L’Institut Coppet organise un séminaire sur la démocratie à Paris le 28 juin, de 17 à 22h, avec Frank Karsten, co-auteur de Dépasser la démocratie (Entrée libre mais inscription obligatoire). Nouvelles de France, qui soutient ce rendez-vous, a rencontré son président, Damien Theillier.
« La démocratie, pourquoi ça ne marche pas ? », c’est osé comme intitulé !
En effet, un système de choix collectifs fondé sur des votes à la majorité des voix ne permettra jamais de dégager des solutions à long terme aux problèmes soulevés par la vie en société. Au contraire, il produira de plus en plus de dépenses publiques et de contrôles sur les individus. En effet, la démocratie est un système politique dans lequel les candidats achètent des voix au moyen de promesses de biens publics et de subventions. Ils cherchent à maximiser le nombre de leurs électeurs en adaptant l’offre de biens publics à la demande des groupes de pression. « Ce qui règne en démocratie n’est pas la volonté du peuple mais la volonté des hommes politiques, elle-même guidée par les groupes de lobbyistes professionnels, les groupes d’intérêts et les activistes. » (Dépasser la démocratie)
À l’origine bien sûr, le rôle des institutions démocratiques était de limiter et de contrôler l’État. Malheureusement, la démocratie est devenue un instrument de contrôle de la sphère privée. Les totalitarismes du XXe siècle étaient le résultat de l’emprise du pouvoir politique sur les individus et de la sphère publique sur la sphère privée. Or la démocratie du XXIe siècle s’inscrit dans la continuité de ce modèle. Pas de manière sanglante, ni de façon abrupte. Mais graduellement, petit à petit. C’est un totalitarisme « soft », d’autant plus insidieux qu’il est supportable et procure l’illusion de la sécurité.
“La majorité n’a rien à dire sur les principes fondamentaux régissant la société comme le gouvernement. Elle n’a pas le pouvoir de demander ou d’obtenir la violation des droits individuels.”
Démocratie et libéralisme sont carrément “incompatibles”, affirme Stéphane Geyres dans un entretien récent aux Nouvelles de France. Pourquoi entend-t-on si peu les libéraux sur ce sujet ?
Les penseurs libéraux du passé ont toujours reconnu la démocratie comme une forme — très subtile — de socialisme. Et ce qu’il reste de notre liberté est due à la tradition libérale, qui est toujours vivante en Occident, non à la démocratie. Celle-ci est souvent assimilée à la paix, à la prospérité, à la tolérance, à la solidarité et à la liberté, mais dans les faits elle apporte au contraire mécontentement, tensions sociales, hausse des impôts et de la dette, et de moins en moins de liberté économique et personnelle. Cela pourra apparaître comme une surprise pour beaucoup de lecteurs, mais les pères fondateurs des États-Unis — des hommes comme Benjamin Franklin, Thomas Jefferson et John Adams — étaient sans exception opposés à la démocratie. De même, le système politique que Benjamin Constant, Jean-Baptiste Say et Frédéric Bastiat appelaient de leurs vœux était une république constitutionnelle limitée, restreinte à la protection des droits individuels. Dans un tel système, la règle de la majorité s’applique uniquement à la sélection des représentants. Mais la majorité n’a rien à dire sur les principes fondamentaux régissant la société comme le gouvernement. Elle n’a pas le pouvoir de demander ou d’obtenir la violation des droits individuels.
Que proposez-vous pour remplacer la démocratie ?
Le chemin vers l’autonomie et l’autogouvernement ne passera pas par les larges démocraties. Il passera par la décentralisation et par de petites unités administratives, conçues par les gens eux-mêmes. De cette façon les citoyens se détourneront eux-mêmes bien vite des gouvernements autoritaires et mal gérés pour graviter vers ceux qui produisent les meilleurs services au plus bas coût. De même, chaque politicien et chaque haut fonctionnaire sera incité par la pression compétitive à rendre son gouvernement aussi efficace et utile que possible.
Ainsi la Suisse, par exemple, avec sa démocratie décentralisée, est une meilleure forme de gouvernement que la démocratie parlementaire française, car vous pouvez voter avec vos pieds et aller voir ailleurs au lieu de mettre un bulletin dans l’urne tous les cinq ans tout en restant esclave. En Suisse il y a concurrence entre les unités administratives, il y a un vrai marché de la gouvernance. Puisque les communautés et cantons suisses sont petits, les gens peuvent non seulement voter dans les urnes, mais ils ont également le choix de se déplacer s’ils sont mécontents du mode de gouvernement. Les mauvaises mesures politiques sont chassées par les bonnes.
