Gaz de schisme

C’est une histoire de fracture, de triple fracture, et ça fait mal. Il y a d’abord la fracturation hydraulique de la roche et la pollution de la nappe phréatique qu’elle entraînerait. Cette hypothèse est l’une de ces peurs dont les »pastèques » se servent pour bloquer toute initiative dans notre pays depuis des années et que Chirac, avec sa clairvoyance habituelle, a cru devoir constitutionnaliser à travers le principe de précaution. On remarquera une fois de plus en passant que ces faux verts et vrais rouges, apparemment défenseurs de la nature,  sont les plus enragés partisans du mariage entre personnes du même sexe, qui n’a rien de très naturel, et de l’idéologie du genre, qui nie la réalité de la différence naturelle entre les sexes. Il est clair sauf pour les idiots que le but des « pastèques » n’est pas la défense de la nature mais l’abaissement du pays. Donc, si nous devons obéir à un principe de précaution, c’est celui qui nous recommanderait la circonspection sur les propositions des imposteurs, et des prétendus écologistes en particulier.

La nouvelle qu’un ministre habitué des dérapages contrôlés caresse l’idée d’une exploitation publique et écologique du gaz de schiste fait d’une pierre deux coups : d’une part, elle brise un tabou et libère une réflexion emprisonnée dans sa gangue de préjugés ; d’autre part, elle ne pollue pas le discours présidentiel, puisqu’elle rappelle avec une ostentation, dont on devine la totale mauvaise foi chez un ambitieux manipulateur, que l’exploitation serait publique, c’est-à-dire purifiée par l’intervention salvatrice de l’État, plus thaumaturge que jamais, qui assurerait la virginité de la nappe phréatique. Malgré tout, si Montebourg a aussitôt mis de l’eau dans son Bourgogne, il a aussi mis de l’eau dans le gaz, risqué un schisme de la majorité : comme d’habitude, les ministres « pastèques » se sont arrimés à leur siège tandis que les autres lançaient une bordée à blanc sur le nuisible… si utile à la multiplicité des fers au feu présidentiel. Quel bonheur pour Hollande de retrouver la seule chose qu’il sache faire depuis l’Eden de Solférino : jouer avec les courants du PS et de ses alliés. Ah ! Ce parfum de boutique d’apothicaire : une pincée d’aubrystes, une cuillerée de fabiusiens et une bonne dose de montebourgeois qu’on ne peut ignorer après leur score aus primaires du PS.

“La France va-t-elle se contenter de brouter son herbe verte en regardant passer le train. Elle ne le peut pas !”

La fracture la plus douloureuse est celle qu’a subie Delphine Batho. Plutôt bonne élève, appliquée et plus besogneuse que brillante, elle n’avait guère fait parler d’elle, si ce n’est dans l’entourage présidentiel et ses ramifications qu’elle agaçait, paraît-il. Il a suffi qu’elle dise « mauvais budget » pour que la jurisprudence « Chevénement » soit appliquée : elle n’a pas fermé sa gueule, on la démissionne. Cet acte d’autorité s’est exercé non en raison de l’importance du dérapage, mais en fonction de la faiblesse de la ci-devant ministre. Pas élégant ni courageux mais suffisant pour fracturer les illusions de la militante et faire jaillir dans son esprit la lumière de la vérité toute nue : le pouvoir appartient à une caste économico-politico-médiatique. Si vous en êtes, vous comptez. Sinon, vous n’êtes que le sac de sable qu’on jette pour reprendre de l’altitude. Inviter le Président à sortir de l’ambiguïté sur le gaz de schiste est naïf. En bon disciple du Cardinal de Retz, Hollande la cultive et sait qu’on n’en sort qu’à ses dépens. Que Retz, contrairement à Richelieu n’ait rien fait de bon pour la France est une autre histoire.

