a été faussé par la mobilisation contre le Front National. Celle-ci a réuni les commissaires politiques habituels des mondes de la politique et de la communication, les moralistes distingués religieux ou non, les élus républicains toujours désireux d’éliminer le concurrent, et une grande partie de l’électorat de droite, inquiète du programme économique de Marine Le Pen, et atterrée par sa prestation télévisée face au nouveau venu, brillant et séduisant à bon compte. Dans un premier temps, il fallait célébrer la justice. Dans un second, récupérer sans scrupule les horreurs de l’histoire. Sur l’ensemble du débat ainsi biaisé, l’économie a pris le dessus par rapport aux questions régaliennes alors que l’Etat et son Chef sont évidemment mieux en mesure de lutter contre la violence intérieure ou extérieure, le terrorisme et la criminalité qu’ils ne sont capables de faire de la France un pays aussi sérieux que l’Allemagne sur le plan économique. Fillon parlait de 10 ans, et c’était présomptueux. Le rétablissement de l’ordre peut être infiniment plus rapide. Il suffit par exemple de rétablir une idée fondamentale : l’Etat, et l’Etat démocratique surtout, détient le monopole de la violence légitime. Aujourd’hui, sur cette question comme sur beaucoup d’autres, nous sommes en Absurdie. On s’interroge sur les limites de la légitime défense pour les représentants de l’ordre ? Le bon sens suggère qu’un lanceur de projectile, lourd ou enflammé, sur la police, devrait être abattu. Les consignes de retenue sont sur ce point bien suspectes. Le programme de François Fillon était le seul à associer des mesures économiques radicales à une volonté de restaurer un Etat d’autant plus fort qu’il aurait été amaigri. Aujourd’hui, Woerth, ce comptable à la tête d’enterrement, est chargé de vendre aux électeurs « de droite » un programme législatif, du fillon rebouilli, et donc amolli, qui consiste à avouer une fois de plus que la droite n’ose jamais être la droite. La TVA laisse la place à la CSG. On repousse le populisme avec horreur, mais on s’abandonne piteusement comme d’habitude à la démagogie.
Deux regards peuvent se porter sur la situation actuelle. Ou les Français ont décidé de renvoyer les vieux partis et leur alternance infructueuse au grenier des vieilleries démodées. Ils vont alors élire massivement les députés d’ »En Marche » qui vont soutenir une politique libérale-libertaire. Ils seront passés pour la plupart par la case socialiste, celle de Terra Nova plus que celle du PS, seront des ralliés de la première heure, ou des transfuges du centre et de la « droite ». L’ensemble sera hétéroclite et fragile : un décor en carton, repeint aux couleurs de la jeunesse et de la fraîcheur par des médias complices. Il est à craindre que cette « révolution » progressiste ne soit en fait qu’un gigantesque recul vers les confusions et la médiocrité de la IVe République. Beaucoup des électeurs « de droite » qui s’engageront dans cette voie le feront avec beaucoup de candeur. La navrante réduction du débat aux propositions économiques et sociales ramène les positions d’intérêt personnel au premier plan. Les retraités devraient repousser le programme du président élu, mais les cadres et les entrepreneurs devraient lui donner sa chance. La main sur le coeur, à l’américaine, du président est un symbole fort. La France, son indépendance, son identité, ses valeurs familiales, ne sont plus à l’ordre du jour. Pourtant, des crétins de journalistes osent parler de de Gaulle à propos de ce produit des médias et d’un coup politique qui n’a vraiment aucun rapport avec le 18 Juin… sauf que ce sera le jour du 2e tour des élections législatives.
D’un autre point de vue, on peut assister à une redistribution des cartes. La sociologie électorale parle : la France périphérique, en difficulté, celle d’une industrie en déclin, d’une agriculture ravagée, des classes moyennes, ulcérées par une imposition sans mesure avec les services rendus par les pouvoirs publics, a été écrasée par la France plus à l’aise, mêlant un conformisme noyé dans la moraline à un souci d’efficacité économique. L’immigration musulmane a plus marginalement participé à la victoire. Dans ma ville de Tourcoing, les bureaux habituellement à droite, comme ceux des quartiers où les immigrés sont nombreux, ont voté Macron à près de 70% et c’est dans les quartiers populaires plus traditionnels, plutôt à gauche, que Marine Le Pen fait ses meilleurs scores jusqu’à être majoritaire. Ce vote de classes et de communautés n’est pas une bonne nouvelle pour la droite. La droite « bourgeoise », comme on dit en Suède, risque de se replier sur les beaux-quartiers, de triompher à Passy et se faire laminer à Belleville ou à la Goutte d’or. L’autre droite sans laquelle il est impossible d’obtenir la majorité est populaire. Elle risque d’être découragée à force d’être méprisée. Enfin, le quatrième homme a réussi une percée. Les insoumis seront aussi réticents que les patriotes à se laisser hypnotiser par l’idole fabriquée par le microcosme. Les élections législatives pourront donc aussi conduire à de nombreuses triangulaires ou quadrangulaires qui aboutiront à une Assemblée incertaine dès le début. C’est alors que le bon sens imposera la recomposition de la droite, à moins bien sûr que celle-ci en soit définitivement dénuée.
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