Éric Zemmour contre Domenach & Cie

Mise en perspective historique et philosophique de la querelle des sources.

Beaucoup de gens critiquent Éric Zemmour. Moi pas. C’est bien que le chef de file de la sensibilité souverainiste ait du talent. Cela ménage une dose de pluralisme. Quant à Nicolas Domenach, il incarne une gauche quelque peu populaire et patriote, ce n’est pas un intellectuel sectaire.

Vendredi dernier, nos débatteurs se sont sévèrement écharpés sur une question qu’il est intéressant de remettre en perspective sur un plan à la fois historique et philosophique. Sur le fond, Zemmour avait plutôt raison. C’est vrai que les représentants les plus extrémistes du lobby gay ont l’oreille des pouvoirs publics, sont subventionnés par nos impôts et parviennent parfois à faire leur propagande dans les écoles.

Comme souvent, Domenach a tenté de délégitimer la chose en la trouvant « exagérée » ou « réac ». De son côté, Zemmour a fait une fine allusion à « l’éducation » de son adversaire. Parce que, comme je l’avais expliqué, le père de Nicolas fut un catholique de gauche assez non-conformiste et, à ce titre, serait peut-être de nos jours catalogué à l’extrême-droite… Ce n’est donc pas très fair-play lorsque Domenach traite Zemmour « d’extrême-droite » dans les colonnes de son journal.

L’origine d’une source peut-elle la disqualifier ?

Par contre, Domenach n’a pas relayé la campagne de dénigrement orchestré par la gauche sectaire. Après avoir dénoncé le lobby gay, document à l’appui, la semaine précédente, Zemmour s’était vu accuser d’avoir emprunté ce document sur le site Internet d’Alain Soral. Même les « Guignols de l’info » avaient enfoncé le clou : un document marqué du stigmate de l’extrême-droite n’a aucune valeur !

Zemmour a reconnu avoir emprunté son document au site de Soral. Il était doublement ennuyé. D’une part, c’est un auteur qui ne mentionne les sources qu’il a visitées que s’il y voit un intérêt tactique (ce n’est pas lui qui citera un jeune talent pouvant le concurrencer !). D’autre part, comme la présentatrice le lui fit observer, cet emprunt justifiait en partie la proximité prétendue par Le Nouvel Observateur entre Soral et lui. Zemmour a alors cité, à deux reprises, un auteur réputé « de gauche », Jean-Claude Michéa, comme dérivatif.

Zemmour mérite qu’on plaide sa cause sur cette querelle des sources. D’abord, si les médias mainstream faisaient leur travail équitablement, on ne serait pas tenté d’aller voir les liens Internet que vous envoie le sympathisant FN qu’on a dans son entourage. Ensuite, le contraire d’une erreur ne fait pas une vérité, disait Bertrand de Jouvenel. Prendre le contre-pied systématique de l’extrême-droite n’est qu’une manie d’extrême-gauche. Refuser des sources qui concourent à l’établissement de faits est une caractéristique des logiques totalitaires.

Quelques jours auparavant, déjà, à la question du député UMP Daniel Fasquelle sur un favoritisme dont aurait bénéficié la fille de Vincent Peillon, le député PS Alain Vidalies avait botté en touche en contre-attaquant sur la possible origine d’extrême-droite de cette information. L’argument consiste, en effet, à rapporter une source à l’origine d’où elle émane pour la disqualifier et, par conséquent, disculper celui que la source met en cause.

Cet argument date d’il y a un siècle, en 1904 précisément, lors de l’affaire des Fiches. Le Grand Orient s’était mis à ficher les officiers de l’armée, pour influer sur leurs carrières. Jaurès avait évacué la question en déclarant qu’elle émanait d’une source impure, d’un député nationaliste, comme on disait à l’époque. La réaction de Clémenceau et Péguy avait été diamétralement opposée : un scandale est un scandale. Ils avaient donc claqué la porte de l’intelligentsia parisianiste.

Peu après, le sectaire ministère Combes fut balayé. Mais l’indignation sélective allait rester la marque de fabrique d’un certain type d’intellectuels. Une arme idéologique redoutable venait d’être brevetée. Désormais, une source ne serait plus soupesée selon sa valeur intrinsèque, mais en fonction de la couleur politique qui l’héberge.

Related Articles

15 Comments

Avarage Rating:
  • 0 / 10
  • xrayzoulou , 10 février 2014 @ 10 h 51 min

    Eric Zemmour est, à mon avis, un très bon chroniqueur et qui ne s’en laisse pas compter. Mais en lisant l’article jusqu’au bout on s’aperçoit que depuis le début des républiques, ce genre de “querelles” ont pris naissance !