Il fut un temps où la France osait, un temps où elle ne s’enterrait pas dans la médiocrité, le jour où elle a choisi le nucléaire , par exemple. Il faut être lucide. Les États-Unis sont aujourd’hui en train de réaliser un rétablissement de leur économie, en partie en raison de l’exploitation du gaz de schiste : 700 000 emplois directs ont été créés ; une diminution par trois du coût de l’énergie qui augmente la compétitivité des industries gazo et électro-intensives, notamment dans la chimie, va faire gagner aux entreprises américaines des parts de marché, leur permettre de relocaliser et donc de créer des emplois ; l’année dernière, le pétrole de schiste représentait 29%  de l’or noir américain, et le gaz de schiste, 40%  du gaz, ouvrant la perspective d’un pays à nouveau exportateur en 2030 ; économiquement et politiquement, l’Opep et les pays arabes, Gazprom et la Russie vont avoir moins de poids ; enfin, de nombreux petits propriétaires américains ont sous leurs pieds une source de richesses inattendues et importantes. La France va-t-elle se contenter de brouter son herbe verte en regardant passer le train. Elle ne le peut pas ! D’abord, en raison de sa situation économique et sociale, et ensuite parce qu’elle est dotée d’un potentiel considérable : le deuxième après la Pologne pour le gaz avec 3,9 milliards de m3 et le premier en Europe pour le pétrole avec 4,7 milliards de barils. En 2011, Christian Jacob avait fait voter un texte interdisant l’extraction par fracturation hydraulique afin de tarir l’angoisse de ses chers électeurs de Seine et Marne. A l’initiative d’une société qui avait alors perdu son permis d’exploitation, une QPC a été transmise par le Conseil d’État au Conseil Constitutionnel. Si sa décision est positive et donne raison au plaignant, alors la France pourra remettre les gaz : ceux du courage et du développement et elle pourra retrouver l’esprit qui a, parfois, été le sien, celui d’un pays de liberté, où la propriété et la libre entreprise constituent davantage l’État de droit que la peur liberticide qui se réfugie en permanence sous le bras protecteur et écrasant de l’État. Que celui-ci assure un contrôle, que l’on évite la multiplication des forages aux méthodes incertaines qui ont révélé leurs risques aux États-Unis, mais qu’on ne renonce pas aux armes que nous possédons dans la guerre économique actuelle.

Lire aussi :
> Réindustrialisation : États-Unis VS France, merci le gaz de schiste !
> Gaz de schiste : « La France est bénie des dieux »
> Nicolas Doze : « Le principe de précaution est un obstacle au progrès technique »

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81 Comments

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  • tintin , 15 juillet 2013 @ 17 h 21 min

    @Ronfleur :

    On s’en fou de Buffett, je cite Buffett parce que vous êtes des veaux et que vous avez besoin d’arguments d’autorité, puisque vous êtes incapable de considérer un élément pour ce qu’il est.

    Alors je cite Buffett pour démontrer la viabilité du solaire, comme d’autres citeraient Bill Gates pour démontrer à des papous en papouasie que les ordinateurs existent et qu’ils fonctionnent, face à des papous qui ont besoin d’un argument d’autorité pour le croire, puisqu’ils sont incapable de comprendre le fonctionnement d’un semi-conducteur…

    Je vais presque y passer ma journée dans ces commentaires et cela ne sert à rien…

    Vous restez tous sur vos certitudes ethnocentriques, vos esprits formatés par la destruction totale des écoles, incapables de créer les conditions d’une libre pensée.

    Le solaire cela fonctionne, il n’y a pas plus rentable et dans le fond, on ne vous demande rien, rien que la privatisation de l’énergie.

    Vous ne croyez pas au solaire ?

    Pas de problème, c’est VOTRE problème.

    Alors fermez vos putains de centrales nucléaires, privatisez l’énergie et laissez le libre marché non nucléaire, offrir ses solutions…

    Si pour votre électricité vous voulez vous alimenter à la bougie, au pétrole, au charbon, à ce que vous voulez sauf au nucléaire, c’est votre problème.

    Moi je veux du solaire, j’investis dans le solaire et je compte bien participer d’un mouvement citoyen pour que les criminels et les génocidaires assument leurs responsabilités, jusqu’à ce que les centrales nucléaires soient fermées.

