Le secrétaire général de l’UMP Jean-François Copé a confirmé mercredi 12 janvier lors de ses vœux devant les jeunes militants son refus de toute alliance avec le Front national, aussi bien pour des raisons de “valeurs” que de “tactique”.
“Sur la question des valeurs, nos différences sont telles qu’il n’y a pas de quoi se retrouver”, a-t-il déclaré au sujet du Front national. Et “sur le plan tactique, ceux qui préconisent ses alliances commettent un contresens considérable”, jugeant en substance – et très maladroitement – que les électeurs finiraient par préférer l’original à la copie…
Selon lui, “l’honneur de la droite et du centre français est d’avoir toujours refusé l’alliance avec le Front national”.
Près de la moitié de sympathisants de l’UMP ne sont pas loin de penser le contraire. En effet, mercredi 12 janvier, un baromètre TNS-Sofres pour Le Monde/Canal+/France Inter notait que 43% des sympathisants UMP étaient favorables à des accords entre le parti de Jean-François Copé et celui de Jean-Marie Le Pen. Soit 20 points de plus qu’en 2002 (baromètre réalisé sur le seul RPR, supposé plus à droite qu’une UMP censée abriter une composante centriste…).
35% des sympathisants UMP (+16 points par rapport à 2002) estiment que leur parti devrait nouer des alliances “selon les circonstances” et 8% (+4 points) souhaitent une “alliance électorale globale”. 6% n’ont pas d’avis sur la question. Cela fait tout de même 49% des sympathisants qui ne seraient pas choqués par des alliances avec le FN !
Le conservatisme en ligne de mire. Mais de quel conservatisme parle-t-on ?
Jean-François Copé a également dit son refus de tout conservatisme. “Si vous commencez déjà à être conservateurs, ce n’est même pas la peine d’être jeunes militants !”, a-t-il lancé aux Jeunes Pop’.
Dans sa ligne de mire, tous ceux – à commencer par le Premier ministre François Fillon – qui lui reprochent ses récentes prises de position – plutôt orthodoxes – sur les 35 heures, le statut des fonctionnaires.
“Vous en aurez partout, des conservateurs, y compris dans notre famille politique. C’est vendu avec…”, a ironisé Jean-François Copé, sans citer de nom. “Il faut leur expliquer gentiment qu’ils peuvent ne pas être d’accord avec vous, c’est même respectable, et vous pouvez même écouter attentivement leurs objections. Si elles ne vous ont pas convaincus, retournez au front (sic). Surtout, ne reculez pas !”, a déclaré celui qui cumule avec la direction de l’UMP les mandats de maire de Meaux et de député de Seine-et-Marne.
Il semble que dans l’esprit de Jean-François Copé, un conservateur soit quelqu’un qui refuse toute évolution – de droite comme de gauche. Son anti-conservatisme n’est donc, à première vue, pas fondamental mais purement formel. Il n’est pas dangereux mais idiot car refuser par principe l’absence de changement ne vaut pas mieux que refuser par principe le changement. Je ne suis d’ailleurs pas certains que Jean-François Copé soit anti-conservateur (au sens où il l’entend) pour ce qui concerne la loi Veil – acquis sociétal par excellence dont il ne rate pas une occasion de rappeler sur les plateaux télés qu’on la doit à la droite. Ou à propos des alliances avec le FN (cf supra) !
Il semblerait même que Copé cesse d’être anti-conservateur formel lorsque il devient anti-conservateur fondamental.
Copé est-il vraiment de droite ?
Le sénateur Fabienne Keller, qui vient d’intégrer l’organigramme de l’UMP, a beau avertir Jean-François Copé que l’“on ne peut pas afficher des centristes en vitrine quand seules des idées de droite conservatrice sont proposées en magasin”, personne de sérieux (formé) ne croit un instant au conservatisme fondamental de Jean-François Copé. Celui-ci ne fait que surfer sur les modes. Par exemple, il a compris que ses compatriotes se méfiaient de plus en plus (et à raison !) de l’islam donc de ses adeptes les plus rigoureux. Selon le baromètre cité plus haut, 49% des sympathisants UMP trouvent qu’“on accorde trop de droits à l’islam et aux musulmans en France“. Du coup, opportuniste comme Nicolas Sarkozy, Copé évoque devant les Jeunes Pop’ la “jurisprudence” du voile intégral, dont il estime que le vote de l’interdiction est son œuvre… comme d’autres leur participation à la guerre d’Indochine : “Vous n’imaginez pas ce qu’on a pris mais on n’a pas calé” plastronne-t-il. Si Jean-François Copé était sérieux dans son approche des maux de la Cité, il s’attaquerait aux causes du problème (immigration et baisse de la natalité française) plutôt qu’à une de ses nombreuses et prévisibles conséquences. C’est cela, le conservatisme : un ensemble de valeurs assises sur les principes de (vraies) libertés et (donc !) de responsabilité, dont on se rend compte qu’elles sont intimement liées : famille, libertés individuelles et économiques, subsidiarité, défense forte du territoire et de l’identité… Comme trop d’hommes autoproclamés de “droite”, Copé n’a pas grand chose de vraiment conservateur (au sens où on l’entend) mais il est vrai qu’il l’est déjà plus que certains de ses collègues. Oui, Copé est anti-conservateur mais pas seulement au sens formel, il l’est sans vraiment assumer – sauf au cas par cas, par exemple, lorsqu’il prend position pour la loi Veil, désavouant du même coup son anti-conservatisme formel – au sens fondamental.
Comme les “identitaires” ont réussi à imposer le terme qui les qualifie dans les médias – malheureusement négativement mais à l’impossible, nul n’est tenu – les “conservateurs” doivent, sans excès sur la forme qui passerait pour de la provocation, réhabiliter ce terme qui mérite bien mieux que d’être employé pour qualifier ceux se complaisent dans le statu quo. Car Chirac n’était pas conservateur. Thatcher si. Un conservateur arriverait au pouvoir aujourd’hui en France, il ne conserverait (presque) rien, rien d’autre que les valeurs intemporelles mises à mal par l’hédonisme et l’étatisme ambiants.