Entre un Premier Ministre qui perd ses nerfs et un Président indigne, qui ne se sent plus d’avoir rencontré un dictateur, dinosaure du totalitarisme marxiste, le visage de notre pays est défiguré. Certes, l’émotion est devenue à travers nos médiocres médias le vecteur de la politique. Certes, participer à une grande émotion collective, c’est aujourd’hui le moyen de se refaire une santé dans l’opinion et on se disait que les politiciens s’y livraient par calcul. Pas seulement ! Faute d’avoir encore des idées cohérentes, une vision de l’avenir du pays, ils se lâchent. Valls devient Manu la colère. François Hollande est désormais le « ravi » des Caraïbes, l’oeil encore émerveillé d’avoir vu le grand homme, le dictateur acteur de l’Histoire, dans laquelle lui même a tant de mal à entrer.
Quand on a connu tous les Présidents de la Ve République, on se représente leur suite comme la descente inexorable d’un escalier, marche après marche. Il ne s’agit pas là d’un jugement partisan sur les politiques. Chaque mandat présidentiel a connu des hauts et des bas, des réussites et des échecs que chacun juge au travers de ses orientations. Non, il s’agit de la manière dont la France a été représentée, de la stature donnée à la fonction présidentielle, de la manière dont les titulaires ont assumé le rôle. Manifestement, le résident actuel de l’Elysée n’a pas la dimension requise pour l’emploi. Etant constamment en dessous de ce qu’exige le légitime besoin de fierté nationale, il nous a habitué à la gène, puis à la honte. Ses petites blagues, ses lapsus malencontreux, ses escapades de Roméo en scooter accompagnaient une étonnante manie d’affirmer ou de prévoir ce que les faits allaient systématiquement démentir. L’ensemble frisait toujours le ridicule quand il ne versait pas dans le grotesque. Plus à l’aise pour la plaisanterie facile que pour la solennité, François Hollande avait cru faire de l’humour en disant son Premier Ministre rentré « sain et sauf » d’Algérie. Totalement inconscient des risques de la parole présidentielle, il a amené la France à présenter des excuses à Alger. Il y avait la double peine, on a eu la double honte. François Hollande n’a tout simplement pas conscience de ce qu’est la France et de l’image que doit donner son Président. Les Français ont découvert cette évidence, lorsque, apparaissant à la télévision, leur Président envoyait un message à Leonarda, se mettant au même niveau qu’elle : » si elle le demande, un accueil lui sera réservé ». Mais, à Cuba, Hollande a battu tous ses records.
En humble visiteur, il demandait la grâce de rencontrer Castro. » Je passais. J’aurais tellement voulu approcher votre grand homme ». Manifestement ému par sa rencontre, il regrettait sa brièveté et justifiait son bonheur en disant qu’il avait ainsi eu le privilège de côtoyer l’Histoire. On pourrait comprendre ce sentiment chez un individu à titre privé, pour lequel ce serait un événement qu’il racontera à ses enfants. Mais ce qui échappe à l’intéressé, c’est qu’il n’est plus un simple individu. Il est certes un peu triste de voir un tel personnage occuper une place qui fut celle de Saint-Louis, de Louis XIV ou du Général de Gaulle, mais cette place a des exigences qu’il ignore à l’évidence. La première vient de ce que la France ne joue pas dans la même cour que Cuba. Entre le pays qui a été un certain temps le premier en Europe, et l’un des premiers dans le monde et qui a gardé de son passé une place encore enviable parmi les « grands » et une île qui fut jusqu’à la fin du XIXe siècle une colonie espagnole « libérée » par les Etats-Unis, la distance qui les sépare n’est pas seulement celle de l’Atlantique. C’est celle de l’Histoire dont ce pauvre Hollande ne parvient pas à se croire l’héritier.
Le fait qu’un dictateur communiste ait pris la place d’un autre dictateur dans cette île ne peut passer pour un événement historique que pour trois raisons. Allié dévoué de l’URSS, il a menacé les Etats-Unis de très près. Il a accompagné l’expansion soviétique en Amérique latine et en Afrique, soutenant des guérillas ou d’autres dictatures marxistes, y compris en envoyant des troupes. Enfin il a bénéficié de la complaisance voire de la complicité de la gauche-caviar françaises et d’un certain nombre d’intellectuels, parmi lesquels, pendant un temps, l’inévitable Sartre, politiquement ignare et irresponsable. C’est dans ce cadre qu’est né le mythe du « Che », cet aventurier incapable d’être ministre et tout aussi incapable d’ailleurs de propager la révolution du Congo à la Bolivie où son agitation a pris fin. Bref, le Président de la République Française n’a pas salué un autre Chef d’Etat, en retraite, mais a satisfait une nostalgie en s’approchant d’une icône de son parti et de son milieu. L’attrait de la gauche française pour un dictateur est inquiétant. Son ADN, c’est « 93 », l’année du dérapage mortel dans la guerre civile, les massacres et le génocide, puis la dictature. Faire tomber les têtes, punir les riches, détruire l’adversaire en même temps que ses idées : l’inconscient de la gauche française est là. Sous le social-démocrate rondouillard, le refoulé a jailli. A moins qu’il s’agisse d’un petit calcul politicien à usage interne, d’un clin d’oeil à une extrême-gauche qu’il veut récupérer au prix de l’abaissement du pays.
Car, un Président élu dans une encore grande démocratie peut-il témoigner une telle ferveur envers un petit tyran latino-américain sans déroger ? Un Chef d’Etat qui se prétend à l’avant-garde du monde libre peut-il admirer celui qui a permis aux Soviétiques de pointer leurs missiles sur les Etat-Unis sans trahir ses valeurs ? Le politicien qui disait naguère que « la belle révolution tournait au cauchemar » peut-il négliger « l’interminable totalitarisme tropical » décrit dans Le Livre Noir du Communisme sans verser dans l’imposture ? Qu’aurait-il dit d’un homme de droite saluant en Pinochet, l’homme qui a sauvé le Chili du marxisme, pratiqué la meilleure politique économique d’Amérique latine et laissé place à la démocratie après un référendum ? Sans doute la même chose qu’à ceux qui ont rencontré Assad ou apprécient Poutine !
Pour reprendre la formule de Montherlant dans La Reine Morte, le drame de M. Hollande est de ne pas respirer à la hauteur où la France doit respirer.
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