  • Caroline , 16 juillet 2013 @ 18 h 39 min

    On peut aussi développer d’autres énergies renouvelables, car il n’est pas bon pour le maintient d’écosystèmes fragiles (dont vous vous moquez éperdument) de couvrir tous les déserts du monde de panneau solaire. Biogaz pour l’agriculture, éolien, géothermie, énergie marémotrice etc.

  • Caroline , 16 juillet 2013 @ 18 h 42 min

    Choquée par cet article qui montre si peu de respect envers le principe de précaution! Et je vois que je ne suis pas la seule!

    Comment peut-on proposer de sinistrer écologiquement et humainement des régions entières? Car l’exploitation du gaz de schiste à l’étranger, ça donne ça.

  • Anne Lys , 16 juillet 2013 @ 19 h 44 min

    Caroline est persuadée que l’exploitation du gaz de schiste à l’étranger a sinistré “écologiquement et humainement des régions entières?”. Mais d’où le tient-elle (à part de sites qui l’affirment, mais n’en donnent pas les preuves) ? Qu’elle fasse confiance à ces sources, cela peut se comprendre, mais n’a-t-elle jamais entendu un autre son de cloche ? J’ai des amis et correspondants aux E.U., ils ne signalent rien de tel, mais se réjouissent de la reprise économique amenée par l’exploitation de ces ressources, qui permet à beaucoup qui étaient au chômage de retrouver un emploi, un logement, une certaine confiance dans l’avenir.

    Bien sûr, il se peut que, dans leur satisfaction de sortir de l’ornière, ils ferment les yeux sur des conséquences écologiques néfastes. Mais, tout de même, il est curieux qu’à l’exception de site ouvertement “écolos”,on ne trouve pas de mentions (et encore moins de preuves) de ces catastrophes.

    Seuls ces sites, hostiles à toute utilisation de combustibles fossiles et persuadés (à tort à mon avis) qu’on arrivera à remplacer le nucléaire et les combustibles fossiles avec des éoliennes (qui sont très polluantes à produire et plus encore à démanteler en fin de vie et dont le rendement est très faible) et des panneaux solaires qui bénéficieraient de gigantesques progrès technologiques qui ne sont encore qu’en perspective, voire en rêve et dont l’utilisation à l’échelle du globe n’est concevable, comme “Tintin” le laisse très clairement entendre, qu’à condition de sacrifier l’équilibre écologique de régions entières (qu’il qualifie avec mépris de “déserts”, comme si le “désert” absolu existait… et comme si leur stérilisation pouvait rester sans conséquence pour le reste du monde) et d’accepter que la population du globe soit éliminée en grande partie…afin que la population résiduelle puisse vivre dans un monde alimenté en énergies renouvelables… font état de ces catastrophes.

    La seule qui soit prouvée – et qui n’a rien à voir avec les gaz de schiste – est le gigantesque incendie souterrain qui ravage le sous-sol d’une partie de la Chine, où des mines de charbon ne cessent de brûler depuis des décennies. J’ignore qui en est responsable, mais dans un pays où l’on a envoyé travailler aux champs toutes les personnes compétentes, quel que soit leur domaine, il ne faut peut-être pas s’étonner que se soit produite une telle catastrophe, alors qu’elle reste peu probable dans des pays aux ressources intellectuelles intactes.

  • Ronfleur , 16 juillet 2013 @ 22 h 36 min

    Il n’y a qu’en France qu’il y a tel déferlement de bêtises. Je travaille dans ce domaine pour une organisation internationale qui ne fait pas de profit. Je gère ce dossier et suis effaré de voir les bêtises qui sont comportées. La France va rester avec ses illusions de haute technologie sans même voir que le TGV est concurrencé partout à présent. Après il reste le vin, et le fromage. Et l’opposition à toute innovation grâce a la conviction que gagner de l’argent avec l’innovation est mauvais. Restons sans gaz de roche-mère. Le reste du monde s’envole. Nous on reste avec nous certitudes de donneurs de leçons. Merci Tintinde de sauver la planète…tout seul. tandis que le reste du monde est si stupide qu’il ne suit pas votre sagesse populaire.