“Le chemin vers l’autonomie et l’autogouvernement ne passera pas par les larges démocraties.”
Que répondre à l’objection de la sécurité ? Par exemple si un grand État devait se développer et voulait écraser les petites sociétés ?
Ces petites unités gouvernementales, chacune avec leurs propres caractéristiques, pourraient choisir de coopérer sur certaines questions si cela leur est utile, par exemple, sur l’énergie, l’immigration ou les transports. Elles pourraient également coopérer en matière de défense : échange d’informations policières, coalition militaires, traités de non-agression etc. Des sociétés économiquement performantes et innovantes seraient tout à fait susceptibles de trouver des moyens intelligents pour se défendre contre ce type d’agression.
L’éducation, la santé, la finance, l’assurance sociale, ne doivent-elles pas être coordonnées et réglementées au moins au niveau national ?
Damien Theillier est professeur de philosophie aux lycées Stanislas et Saint-Louis de Gonzague. Il est l’auteur de “Culture générale” (Editions Pearson, 2009) et d’un cours de philosophie en ligne (http://cours-de-philosophie.fr).On entend cela à propos de tout, c’est un véritable poncif : « L’immigration illégale ne peut être résolue que dans un contexte européen », ou : « La crise de la dette ne peut être combattue qu’au niveau international. » Ou encore : « Le terrorisme ne peut être combattu que par une agence centrale puissante »…
Première réponse : les gens croient souvent que si l’État ne fournit pas quelque chose (par exemple, des soins aux personnes âgées), ces services ne seront pas produits. C’est la mentalité des gens de l’ancienne Union soviétique, qui disaient : que ferions-nous si l’État ne prenait plus soin de nous ?
Ce n’est pas la grande taille d’un pays ni la centralisation qui apportent la prospérité et la stabilité. La Suisse, qui n’est ni membre de l’UE ni de l’OTAN, prouve le contraire. Elle montre que la décentralisation peut fonctionner correctement.
Seconde réponse : le monopole territorial de la production des services publics n’incite pas à produire le meilleur service public au plus bas prix. Sans compétition, les gouvernants deviennent vite irresponsables. Au contraire, quand les citoyens mécontents peuvent déménager vers une autre zone géographique, les dirigeants sont fortement incités à améliorer leurs politiques. Lorsqu’il y a beaucoup de petites unités administratives, les gens peuvent toujours se déplacer s’ils n’aiment pas leur situation et les dirigeants sont bien conscients de cela. Leurs habitants ne sont pas simplement des citoyens qui sont parfois autorisés à voter, mais des clients qu’ils doivent bien servir afin de les conserver.
“Pendant ce séminaire, nous allons montrer pourquoi la démocratie est le nouveau socialisme et pourquoi leurs résultats sont similaires.”
Quel public espérez-vous toucher lors de cette conférence ?
Un public d’étudiants et d’actifs, de toutes les personnes désireuses de s’affranchir des mythes qu’on nous inculque depuis l’enfance par l’éducation, les médias et la politique. Il y a une véritable foi dans le dieu de la démocratie parlementaire. Comme toute religion, la démocratie a son ensemble de croyances — des dogmes qui semblent être des faits indiscutables pour tout le monde. Ce séminaire a pour objectif de les discuter et de montrer pourquoi les principes et la dynamique de la démocratie conduisent à ces résultats négatifs. Pourquoi la démocratie est le nouveau socialisme et pourquoi leurs résultats sont similaires.
Dans la première partie de la soirée, Frank Karsten, l’un des auteurs de Dépasser la démocratie, expliquera les problèmes inhérents à cette dernière et pourquoi elle ne livre pas les biens désirés : la liberté, la cohésion sociale et la prospérité. À l’aide de graphiques, il illustrera les tendances négatives de la démocratie. Dans la deuxième partie, Karsten présentera une meilleure alternative. Quels exemples peut-on trouver dans le monde indiquant cette alternative ? Comment pouvons-nous aller dans cette direction ?
Le séminaire sera donné en langue anglaise le 28 juin à Paris de 17h à 22h. De nombreux livres en français seront vendus à prix d’amis. L’entrée est gratuite, mais l’inscription obligatoire. L’Institut Coppet sollicite un don des participants à l’inscription pour l’aider à organiser l’événement dans les meilleures conditions. Un buffet sera offert au cours de la soirée. Venez nombreux !
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