Il y a quelque mois, comme le temps passe, je me moquais dans les colonnes de Nouvelles de France de cette idéologie du gender, « cet archaïsme qui se veut moderne ».
Mieux informé, je n’enlève rien de ce que j’ai écrit, mais je m’aperçois que l’action du couple infernal Peillon/Belkacem n’est pas seulement une de ces fumisteries à la mode qu’adorent les faiseurs de systèmes-qui-branlent-dans-le-manche-au-moindre-examen.
Il s’agit donc de « déconstruire les stéréotypes », puisque, la main sur le cœur, il n’y a pas de « théorie du genre » enseignée aux bambins. Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais j’adore « déconstruire ».
Cela vous a un petit air gentil, innocent , ces petites briques qu’on défait comme un jeu de Lego. Rien à voir avec le vilain mot de « détruire ».
Toujours dans NdF.fr, Christian Vanneste a fait un sort aux chasseurs de stéréotypes, ces sales animaux cuirassés de certitudes, mais sans doute nécessaires à l’équilibre des individus comme à celui des sociétés. Un thème sur lequel je reviendrai si j’ai le temps.
Toujours est-il que l’on peut toujours opposer des stéréotypes à d’autres stéréotypes. Au petit serpent Najat, qui déclarait en 2012 que « les stéréotypes, ça se construit dès le plus jeune âge, j’ai envie de demander : quand, et comment se sont construits les tiens ?
(Je tutoies le petit serpent, c’est la seule familiarité que je puisse partager, hélas, avec elle lui.)
D’où viennent tes courtes certitudes, qui sont à la pensée conceptuelle ce que le pavillon « Ça m’suffit » est au Pont de Tancarville ?
J’imagine les longues nuits de studieuses insomnies, le long parcours universitaire, la fréquentation intime des meilleurs auteurs, les redoutables questionnements, que le petit serpent aurait dû affronter avant que de nous délivrer son profond message, et décider de libérer nos enfants de leurs stéréotypes, cela « dès leur plus jeune âge ». Je ne lui en veux pas de s’être contenté de l’air du temps ; sinon, comment devenir ministre à l’âge où la beauté excuse tout ?
Un ministre, ça cause, ça minaude, ça psittacise, ça ne pense pas.
Des clichés plus ou moins ressemblants
« Stéréotype ! Stéréotype ! Est-ce que j’ai une tête de stéréotype ? » Oui, petit serpent. Le stéréotype du tout-acquis, et celui de l’égalité. L’un est erroné, mais il aurait fallu pour le savoir pousser un peu tes études côté génétique, et si possible hors de l’usine à formatage. L’autre ne signifie rien, et n’est qu’un slogan.
Tout stéréotype est caricature d’un réel complexe, mais il y a des clichés plus ressemblants que d’autres. Les tiens ne sont pas des clichés, ce sont carrément des faux.
(ici me vient un doute : a-t-on le droit d’attaquer une femme ad hominem ?)
Déconstruire, dit-elle.
Sur qui opèrera cette fameuse déconstruction ? Sur les garçons comme sur les filles ?
Mon sale esprit de contradiction me souffle qu’un conditionnement identique n’a pas le même résultat sur des esprits différents, en l’occurrence l’esprit féminin et l’esprit masculin.
Petit détour par la génétique
(je sais, c’est pas beau, c’est pas bisounours, la génétique. Tant pis.)
On sait que la différenciation sexuelle dépend de la présence, ou l’absence, du petit chromosome Y porté par le géniteur. Le fœtus reste indifférencié jusqu’à plus ou moins cinquante jours, puis le Y fait le seul boulot dont il soit capable, le fainéant : organiser des testicouilles à la place d’un ovaire. Les dites testicouilles sécrètent un androgène, la testostérone, qui orienteront le sexe de base, féminin, dans le sens masculin.
(Ouah ! Le sexe féminin, sexe de base ! C’est nous les championnes ! Petit serpent a dû battre des ailes frétiller de la queue en apprenant ça, en cours de biologie élémentaire !)
Mais l’orientation masculine reste fragile au cours de l’ontogénèse (c’est dans Wikipédia, petit serpent). « Chez les mâles (…), le testicule fœtal doit activement s’opposer à la réalisation des structures féminines et imposer la formation des organes mâles » (Alfred Jost, Professeur au Collège de France, cité dans Le Fait féminin, d’Evelyne Sullerot).
(Pas si paresseux que ça, finalement, le petit Y !)
Plusieurs phases critiques entrent en jeu, in utero et à l’adolescence. La sexualisation masculine, y comprise la sexualisation du cerveau, peut être comparée à un train qui, faute des bons aiguillages aux bons moments, s’oriente vers la féminisation.
