Tribune libre de Robert Ménard*
Vingt morts de plus le week-end dernier en Syrie. Tous les jours, la liste des victimes s’allonge. De part et d’autre. Combattants et civils. Le régime de Bachar Al-Assad est une horreur… qui ne date pas d’hier, certains devraient s’en souvenir.J’ai encore en tête de m’être trouvé bien seul quand, avec une poignée de militants de Reporters sans frontières, nous nous faisions arrêter sans ménagement sur les Champs Élysées. Nous étions le 14 juillet 2008 et le potentat syrien était l’invité de Nicolas Sarkozy pour le défilé de notre fête nationale…
Un dictateur, Bachar Al-Assad ? Il n’y a pas de doute et rien ne saurait justifier de le taire. Mais de là à dire n’importe quoi… Les journalistes Marc de Miramon et Antonin Amado le rappellent avec justesse dans la dernière livraison du Monde diplomatique. On y lit, par exemple, que le site de Bernard-Henri Lévy affirmait, dès septembre 2011, que « des tueurs d’Assad [ont] lancé dans la région d’Al Rastan, non loin de la ville rebelle de Homs, des opérations aériennes avec utilisation de gaz toxiques ». Rien que ça ! Mais sans aucune preuve, souligne l’Agence France-Presse. Qu’importe : la fin justifie les moyens. Comme les fameuses « armes de destruction massive » de Saddam Hussein, inventées de toutes pièces par l’administration Bush, histoire de justifier l’invasion de l’Irak.
Autre grande figure de notre intelligentsia, l’inénarrable Caroline Fourest. Cette fois, c’est dans Le Monde qu’on peut lire sous sa plume : « D’après Al-Arabiya, des opposants au régime iranien affirment que leur gouvernement a fourni un four crématoire à son allié syrien. Installé dans la zone industrielle d’Alep, il tournerait à plein régime… Pour brûler les cadavres des opposants ? » Hitler est de retour ! Mais notre écrivaine se garde bien de préciser que la chaîne satellitaire, qui diffuse la « nouvelle », appartient à l’Arabie saoudite, comme chacun sait un modèle de probité en matière d’information et, surtout, le véritable « parrain » de l’opposition syrienne. On ne va quand même pas se compliquer la vie avec ce genre de détails…
Nos va-t-en-guerre sont décidément prêts à tout pour nous pousser à intervenir dans la guerre civile qui ravage la Syrie. Comme déjà en Libye, avec les conséquences que l’on sait… Des faucons à qui notre droite ferait bien de ne pas emboiter le pas. Tous les arguments ne sont pas bons pour critiquer la gauche. Cette fois, la prudence de François Hollande a du bon. Il faut savoir le reconnaître.
*Robert Ménard est journaliste et fondateur de l’association Reporters sans frontières.
> Son blog : robertmenard.fr
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