par Pascaline Leroy
Si le Prince François a perdu la vie le 31 décembre 2017, quelques Grosses têtes ont perdu leur âme ce 2 janvier. Sans la moindre décence, qu’il s’agisse du délai ou des propos, le fils défunt s’est vu affublé de moqueries et d’humiliations sur son handicap qui dépassent de loin la liberté d’expression et outrepassent l’humour le plus sombre. Qu’à Dieu ne plaise, si l’homme en question avait été un migrant ou l’enfant d’une famille célébrée par les médias, ce triste sort ne lui aurait certainement pas été infligé. L’émission aurait versé dans la compassion et aucun ne se serait permis pareille outrance. Loin de cette réserve, l’émission a retenti de moqueries. Mais, cependant, nous sommes restés silencieux sur le plan juridique en pensant sans doute qu’une association contre la haine ou la discrimination allait agir, voire même qu’un responsable politique dans un gouvernement si prompt à la communication se manifeste ou saisisse le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel . Désormais, la saisine du père du Prince prend tout son sens auprès du CSA . Le Comte de Paris indique en effet dans sa requête agir « au nom de tous les enfants handicapés de France, pour atteinte à la dignité humaine ». La mansuétude de la famille est certaine puisqu’elle pourrait tout autant assigner au pénal les auteurs de cette funeste parodie. Ces derniers rétorqueront sans doute qu’il s’agit d’humour. Mais l’humour ne se confond pas avec l’attaque personnelle. Les humoristes sont comme les bouffons du roi ou de la société ; ils traitent bien sûr du handicap mais les limites existent. Ainsi, Patrick Timsit dans un spectacle de 1992 avait comparé les trisomiques à des crevettes roses : « Tout est bon, sauf la tête ». Assigné devant le tribunal, l’affaire s’était alors conclue par une conciliation avec les familles de parents, la création d’une association commune et surtout les regrets de l’acteur. Les humoristes traitent donc des personnes handicapées mais sous la forme d’une catégorie et non d’une personne nommément désignée. Aussi, quand à la situation souvent dramatique du handicap s’ajoute la souffrance du deuil, les commentaires quittent le domaine du rire pour celui de l’indigne. A cet égard, Le Président du CSA, saisi par Madame Emmanuelle Ménard, avait d’ailleurs rappelé relativement à l’affaire du décès du torero Ivan Fandillo que la chanson incriminée (« Humour noir et banderilles ») « en dépit du genre humoristique auquel elle se rattache, « avait pu légitimement heurter les proches de la victime ». Monsieur Olivier Schrameck ajoutait « que le fait de se moquer -voire de se réjouir- du décès d’un individu (… ) sous les rires et les applaudissements des personnes sur le plateau » avait porté atteinte à la dignité de la personne humaine. En attendant la décision, certaines autorités, comme certaines femmes pourraient exprimer leur compassion devant ce deuil familial injustement moqué : ce serait aussi un juste motif d’indignation nationale.
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