On n’est pas forcément d’accord. “Ils n’ont pas encore gagné mais la dynamique est en leur faveur. L’Ecosse pourrait se retrouver indépendante le soir du référendum du 18 septembre. Ce serait la mort de la Grande-Bretagne, la fin de trois siècles d’histoire depuis l’union de l’Angleterre et de l’Ecosse en 1707. Même si le ‘non’ finit par l’emporter sur le fil du rasoir, le Royaume-Uni n’aura plus le même visage. L’establishment anglais tente en effet de retenir les inventeurs du kilt en leur promettant une plus grande autonomie. Pourtant, l’Ecosse dispose déjà de son parlement, de son gouvernement et même de sa propre fiscalité. On se demande bien ce qu’elle pourrait avoir de plus alors même que les leaders indépendantistes ont annoncé qu’ils conserveraient la livre sterling comme monnaie. Cette émancipation de la nation écossaise ne sera pas sans lendemain. En Espagne, la Catalogne, le Pays Basque suivront les premiers : le référendum catalan est déjà sur les rails. Madrid tonne, menace encore mais comment s’y opposer après le précédent écossais ? Et puis, viendra le tour de la Flandre, inéluctablement, elle en rêve depuis des années. Les velléités d’indépendance de l’Italie du Nord retrouveront une vigueur quelque peu alanguie ces derniers temps. On peut même imaginer que la sage et riche Bavière s’interrogera sur son destin si elle se lasse de payer pour les pauvres de Prusse et de toute l’Europe. L’Ecosse veut garder son pétrole pour elle. Egoïsme sacré, oui, comme la Flandre ou la Catalogne mais égoïsme de gauche car le pays, à majorité travailliste, reproche à Londres ses excès libéraux depuis Thatcher.
C’est une révolution profonde et inouïe. Le lent travail d’édification de plusieurs siècles des Etats-nation d’Europe occidentale est sur le point d’être mis à bas en quelques années. Dans la mondialisation, les Etats-providence sont vécus comme des boulets inutiles : ils ont perdu leur souveraineté mais coûtent cher. Les marchés économiques nationaux sont devenus trop étroits pour les entreprises qui ont le monde entier comme horizon. Les petits Etats, dynamiques et cohérents, font un carton, qu’ils s’appellent la Suisse, Singapour, Israël ou la Corée du Sud. Notre époque consacre la gloire des petites nations alors qu’on nous annonçait depuis longtemps la mort des nations. A Bruxelles, les institutions européennes menacent l’Ecosse de ne pas l’accueillir au sein de l’Union : c’est l’affolement du pompier pyromane. Car n’est-ce pas la Commission de Bruxelles qui, depuis des décennies, a exalté l’Europe des régions, encourageant celles-ci à recevoir directement les subventions de Bruxelles et à passer par-dessus la tête de leur capitale ? N’est-ce pas les mêmes eurocrates qui ont poussé tous les gouvernement à leur accorder toujours plus d’autonomie. C’est une grande leçon pour nos politiques français qui, depuis quarante ans, ne jurent que par la décentralisation. Récemment encore, François Hollande a réduit arbitrairement sur un coin de table le nombre de régions françaises, toujours au nom des grandes régions de niveau européen. On voit désormais où cela mène : à l’indépendance des plus riches et à la désintégration des Etats-nation. Mais c’est peut-être l’objectif !”
Source : RTL, mardi 9 septembre 2014.
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