  • Anne Lys , 17 juillet 2013 @ 2 h 12 min

    L’argument d’autorité, selon lequel l’Académie des sciences de New York aurait publié un rapport indiquant que 985.000 personnes seraient mortes à cause de Tchernobyl, ce qui laisse supposer que les scientifiques incontestables formant cette docte assemblée auraient déterminé ce chiffre, a du plomb dans l’aile.

    En effet, ce rapport, non imprimé mais mis sur internet sur le site de l’Académie, n’est pas l’œuvre de celle-ci, ni de certains de ses membres, mais bien la traduction en anglais d’une compilation à partir d’articles parus dans la presse russe, biélorusse et ukrainienne, établie par plusieurs contributeurs russes, ukrainiens, biélorusses…

    Or, après lecture et examen de ce texte par des scientifiques américains reconnus, dont des spécialistes des effets des radiations, ceux-ci ont commencé à se poser des questions sur les raisons qui avaient pu pousser l’Académie à patronner ce rapport, selon eux truffé d’erreurs et d’omissiolns, les auteurs ayant carrément refusé de respecter les méthodes de la recherche scientifique (« errors, omissions and outright denials of the scientific method.[1] ») Un membre de l’Académie a enquêté pour savoir comment cette publication avait pu recevoir l’aval de celle-ci.

    Cette décision n’a pas été prise par la personne actuellement qualifiée pour la prendre, laquelle n’avait pas encore pris ses fonctions et ne peut donc en être tenue pour responsable.

    L’Académie a donc publié un communiqué selon lequel, d’une part il ne s’agit pas d’un œuvre originale et inédite, mais d’une compilation d’articles déjà publiés, et que d’autre part non seulement il ne s’agit pas d’une recherche émanant de l’Académie, mais que celle-ci ne l’a pas commandé aux auteurs (« does not present new, unpublished work, nor is it a work commissioned by the New York Academy of Sciences. »). En fait, cette étude, publiée en 2007, avait été entreprise à l’initiative de … Greenpeace, ce qui est d’ailleurs indiqué dans la préface.

    Le prestige de l’Académie de N.Y. ne peut donc plus être invoqué pour valider les conclusions de cette étude, qui, contrairement à ce que l’on a pu lire ici et là, n’a jamais fait l’objet, avant publication, de l’examen par un comité de lecture.

    En revanche, avec the World Health Organization et l’International Atomic Energy Agency (l’IAEA, bien connue pour son action en vue de contrôler les États qui sont tentés de se doter d’un armement atomique) diverses agences (FAO, OCHA, UNDP, UNEP, UNSCEAR), ont mené une étude exhaustive sur les effets de la catastrophe de Tchernobyl sur les populations avoisinantes. Ils n’ont constaté que trente décès immédiats parmi les 626.000 personnes qui ont reçu des doses de radiation supérieures à l’irradiation naturelle (on se demande d’ailleurs comment le nombre de morts pourrait être supérieur à celui des personnes qui ont été peu ou prou irradiées) et estiment que le nombre de morts prématurées qui pourraient être intervenues ou interviendront en raison de cette irradiation pourrait atteindre jusqu’à 4.000.

    [1] Parmi les erreurs signalées, le fait que les auteurs ont attribué aux radiations toutes les maladies et symptômes défavorables constatés en Ukraine, Biélorussie et autres pays affectés, même s’il n’est aucunement attesté que ces maladies et symptômes peuvent être provoquées par une irradiation excessive. La plus grande partie de ces maladies et symptômes n’ont aucune corrélation avec l’irradiation. Les auteurs en étaient d’ailleurs parfaitement conscients mais, selon eux, la situation de Tchernobyl exigeait qu’on les considère comme conséquences de la catastrophe.

  • Tintin , 17 juillet 2013 @ 18 h 43 min

    Caroline :

    Exactement, il existe de nombreuses autres solutions qui peuvent répondre à de multiples besoins dans de multiples situations dissemblables.

    Mais c’est au libre marché, après interdiction du nucléaire et privatisation totale de l’énergie, de décider quelles solutions doivent être développées.

    Je crois pour avoir étudié tout le secteur, qu’il n’y a pas plus rentable que le solaire thermique, mais chacun doit être libre de développer et de vendre ses propres alternatives…

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