François Hollande à contre-sens

Tribune libre de Christian Vanneste*

Des opinions favorables autour de 30% pour François Hollande : le record d’impopularité présidentielle n’est plus éloigné. Les électeurs qui n’avaient pas voté pour lui sont confortés. Ceux qui l’ont soutenu au second tour l’ont déjà quitté et le désarroi atteint maintenant le noyau dur. Le Président entame donc une reconquête des Français par la proximité, et sa première visite à Dijon n’a pas été un franc succès (voir ici et ). Cette évolution défavorable pour le pouvoir en place traduit trois erreurs qui se situent à des niveaux différents.

À court terme, il y a un redoutable flottement politique qui éveille le sentiment chez une majorité de Français que les dirigeants n’ont pas les bonnes solutions, qu’ils n’ont pas le niveau requis pour affronter les problèmes, et, plus grave qu’ils ne savent pas où ils vont. Le décalage entre les promesses et les actes, les changements de caps, sur la TVA, par exemple, la multiplication des annonces à la suite de multiples rapports et avis, la pluie de mauvaises nouvelles et de chiffres calamiteux ont très rapidement détruit la confiance dont bénéficie tout pouvoir nouvellement élu. L’arrogance et le sectarisme de certains ministres n’arrangent pas les choses. L’intervention au Mali alors que l’on annonce une baisse drastique des dépenses militaires n’est pas de nature à modifier une opinion publique dont la priorité est l’emploi.

“Les Français ont élu un candidat qui a menti effrontément durant la campagne sur l’état du pays et sur sa capacité d’améliorer la situation.”

Au-delà, se dévoile un scepticisme grandissant pour la qualité morale de nos dirigeants. Ce doute dépasse les limites de la gauche au pouvoir et explique que l’effondrement de celle-ci ne s’accompagne pas d’une forte nostalgie sarkozyste ni d’une attente enthousiaste à l’égard de ses rivaux. Les Français ont failli avoir pour Président un homme dont la prétendue compétence économique n’occupait pas l’essentiel de son temps. Ils ont élu un candidat qui a menti effrontément durant la campagne sur l’état du pays et sur sa capacité d’améliorer la situation. Il lui a été facile de mettre en œuvre quelques mesures coûteuses et démagogiques, sur les retraites, par exemple, de détricoter la politique précédente, sur les heures supplémentaires, entre autres, mais rapidement la revendication de justice, l’exigence d’égalité, la punition des riches ont laissé la place à des soucis plus concrets comme la diminution des déficits et l’accroissement de la compétitivité. L’augmentation de la pression fiscale pour les classes moyennes, l’annonce d’un plan en faveur de la compétitivité des entreprises, d’ailleurs trop compliqué et mal ciblé, l’adhésion à la flexisécurité ont accentué l’inquiétude. Si les milieux économiques ne sont pas convaincus, l’extrême-gauche devient carrément hostile et prête à justifier la violence. Cela dit, les Français ont du mal à se souvenir d’un Président qui aurait tenu ses engagements de campagne et qui aurait eu le courage de leur offrir un discours à la Churchill. Je ne me suis jamais remis personnellement de la stupide ouverture à gauche de Sarkozy.

Mais cette faute majeure révèle une troisième erreur qui correspond à la dérive de nos institutions. Est-ce dans la nature des choses ou seulement dans l’inconscient collectif de nombreux peuples ? Le pouvoir est souvent partagé entre celui qui incarne le long terme, la continuité, le recours, et celui qui est en charge du quotidien, entre le Père, qui peut être une reine et la mère qui est souvent un premier ministre. Parfois le chef de l’État se limite à n’être qu’un symbole. Parfois, il joue un rôle dans l’orientation des choix du gouvernement. C’est à l’évidence cette direction que le Général De Gaulle avait donnée à la Ve République, même si la Constitution privilégiait les rôles d’arbitre, de gardien de la continuité des institutions et de responsable du pays à l’international. Néanmoins, les sept ans renouvelables du Président désormais élu par le peuple lui assuraient une légitimité sur le long terme supérieure à celle du chef d’un gouvernement soutenu par une majorité parlementaire de cinq ans et soumise à la dissolution. Le passage au quinquennat a complètement rompu l’équilibre. Lorsque les Français élisent leur Président, ils choisissent celui qui va déterminer et conduire la politique de la nation, ce qui est constitutionnellement la fonction du Premier ministre, lequel ne sert plus à grand chose, sinon à être le fusible qu’on fait sauter lorsque l’impopularité est trop grande. Le Président s’use donc très vite, même s’il a une réserve d’énergie importante. C’était le cas du prédécesseur de François Hollande. Ce n’est pas le sien. Or le quinquennat et l’omniprésence de Nicolas Sarkozy ont réduit le rôle du Premier ministre à une simple figuration, ce qui convenait parfaitement à Fillon. Cette dérive conduit donc le Président à tenter de compenser lui-même les déficits de popularité avec plus de présence et plus de proximité. On atteint là le contre-sens institutionnel absolu. C’est le Premier ministre qui est responsable de la politique conduite et qui l’est devant le Parlement. Le Président, même s’il doit dresser une perspective à long terme, ce qui n’est pas du tout le cas actuellement, doit sauvegarder une autorité supérieure aux aléas de la conjoncture. Il doit s’inspirer d’une formule du Général De Gaule : « L’autorité ne va pas sans prestige, ni le prestige sans éloignement. »

*Christian Vanneste est un ancien député UMP du Nord.

