Thomas Thévenoud défraie la chronique depuis quelques jours suite aux irrégularités constatées sur le paiement de ses impôts, de ses loyers, de ses séances de kiné, de ses PV, etc. Le fantôme de Cahuzac refaisant surface, la majorité s’est immédiatement scandalisée, demandant la tête du Secrétaire d’État. Le pauvre homme n’est ainsi resté au gouvernement que 9 petits jours voyant d’un coup s’effondrer tous ses plans de carrière.
Car Thomas Thévenoud est l’archétype même du politicien parasite et incompétent, vivant exclusivement de la politique – avec tous les privilèges et passes droit qu’elle procure dans notre démocratie carton-pâte – et minant durablement le pays par ses décisions clientélistes et stupides.
Thomas Thévenoud n’est pas très vieux. Mais à 40 ans, il a déjà appris à bien sucer le système. Evidemment, il est issu du sérail avec son diplôme de l’IEP de Paris. Mais il n’est pas passé par l’ENA (faute d’avoir le niveau ?). Qu’importe, membre du PS, il rejoint en 2000 le cabinet de Laurent Fabius, alors ministre de l’Économie et des Finances. Très vite, les premiers mandats arrivent. En 2001, il est élu premier adjoint au maire de la commune de Montceau-les-Mines. Il devient à la même époque le vice-président du Conseil-général de Saône-et-Loire présidé par Arnaud Montebourg. Il en devient le chargé à l’habitat et à l’aménagement du territoire en 2008. C’est à cette période qu’il prend également la tête de l’OPAC 71, établissement public (bien entendu !) réalisant et gérant des immeubles d’habitation pour le compte de l’État ou des collectivités territoriales. Nulle trace de phobie administrative à ce niveau !
Il reste à ce poste jusqu’en 2012, date à laquelle sa carrière prend enfin une tournure nationale. Il est ainsi élu en juin député de la 1ère circonscription de Saône-et-Loire. Fait appréciable, il prend la décision de mettre en pratique le non-cumul en se consacrant uniquement à son mandat national. Probablement une raison clef pour expliquer sa détermination à conserver aujourd’hui son siège au Palais Bourbon avec sa rémunération mensuelle de 5 149 euros net, son indemnité représentative de frais de mandat (IRFM) de 5 770 euros bruts par mois, son crédit de 9 504 euros bruts par mois (destiné à rémunérer ses collaborateurs), son accès gratuit à l’ensemble du réseau SNCF en 1ère classe, ses 80 voyages gratuits en avion entre Paris et sa circonscription ainsi que son remboursement de forfaits pour cinq lignes téléphoniques et pour un abonnement internet. Evidemment, Thomas n’a sûrement pas oublié le régime de retraites très avantageux dont il bénéficie comparativement au Français de base. Il sait qu’un député n’effectuant qu’un seul mandat dispose de 1 200 euros de retraite au minimum, soit à peu près le montant moyen des pensions versées en France après plusieurs dizaines d’années de cotisation. Il sait aussi qu’en moyenne, la retraite d’un parlementaire s’élève à 2 700 euros nets.
“Si j’ai écrit ces quelques lignes, c’est aussi pour lui redonner de l’espoir. Thomas, le rebond, c’est possible ! Regarde Fabius, Dray, Désir, Juppé, Balkany ou Bédier…”
Alors qu’il siège à l’Assemblée depuis quelques mois, il est élu en mars 2013 vice-président du groupe socialiste. Comme le cynisme est une vertu très en vogue dans le milieu politique, il se fait nommé dans la foulée vice-président de la mission d’information sur la fraude fiscale et devient membre de la commission d’enquête sur l’affaire Cahuzac ! Oui, encore un qui voulait faire la morale alors qu’il ne payait pas ses impôts ! Mais rappelez-vous la réponse de nos politiques aux types d’individus comme moi qui font de l’antiparlementarisme primaire : médias et citoyens se focalisent sur les quelques politiques véreux et oublient tous les vertueux, ces petits élus locaux qui font bien leur travail, dévoués et humbles. Mensonge ! La corruption, même à petite échelle, est partout et les collectivités locales fourmillent d’élus, solidement accrochés à leur fauteuil, qui pratiquent le favoritisme et les passes droit en faveur de leurs proches ou pour eux-mêmes. Il n’y a qu’à jeter un œil sur le marché des permis de construire pour s’en convaincre…
Thomas Thévenoud n’est pas très vieux. Mais à 40 ans, il a aussi démontré tout son art pour des projets vaseux, voire nocifs. Evidemment, comme tout politique français, il est drogué aux taxes et impôts. Il est ainsi l’auteur en octobre 2012 d’un rapport critique sur la baisse de la TVA dans la restauration, mesure effectivement stupide – reconnaissons-le – mais qui ne fait que tenter de corriger les niveaux structurellement élevés d’imposition et de charge dans le pays. Et plutôt que de se demander pourquoi les restaurateurs avaient réclamé un tel régime, il réclame son abrogation. En décembre 2013, il défend un amendement, repoussé, instituant une taxe sur l’industrie du tabac pour contrer les pratiques d’optimisation fiscale du secteur. Dans le même temps, il reste évidemment très prompt – comme tous ses congénères – à dénoncer la gangrène du chômage dans notre pays, incapable de faire le lien entre le niveau excessif de la fiscalité et la désertification industrielle du pays.
En février 2014, il est nommé par Jean-Marc Ayrault médiateur dans la crise opposant les chauffeurs de taxis aux sociétés de VTC. Le 25 avril, il rend son rapport au Premier ministre qui débouche sur un projet de loi actuellement en deuxième lecture à l’Assemblée. En substance, ce projet, extrêmement favorable aux taxis, renforce la rente de ces autres privilégiés de la république. A ceux qui opposeront que le métier de chauffeur de taxi est difficile, je ne cite qu’un seul chiffre. Entre 2008 et 2013, le prix de la licence est passé à Paris de 150 000 à 235 000 euros, soit une plus-value de presque 57 % en 5 ans ! Avec ce projet de loi, les VTC sont donc appelés à disparaître et le consommateur à payer sa course toujours plus cher pour un service médiocre tant cette population est mal aimable. On peut donc dire merci à Thomas qui a prouvé qu’il possédait deux sésames pour réussir en politique : la lâcheté (quelques blocages de taxi à Roissy auront réussi à faire plier la majorité) et la détestation de l’entreprise !
En 2014, fort de ces succès, tout s’accélère. Il est nommé le 26 août Secrétaire d’État chargé du Commerce extérieur, du Développement du tourisme et des Français de l’étranger. Un maroquin ministériel, enfin ! Le Saint Graal ! Mais le 4 septembre, il tombe de très haut notre pauvre Thomas, contraint de démissionner. Ses amis l’ont heureusement autorisé à nous prendre pour des cons – le statut usuel de l’électeur – en utilisant la formule classique : « pour des raisons personnelles ».
Aujourd’hui, Thomas doit être bien déprimé, au fond du gouffre. Et si j’ai écrit ces quelques lignes, c’est aussi pour lui redonner de l’espoir. Thomas, le rebond, c’est possible ! Regarde Fabius, Dray, Désir, Juppé, Balkany ou Bédier…
> Henri Dubreuil est diplômé en économie et en finances.
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