Si l’on en croit les sondages, les catholiques pratiquants, après avoir en majorité soutenu Macron lors des élections de 2017, seraient les derniers à lui être encore favorables.
S’il est vrai que cette popularité commence à s’éroder, on peut dire qu’il aura fallu bien du temps pour en arriver là.
Il ne faut pas regarder que les sondages . Une partie des évêques, en tous les cas leur structure centrale la Conférence des évêques de France où subsiste un fort noyau de macroniens, la presse catholique mainstream : La Croix, La Vie, Le Pèlerin et la plupart des journaux catholiques diocésains ont favorisé puis célébré plus ou moins ouvertement l’élection de Macron. Pour ce qui est des journaux, rien ne laisse supposer qu’ils aient vraiment changé. Ajoutons l’enthousiasme de certaines associations relais comme les APEL.
Il y a aussi le bouche à oreille des beaux quartiers où les pratiquants étaient notoirement inclinés vers Macron. Pour des raisons sociologiques : ceux qui payaient l’ISF y étaient nombreux et influents – la considération financière passant, hélas, presque toujours avant les autres. Quelqu’un dont les idées personnelles étaient bien moins hostiles au catholicisme comme François Mitterrand est loin d’avoir bénéficié d’un tel crédit. L’âge aussi a joué : les personnes âgées restent le dernier bastion du macronisme.
Tout cela explique la honteuse réception de Macron par l’épiscopat français aux Bernardins le 9 avril 2018 . Elle aurait pu être protocolaire, réservée et polie mais elle s’est terminée par une standing ovation sans précédent dans l’histoire des relations de l’Eglise et de l’Etat depuis Clovis.
Pourtant, dès cette réception, Macron avait annoncé la couleur. Il ne cachait pas que, sur certains sujets – on sait lesquels –, il avait des idées différentes d’eux. Il s’est même permis, dans son discours, de donner une leçon d’humilité aux évêques : il ne se sont pas là, dit-il, pour faire des « injonctions », mais seulement pour apporter des « questionnements », ce qui est évidemment moins dérangeant. Macron appelait les catholiques à s’engager dans la Cité mais surtout pas pour dire ce qu’ils pensent ! Donc pas de rappel intempestif de la loi naturelle ou de la doctrine chrétienne de tous les temps en matière bioéthique et évidemment pas de réédition de la Manif pour tous !
Anecdotique ? La photo officielle du nouveau président a en arrière-plan Les Nourritures terrestres de Gide, manifeste libertaire et homosexuel.
Autre terrain : à peine arrivé au pouvoir, Macron s’est efforcé de durcir la guerre de Syrie, c’est-à-dire, en clair, de renforcer l’aide aux djihadistes qui massacraient les chrétiens d’Orient. Heureusement, il a dû en rabattre quand Donald Trump s’est engagé dans une politique d’apaisement.
Comme on pouvait s’y attendre, le président a entrepris les réformes sociétales qu’il avait annoncées, même si elles marquent le pas aujourd’hui (mais gare à une accélération subite si une fenêtre de tir se présente ! ) : autorisation de l’insémination artificielle des femmes seules ou en couple de femmes, allongement du délai de l’avortement légal, voire autorisation jusqu’à la fin de la grossesse en cas de difficultés « psycho-sociales », une expression dont on sait bien ce qu’elle veut dire. Si certains de ces projets, tous votés par l’Assemblée nationale mais pas par le Sénat, proviennent de propositions parlementaires, chacun sait que celles-ci n’ont de chance de prospérer que si elles reçoivent l’appui du gouvernement . Ce dernier a su arrêter une proposition particulièrement scabreuse, celle d’implanter l’embryon d ’une des femmes en couple dans l’utérus de sa compagne mais pour le reste, il a donné son accord.
En dehors de ces lois que Macron a sans doute promises aux réseaux internationaux qui l’ont fait élire, rappelons-nous la triste affaire Vincent Lambert : quelle naïveté chez ceux qui croient que l’issue malheureuse de l’affaire ne résultait pas d’une volonté expresse du président !
L’ombre de la culture de mort
Autre fait significatif : les dispositions scandaleuses prises sous prétexte de Covid au printemps 2020 : sédation lourde ( c’est-à-dire mise à mort) pour les personnes âgées atteintes ou paraissant atteintes du Covid dans les maisons de retraite. Il ne fait pas de doute que la pandémie a servi de prétexte à l’ extension insidieuse de l’euthanasie promise par Macron. Quelles étranges affinités du jeune et fringant président avec la culture de mort ! Jeune et chargé de l’avenir de la France mais qui ne veut pas d’enfants .
Il est regrettable que, pour les raisons sociologiques mentionnées plus haut, les organisateurs de manifestations contre les projets bioéthiques que nous venons d’évoquer aient refusé de le mettre en cause personnellement , comme si tout cela se passait dans son dos ! Les mêmes n’avaient pas tant ménagé Hollande.
Quand le nouveau premier ministre, Castex , a fait en juillet dernier, son discours d’investiture , il n’a pas même évoqué les projets bioéthiques (ou anti-éthiques). Pourtant le lendemain , l’Assemblée était invitée à débattre en urgence de ces projets , ce qui n’a pas empêché le site très officiel Alethéia de se demander sottement qui parmi les nouveaux ministres étaient les plus catho-friendly, expression ridicule qui signifie, outre le parallélisme mal venu avec gay-friendly, que l’on se contentera de quelques gentillesses pour en être content, indépendamment de prises de position de fond. Dans le même temps le ministre Véran déplorait publiquement, avec une franchise de bien mauvais goût, que le Covid ait diminué le rythme des avortements . Idéologie oblige, des instructions ont été données pour que tout soit fait afin qu’ils puissent être pratiqués alors même qu’en dehors de la réanimation, le autres services hospitaliers tournaient au ralenti.
Comment s’étonner dans un tel contexte que le confinement ait révélé au grand jour le mépris que le président a, en son for intérieur, pour l’Eglise catholique et le christianisme. L’interdiction temporaire des messes, alors que les supermarchés restent ouverts, la difficulté à moduler ou à lever cette interdiction alors que la politique est beaucoup plus permissive à l’égard de certains commerces : pour Macron et son entourage, il est clair que l’homme ne vit pas d’autre chose que de pain.
N’hésitons pas à le dire : le mépris insidieux qui est celui de l’actuelle équipe au pouvoir pour l’Eglise va bien au-delà de la lutte ouverte menée contre elle par les hommes de la IIIe République. Elle est au fond beaucoup plus destructrice. Elle ne s’en prend pas seulement à une institution mais à l’homme.
Si les catholiques ont encore tant soit peu de poids dans la société française, la sanction de ce gouvernement qui n’a déçu que ceux qui n’avaient pas voulu regarder en face ce qu’était Macron, doit être électorale. Elle ne doit certes pas se traduire par un appel à voter pour Untel ou Untel, mais l’influence souterraine qui a joué en sa faveur en 2017 doit désormais s’exercer à son encontre. Si certains organes de presse ou institutionnels ont été noyautés par le parti macronien , ils doivent être recadrés dans le sens d’une vraie neutralité. Sur le plan de l’éthique chrétienne, personne ne peut faire pire que le gouvernement actuel.
Roland HUREAUX