J’ai eu l’occasion de rencontrer la délégation du royaume d’Arabie Saoudite en voyage à Paris. C’est la délégation elle-même qui a tenu à me rencontrer personnellement pendant une heure afin d’avoir un débat serein. En creux, on pouvait comprendre cette affirmation : « celui-ci n’est pas notre vassal, aussi est-il respectable ». Une reconnaissance paradoxale, mais une reconnaissance tout de même, puisque comme j’ai eu l’occasion de le leur dire ce n’est pas à eux prioritairement que vont mes reproches mais bien à la classe dirigeante et aux partis politiques de mon pays qui soldent notre Civilisation et compromettent notre avenir.
Après ma proposition de résolution interrogeant les liens entre notre pays et Riyad, il m’a paru honnête de présenter mes graves interrogations aux représentants officiels de ce pays. J’ai été d’ailleurs confirmé dans ma démarche par la lecture de l’entretien accordé par le ministre des affaires étrangères Al Jubeir au journal le monde, lequel déclare sur la politique orientale de la France. : « Ses positions, sur tous les sujets, Israël et la Palestine, le Liban, la Syrie, l’Iran, l’Irak, le Yemen, sont presque complètement alignées sur les nôtres ». De là à considérer que Laurent Fabius et ses équipes ont privilégié leurs accords commerciaux sur les intérêts supérieurs de la Nation, il n’y a qu’un pas.
J’ajoute que le débat a été de qualité parce qu’il était cohérent : j’ai ouï dire que certains collègues avaient réclamé l’imposition du mariage homosexuel en Arabie Saoudite, ce qui me parait fort déplacé. En revanche, les positions non négociables doivent être défendues avec vigueur et précision, ce qui a été fait, provoquant une rare qualité du débat.
J’ai bien entendu évoqué les sujets suivants :
L’absence de liberté de culte chrétien en Arabie Saoudite, alors même que des Etats voisins acceptent de faire évoluer leurs positions.
Les intérêts divergents entre les chrétiens d’Orient et les tactiques saoudiennes.
Le financement direct de communautés musulmanes résidentes en France par des familles saoudiennes.
Le rôle trouble de Riyad dans le conflit syrien.
L’influence de l’Arabie Saoudite dans les Balkans et son refus de faire pressions sur ses alliés pour préserver par exemple les enclaves serbes du Kosovo.
L’absence d’investissement des Etats du golfe dans la gestion de la crise dite des migrants.
Voici une partie de leurs réponses. Au sujet du financement de mosquées le gouvernement ne transmettrait pas assez de dossiers à son homologue saoudien pour que celui-ci lutte contre les flux financiers non souhaitables. Nous étions plus en accord sur l’analyse de la politique internationale et le drame de la déstabilisation de l’Irak ou du Liban, fruit notamment d’interventions occidentales mues par des idéaux discutables. Enfin l’Arabie Saoudite affirme accueillir plus de 3 millions de réfugiés d’origines diverses.
Comme je l’ai répété à la délégation il est normal qu’un pays veuille que ses traditions soient respectées chez lui, mais il est aussi normal qu’il n’influence pas des communautés agissant différemment sur notre territoire, ce dont ils ont convenu. Si parfois, le conformisme a prévalu dans les réponses, je note que l’indépendance politique et la volonté de non alignement porte ses fruits et inspire le respect.
En somme notre opposition est fondamentale sur bien des sujets, nous sommes d’ailleurs parmi les seuls à l’assumer, mais la France recouvrera le respect sur la scène internationale le jour où ses dirigeants défendront réellement les intérêts de notre peuple et la vocation spécifique de notre Nation.
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