Related Articles

25 Comments

Avarage Rating:
  • 0 / 10
  • Pat64 , 13 mars 2013 @ 17 h 18 min

    Il est à remarquer que l’esprit de la Veme voulu par le Général n’est plus respecté : le Président est élu au suffrage universel et représente l’ensemble des français. Vous avez raison de dire que le quinquennat change la donne, et surtout ce qui dénature la fonction présidentielle , ce sont les “primaires” des partis politiques, qui impliquent que l’heureux élu doit son élection au Parti, dont il devient le prisonnier. On en a un exemple type avec l’élection de Hollande, lequel n’est le président que des socialistes, puisqu’il ne fait qu’une politique socialiste contre vents et marées ! D’autant que les socialistes détiennent tous les pouvoirs : législatif, exécutif, les régions, la plupart des médias..etc…
    En fait, c’est la perversion du système , nous sommes loin de ce que voulait le Général…quoi que….il a bien dit : ” après moi, la chienlit …..” Non ?

  • rossetti , 13 mars 2013 @ 17 h 59 min

    curieuse préoccupation à propos du fromage de la Hollande, pâte molle et insipide….comment a-t-on pu élire ça ????

  • Tarantik , 13 mars 2013 @ 18 h 53 min

    Il est EVIDEMMENT sous-dimensionné pour la fonction.

    Tous les éléphants du PS en avaient cent fois averti les électeurs :
    “Fraise des bois”, “Mhollande”, “François n’a jamais rien fait” etc…
    Mais il n’y a pas pires sourds que les idéologues.

    Effet multiplicateur la (les) crise(s) :
    Il fallait un géant à la barre, ils nous ont mis un gnome
    Que les électeurs socialistes (ou les niais) payent le prix de leur sottise
    ma foi tant pis… il faut payer pour voir comme on dit au poker.
    Malheureusement ces inconséquents nous entraînent dans leur chute
    et nous payons pour eux !

  • Tarantik , 13 mars 2013 @ 18 h 56 min

    Pat 64
    La chienlit ?
    Tiens c’est vrai… il était donc prophète le Général ?
    Avec le retournement des moeurs il nous faudrait maintenant parler de chiennerie ?

  • Frédérique , 13 mars 2013 @ 23 h 03 min

    Seule l assemblée nationale aurait dû être élue par le peuple, de Gaulle a voulu accroître sa propre légitimité devant les assemblées en faisant élire le président de la république au suffrage électoral. C était une grave erreur et pour l avoir faite, soit il surestimait l honnêteté des politiciens qui viendraient à lui succéder, soit il savait ce qu il disait lorsqu il claironna ” après moi, la chienlit”.

  • Sylvie , 14 mars 2013 @ 9 h 06 min

    Hollande ne tiendra pas longtemps les rênes du pouvoir. Avec la montée de la contestation dans le pays à cause du chômage, des délocalisations (usines qui ferment et qui déménagent), de l’insécurité et de la remise en cause des valeurs fondamentales du mariage traditionnel (instauration du mariage gay contre l’avis majoritaire de la population), le président de la République n’a plus le soutien du pays légal et réel. Déjà, le peuple de France exprime son mécontentement et lui réclame des actes. Hollande a trahi son électorat et se déconsidère de plus en plus à tel point que plus personne ne lui fera confiance.
    Les ouvriers (électorat de gauche) qui lui avaient demandé de lutter efficacement contre les puissances de l’argent ont découvert qu’Hollande faisait une politique antisociale en cherchant à détruire le socle de la famille. La majeure partie des ouvriers vient de basculer dans la manif pour tous et la semaine prochaine, si tout va bien, nous aurons à nos côtés, les ouvriers de Goodyear, de Pétroplus, des usines automobiles, des entreprises textiles, des sociétés informatiques, des entreprises agro-alimentaires et d’autres encore concernés par la crise sociale.
    Ils vont manifester très massivement à nos côtés, car sachez-le, les ouvriers sont attachés à la famille et n’aiment pas l’imposition du mariage pour tous qui va destructurer l’organisation sociale de la famille.
    Hollande ne tiendra pas longtemps la corde et va partir. Le gouvernement va sauter lui aussi dans la même foulée au lendemain des manifestations du 24 mars.
    Toutes les catégories sociales du peuple français sera dans la rue le 24 mars. Non seulement, le peuple mais la société civile, les gens appartenant à toutes les classes du pays : ouvriers, paysans, cadres, chefs d’entreprise, fonctionnaires d’Etat et des collectivités locales, professions libérales, etc… Le pays réel se manifestera et exprimera son hostilité à la dénaturation du mariage, à la légalisation de la pédophilie et à l’enlèvement des enfants à leurs parents légitimes.
    Le 24 mars, le peuple français fera sa révolution pacifique et chassera nos gouvernants irresponsables.

  • Jacques , 14 mars 2013 @ 12 h 04 min

    Il faut au pays un président bien au fait des préoccupations du peuple. S occuper du mariage gay dans ces conditions révèle une inadaptation à la fonction.
    En fait Hollande est le président du peuple de gauche ( du moins il le croit) mais pas le président des français. Une partie de lui est encore premier secrétaire du PS, cette fonction si confortable où on passait son temps à critiquer Sarkozy et où on ne prenait aucune responsabilité, fonction qu il n aurait jamais du quitter. Le principe de Peter s applique à plein en ce qui le concerne.

Comments are closed.