Hollande aura été l’Attila du Parti Socialiste, un fléau qui après son passage ne laisse pas l’herbe socialiste repousser. Les commentaires et les sondages, les commentaires sur les sondages, les sondages sur les commentaires semblent dessiner un étrange paysage. Alors que dans les démocraties occidentales, les peuples, fatigués d’un personnel politique surabondant autant qu’inefficace, veulent déborder le système par la droite musclée ou par la gauche extrême, avec une vague que l’oligarchie désigne en se bouchant le nez du nom de populisme, la France se laisserait tenter par l’oxymore de l’extrême-centre. Lancé comme un produit, un personnage que tout désigne comme un représentant typique du système, un énarque passé des sciences politiques à la Banque et de la Banque à l’entourage présidentiel puis à un ministère, mais en évitant soigneusement l’élection, serait la révolution en marche. Pour une fois, le mot révolution ne mentirait pas puisque le mouvement ferait un tour complet en revenant à la même situation après avoir prétendu renverser les choses le temps d’une campagne. « Marchons, marchons » chantent les choeurs de l’opéra en faisant un surplace sur la scène étroite. Ce qui compte n’est pas l’objectif, mais le mouvement. On ne sait pas où on va, mais on va de l’avant. Cela s’appelle le progressisme : un grand coup de flou sur les menus de la restauration politique. Désormais, ce sera à la carte : l’atomisation individualiste de la mondialisation heureuse. Du Minc, de l’Attali, mais avec une pincée de Puy du Fou et de Jeanne à Orléans pour le décor et les touristes.
Si les médias se plaisent de plus en plus à rêver d’un duel Macron-Le Pen au second tour avec leur chouchou à l’Elysée à coup sûr par voie de conséquence, deux obstacles se dressent sur la route, qu’il leur faut écarter. D’abord, il s’agit du candidat désigné par la primaire de la droite et du centre dont on souligne qu’il semble en panne et recule dans l’opinion. Un Thatcher catho ! Vous n’y pensez pas ! Le redressement économique par les mesures adoptées par les concurrents depuis des années et la sauvegarde des valeurs « sociétales » indispensables à la survie d’un pays, c’est dépassé, ringard, brutal, impensable. Ceux qui ont enseigné les pires erreurs à nos gouvernants depuis des décennies continuent à vouloir que notre pays poursuive sa chute sans fin. Le monopole de l’information leur assure l’impunité. Comme disait Einstein, « la folie, c’est de se comporter de la même manière et d’attendre un résultat différent ». Le second obstacle serait constitué par une réussite de la primaire de gauche et la désignation au terme de celle-ci d’un candidat qui aurait le soutien de ce qui reste de l’appareil, c’est-à-dire les permanents qui en vivent, les élus accrochés à leur mandat et ses avantages. Alors, il est bon de décrier la compétition, d’annoncer sa débâcle et pourquoi pas le ralliement désespéré au fils spirituel, quelque peu Brutus, de François Hollande de tous ceux qui veulent survivre, avec ou sans leurs idées.
Il est vrai que la collection des candidats sent un peu le rance, ressemble à la revue de l’année dernière. Si on s’en tient aux protagonistes, on a Hamon, la gauche entêtée qui n’a rien appris, ni rien oublié, qui veut une couche de plus de dépense publique afin de finir de séparer le travail du revenu, histoire sans doute de redynamiser la compétitivité française. Pour parfaire la caricature de soi, il ajoute bien sûr quelques taxes punitives, la légalisation du cannabis pour guérir sans doute les gens du tabac, le vote des étrangers et le visa d’entrée facilité afin de pacifier l’opinion publique. Montebourg est plus subtil. Il joue le rôle qu’il s’est attribué sur le créneau qu’il a choisi. Montebourg, c’est l’homme des frontières, de la préférence nationale… pour les entreprises, des nationalisations. La dette et les déficits ne sont que des outils. Le risque d’une remontée des taux n’existe pas. Il faut produire français avec volontarisme en oubliant quelque peu que le marché de nos entreprises ne se limite pas à la France et a surtout besoin d’une réduction de nos coûts, et donc d’une baisse de la fiscalité et des charges plutôt que des menaces sur la tête des chefs d’entreprise. Peillon trace un vieux sillon de gauche, bien démagogique, celui qui consiste à transférer un peu plus, comme si la France n’avait pas atteint les limites au-delà desquelles le travail et l’épargne sont découragés, la transmission bloquée. Ce n’est pas en faisant fuir les riches ou leurs enfants qu’on enrichit les pauvres. On appauvrit simplement le pays. Le bouclier fiscal avait un sens pour dissuader les évasions et favoriser le ruissellement de l’argent. Si on retourne le principe, certes on limite la fiscalité des moins fortunés, mais on augmente nécessairement celle des autres.
Reste Manuel Valls qui subit la malédiction des Premiers Ministres qui veulent faire comme Président autre chose que ce qu’ils ont fait à Matignon. Sa contrition sur le 49/3 était stupide et maladroite. Contrairement à ce que dit Ségolène Royal, qui a fait l’ENA, paraît-il, le 49/3 est justement destiné à contourner les réticences d’une majorité rétive. Il faut conserver ce dispositif qui fait partie des moyens d’action d’un système qui favorise l’Exécutif. C’est l’essence de la Ve République. Plus logiquement, l’ancien Ministre de l’Intérieur veut davantage de prison. Revoilà le Sarkozy de gauche qui va jusqu’à souhaiter le retour à la défiscalisation des heures supplémentaires. Valls ne compte pas trop sur ses propositions pour l’emporter. Face aux frondeurs et aux écolos, il va s’appuyer sur le légitimisme partisan. Sarkozy y a échoué, mais le droite conservatrice n’avait pas contrairement à la gauche les deux tentations, libérale, d’une part avec Macron, gauchiste, avec Mélenchon, d’autre part, pour réduire le nombre de ses électeurs.
Puissent les Français tourner la page des gauches. Le déclin et la décadence de notre pays y sont écrits. Le vrai choix se situe à droite, et c’est bien ce que craint le microcosme politico-médiatique qui nous dirige.