  • marcS , 10 février 2014 @ 11 h 07 min

    Le jour où les médias et tous les “débatteurs publics” à la solde du gouvernement voudront bien admettre que l’Extrême Gauche et l’Extrême Droite ” c’est bonnet blanc et blanc bonnet”, alors je pourrai éventuellement comprendre que l’on fustige les arguments ou les informations émanant de l’un ou de l’autre de ces deux partis politiques

  • FIFRE Jean-Jacques , 10 février 2014 @ 11 h 11 min

    Vous avez raison, Marc Caprez, et je vous rejoint lorsque vous dites que Nicolas Domenach n’est pas “un intellectuel sectaire”. Non pas que je sois d’accord sur une quelconque absence de sectarisme chez lui, bien au contraire.
    En fait, l’eurythmie, qui existe entre la négation de votre qualificatif et mon opinion, est que Nicolas Domenach, à l’inverse d’Eric Zemmour, n’est tout simplement pas un intellectuel.
    C’est un journaliste. Une espèce de pigiste parfois pertinent souvent besogneux et toujours d’un anticonformiste bien conforme aux préceptes de la gauche qu’il aime tant.

  • Catholique & Français , 10 février 2014 @ 12 h 46 min

    Qui est encore au courant de l’Affaire des Fiches, conséquence directe de l’Affaire Dreyfus et de l'”épuration” de l’Armée française qui l’a suivie ? Ce sectarisme maçonnique a coûté très cher (en vies humaines) à la France en août-septembre 1914, beaucoup d’officiers supérieurs ou généraux ayant été préférés à des officiers de valeur nettement supérieure mais ayant le tort d’être Catholiques. Heureusement, le gouvernement qui a fait face au déferlement allemand de l’été 14, a su redresser la barre dans l’urgence, “limogeant” (c’est l’origine du mot) nombre d’incapables dont le seul mérite était d’être des républicains bien-pensants. C’est ainsi que Philippe Pétain, qui était simple colonel sur le point de prendre sa retraite en juillet 1914, s’est retrouvé rapidement propulsé au grade de général. Il est vrai que le futur maréchal, pourtant pas calotin pour un sou ou même Catholique pratiquant (contrairement à une idée reçue très répandue) avait répondu avec panache aux enquêteurs qui l’interrogeaient pour leurs Fiches sur la pratique religieuse de ses subordonnés : “J’en sais rien, je suis toujours au premier rang à la Messe et je ne me retourne pas pour voir qui est là !” Il est vrai que ce n’était pas le moyen de faire un belle carrière militaire entre 1900 et 1914…

  • Olivier FN 65 , 10 février 2014 @ 19 h 45 min

    Eric Zemmour est toujours excellent, courageux et intelligent dans ses propos.
    Je m’étonne tous les jours, avec joie, qu’il ait encore une (toute petite) tribune médiatique, joyau rare par les temps stalinistes qui courent.
    Vous avez mille fois raison de le défendre.

  • azerty , 10 février 2014 @ 19 h 55 min

    Je suis d’accord. Ce n’est pas une personne mauvaise comme les F.ourest, P.
    lenel, Bruno Ro.ger-Petit et les autres lyncheurs professionnels du nouvel obs. Il cette qualité que je lui reconnais et qui fait défauts à ces ordures : la loyauté. En revanche c’est juste un petit journaliste quelconque, et bobo assumé par confort et sécurité qui n’a pas hérité du niveau intellectuel de son père.

  • Robert , 10 février 2014 @ 21 h 13 min

    Olivier FN 65,
    Ces médias sont vénaux et orgueilleux.
    Ils ne veulent pas perdre totalement le profit financier d’auditeurs qui sont des électeurs mal-pensants et ils se croient capables de les capter voire les convertir pour qu’ils doutent de leurs idées prétendument néfastes.
    Il est possible d’ailleurs que Zemmour joue un rôle plus ou moins volontaire dans ce captage des mal pensants tout en partageant sincèrement certaines de ces convictions. Le pire pour tous ces mondialistes qui nous dirigent, ce serait que le peuple ne suivent plus leurs mots d’ordre servilement. L’affaire Dieudonné en est caractéristique comme la journée de retrait.
    Désobéissance qui se répand et ils se retrouvent dévoilés pour ce qu’ils sont, menteurs, pervers et totalitaires.

Comments are closed.