Une exception confirme ces temps-ci la règle. Un récent rapport parlementaire a pu être évoqué dans certains médias, un peu moins mensongers que les autres. Ainsi celui “qui dénonce les conditions de travail des forces de l’ordre”[1]. Pour qu’un tel document soit porté à la connaissance du public, c’est qu’il est véritablement très tard. Peut-être même trop tard.
Il démontre en effet, le peu de cas que l’État, si envahissant par ailleurs, fait de ses véritables missions régaliennes. Le maintien de la sécurité intérieure, mais aussi l’administration de la justice et la défense des frontières sont livrées à une paupérisation accélérée de leurs faibles moyens.
L’urgence pour la France n’est pas d’agir sur le climat de la Planète, mais de rétablir dans leur fonctionnement les vraies tâches régaliennes délaissées par nos technocrates et autres donneurs de leçons politiquement correctes. Nos gouvernants postulent à la direction de l’Europe, mais ils ne veulent pas que les Français prennent conscience de la saleté des rues de Paris, de l’insécurité grandissante, de la misère de la police et de la magistrature.
Pendant une longue période de son existence votre chroniqueur a fait partie des [trop rares] citoyens et contribuables lecteurs des rapports et travaux parlementaires.
Une telle fidélité ne devait rien à l’insomnie, elle tenait à deux activités essentiellement diurnes.
La première au service de mon ami Christian Poucet et de son CDCA, de 1986 à 1999, m’amenait à suivre de près tout ce qui concernait la sécurité sociale, mais aussi la révolte des classes moyennes[2] et à l’époque la lutte pour un statut des travailleurs indépendants dont l’autoentreprise constituait une première étape.
La seconde motivation, au moins aussi militante fut embarquée, pendant quelque 20 ans, de 1989 à 2006 dans le projet radiophonique de Jean Ferré. Incompris des sots qui s’en emparèrent après sa mort, survenue en 2006, et, en quelque sorte trahi par cette imposture, il s’agissait de décloisonner les droites, entreprise que s’empressèrent de détricoter ses tristes successeurs[3].
Dans un cas comme dans l’autre, les rapports officiels, ceux de la cour des Comptes, dont le rôle constitutionnel n’a cessé de se développer depuis 1993, mais aussi les travaux de l’Assemblée nationale, et plus encore ceux du Sénat, permettaient déjà de se faire une idée de la réalité sociale et de l’effondrement économique du pays : représentation tout à fait différente de celles dont la communication gouvernementale n’a cessé d’enfumer l’opinion.
Cela n’incitait sans doute pas à l’optimisme et la relation avec les rapporteurs était précisément facilitée par le fait que très peu de gens s’intéressaient aux alertes qu’ils lançaient.
De cette double expérience j’avoue avoir retiré plusieurs leçons.
Tout d’abord l’absence d’intérêt pour les conclusions des études sérieuses m’a toujours frappé et m’interpelle encore.
Elle ne tient pas seulement à l’ignorance, à l’inculture et à l’incuriosité des journalistes.
Elle résulte d’abord de la volonté des dirigeants de l’État de continuer à jeter de la poudre aux yeux de l’opinion afin de ne surtout pas procéder à des décisions jugées douloureuses pour l’idée que se font nos maîtres de droit divin de leur réélection.
> Jean-Gilles Malliarakis anime le blog LInsolent.fr.
Apostilles :
[1] cf. l’article de Christophe Cornevin “Le rapport choc qui dénonce les conditions de travail des forces de l’ordre” en ligne le 9 juillet sur le site du Figaro.
http://premium.lefigaro.fr/actualite-france/le-rapport-choc-qui-denonce-les-conditions-de-travail-des-forces-de-l-ordre-20190709
[2] En classant mes vieilles archives j’ai retrouvé un manuscrit jamais publié, remontant à 1971 sur cette “Révolte des classes moyennes”. Près de 50 ans plus tard le degré de péremption ne m’en paraît pas déshonorant, en dépit de quelques illusions de l’époque qui feraien sourire aujourd’hui.
[3] Attachés au seul renforcement d’une petite extrême droite sectaire et ultra-souverainiste.
2 Comments
Comments are closed.