Bill O’Reilly, le présentateur-vedette de Fox News, lui tend la perche. Donald Trump aurait dû la saisir en ces termes : « Vous me donnez l’occasion de m’expliquer, les journalistes me mettent sous pression, je me suis mal exprimé, j’ai eu tort de faire un procès d’intention à ce juge d’origine latino ».
Trump se trouve, en effet, en fâcheuse posture. Plusieurs hommes politiques le lâchent et les journalistes de Fox prennent leurs distances. Car il a publiquement mis en cause l’impartialité d’un juge. Et refuse de se déjuger. Cumulant le tempérament tempétueux de Jean-Marie Le Pen, avec le culot de Silvio Berlusconi.
Il est normal qu’un candidat républicain critique le 4ème pouvoir. Mais pas simultanément le 3ème, le pouvoir judiciaire. Sauf à suivre la pente de Berlusconi. Avec en plus le soupçon de racisme anti-latino. Hillary Clinton ne fait aucune déclaration ce jour-là, laissant son adversaire se torpiller. Le lendemain, elle accuse le « tempérament » de son adversaire d’être incompatible avec la fonction de Commander in Chief. On reconnait là l’argumentaire anti-sarkozyste. Se parant d’un vernis psychanalytique, certains accusent les hommes de droite d’être des caractériels et la droite en général d’être sujette à des phobies.
L’affaire peut laisser des traces. Trump prétend mener un « fight for fairness ». Mais beaucoup de commentateurs lui reprochent un comportement trop personnel, peu soucieux d’intégrer les différentes composantes et sensibilités du parti républicain. Comme si, à l’instar du tribun français, il était réticent à mettre en avant d’autres que lui.
En France, non sans mauvaise foi, il est toujours « traité » de milliardaire. Pourtant, les quatre derniers présidents étaient tous millionnaires (Obama, Bush, Clinton, Bush Sr). Trump, qui signifie en anglais un atout au jeu de cartes, deviendrait le premier président sans aucune expérience d’un mandat électoral depuis Dwight D. Eisenhower, après la seconde guerre mondiale.
Comme ce dernier, il est honni par l’intelligentsia. Car il est le seul à briser les tabous : sur l’immigration incontrôlée, sur le libre échangisme dogmatique, sur l’immobilisme et le clientélisme de Washington. Il prend fait et cause pour la rénovation des infrastructures vétustes de son pays. Un programme cohérent, même s’il peut être taxé d’aventurisme.
En son temps, Eisenhower fit, notamment, construire un réseau autoroutier inter-Etats. Méprisé par les intellectuels, qualifié de « do-nothing », il fut accusé de ne pas comprendre les questions des journalistes, ou de fournir des réponses inintelligibles. Traité, en outre, de réactionnaire et de fasciste, il riposta en critiquant « certains reporters et les démocrates en général » peu soucieux de relever le « niveau spirituel et moral » de la nation.
L’Amérique d’aujourd’hui est minée par les sécessions, tourneboulée par la « guerre des toilettes », où Obama s’est aligné sur les revendications du lobby transsexuel. Un abus de pouvoir des cours de justice a ratifié le mariage gay et forclos le débat au détriment de la vox populi. Dans les universités, des étudiants invoquent la notion passe-partout de « trigger warnings » pour révoquer l’étude de certains écrits, censés risquer déclencher des souvenirs traumatiques chez les membres des minorités.
> Marc Crapez est un politologue. Sa page Facebook.
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