Et s’il est vrai que si l’on injecte de la testostérone aux femelles, on obtient des comportements de « garçon manqué » (j’adore), il s’agit bien d’un artifice d’un côté, d’une carence de l’autre. Ce n’est pas équivalent.
“La gynocratie, c’est aujourd’hui.”
Bref, on peut dire sans caricaturer que, du point de vue de l’orientation sexuelle, le mâle est le sexe fragile, et la femelle le sexe fort. Sexe fragile dans son orientation sexuelle, il n’est pas interdit de penser que le mâle l’est aussi dans sa psychosexualité (encore un anacoluthe, pardon).
Activités spontanées
Les études montrent que le psychisme des garçons et des filles, s’il n’est pas déterminé de part en part, est assez typique de leur sexe, depuis le plus jeune âge. L’observation de leurs activités spontanées, à cinq ou six ans, montre à quel point elles sont différenciées. Les activités de construction sont rares chez les filles, de même que les jeux de bousculade ; alors que les activités de langage ou les jeux de ménage sont beaucoup plus fréquents (René Zazzo, Directeur du laboratoire de psychobiologie de l’enfant, Paris).
Tout ceci est-il dû aux acquis, à des stéréotypes assimilés inconsciemment ?
Le croire, c’est se foutre du monde.
Certes, la psychologie enfantine se façonne par des modèles de comportement. Ceux des parents, de l’entourage familial ou amical, plus tard de l’imaginaire à travers les fictions (Batman, le Capitaine Fracasse, Tintin, etc).
Mais qu’est-ce qui fait choisir tel ou tel sorte de modèle ? Des préjugés culturels, à 4 ans ? Foutaises !
S’il se vérifie que le goût des jeux de bousculade est largement hérité génétiquement, que vas-tu faire, petit serpent ? Le dressage en férocité ? La chimiothérapie ? Le scalpel ?
Jugements sexuellement orientés
J’ai fait un long et indispensable détour par le biologique pour dire que, même dans une lutte égale devant des stéréotypes que portent les enfants, les intéressés ne sont pas égaux, parce qu’ils sont différents. « Les différences sexuelles chez les mammifères sont si grandes qu’elles dépassent la frontière des espèces. À bien des égards, les mâles humains ressemblent plus aux étalons et aux taureaux qu’aux femelles humaines », ose écrire Susumu Ohno.
Il y a, pour soutenir l’idée d’une construction des stéréotypes de genre, le fait que les parents ont souvent tendance à porter sur leurs nouveaux-nés des jugements sexuellement orientés. Ils trouvent leur petit mâle plutôt tonique, costaud, et leur petite fille plutôt douce et gentille… alors qu’à cet âge, rien ne les distingue vraiment.
Comment remédier à cela, petit serpent ? En interdisant par décret ces touchants témoignages d’amour parental, un peu niais je l’admets ? En enlevant les nouveaux-nés à leurs parents ?
On en arrive là. Comme dans l’ex-Union soviétique. Mais cette filiation-là t’échappe peut-être, petit serpent.
Une tout autre affaire
Qu’on pousse les petites filles à mettre des pantalons (c’est déjà fait), ou à pousser des petites voitures, elles accepteront bien volontiers. Qu’on leur présente la possibilité de devenir plus tard maçon ou grutier, cela les amusera sans doute. Elles sont si gentilles, les petites filles, si désireuses de plaire à la maîtresse !
Elles n’en rêveront pas moins d’être plus tard d’être maîtresse d’école, puéricultrice ou vétérinaire (en ville, car pour ce qui est d’aider la vache à vêler, c’est autre chose !).
Qu’on habille les petits garçons à s’habiller d’une robe, qu’on les force à jouer à la poupée ou à la dînette, je crois que c’est une tout autre affaire, alors que leur sexualisation psychique est encore hésitante, fragile comme elle l’a toujours été.
Je suis persuadé que, consciemment ou pas, la lutte contre les stéréotypes sexuels n’est qu’un épisode de la guerre menée par un néo-féminisme combatif, qui se pare des vertus de l’égalité pour établir une suprématie.
Pourquoi ce privilège ?
Sauve qui peut, les garçons !
Les femmes et les enfants d’abord, à bord du Titanic ?
C’était normal en ce temps-là. Aujourd’hui, les enfants, d’accord.
Les femmes ? Ne sont-elles pas nos égales ? Pourquoi ce privilège ?
Sauve qui peut, si vous ne voulez pas devenir ce qu’elles espèrent, et que sont déjà tant d’escouillés porteurs de génitoires : des aides ménagères, qui soient aussi les déversoirs de leurs rancoeurs.
La gynocratie, c’est aujourd’hui.
Prochain billet : Le Grand Déconodrôme
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