“Le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu se révèle être une formidable machine à cash pour l’État. Il s’agit d’un véritable jackpot, qui sert à masquer en partie la modestie, pour utiliser un mot charitable, des efforts du gouvernement en matière de gestion. Première aubaine, Bercy encaisse cette année non seulement les impôts de 2019, avec le prélèvement en temps réel, mais une partie de ceux de 2018, en même temps.
En effet, la fameuse année blanche n’est pas si blanche que cela, elle est plutôt blanc cassé, pour ne pas dire carrément grise. En effet, les revenus habituels perçus en 2018 ont bien été exonérés d’impôts, les salaires par exemple, mais les revenus dits exceptionnels ont été taxés, les primes de départ à la retraite, les indemnités diverses.
Ça a concerné près de trois millions de contribuables, qui ont payé 5 milliards et demis d’impôts. Cinq milliards et demis de bonus pour l’État, qui se sont ajoutés aux recettes habituelles.
Les revenus 2020 taxés au barème de 2019.
Et c’est sans compter une autre astuce, qui touche au barème. En principe, le barème, c’est-à-dire la définition des seuils de revenus pour appliquer les tranches d’imposition, est réévalué chaque année à la hausse, pour tenir compte de la hausse des prix. Et bien pas cette année : les revenus de septembre 2019 à septembre 2020 seront taxés au barème de l’année dernière. C’est l’équivalent du gel du barème, qui avait été mis en place par Nicolas Sarkozy et conservé par François Hollande, et qui revient de facto à une hausse d’impôt de 1 ou deux milliards.Cela représente en tout une petite dizaine de milliards.
1,2 milliard d’économies sur les aides sociales en 2020
Et ce n’est pas fini. Grâce au prélèvement à la source, l’administration fiscale connaît vos revenus en temps réel. Du coup, les aides au logement par exemple, qui naguère étaient calculées pour un ménage à partir de ses revenus de deux ans auparavant, le seront avec des données bien plus fraîches. C’est-à-dire avec des revenus majorés au moins de l’inflation sur deux ans, en gros 4% de plus. Du coup, bon nombre de ménages seront au-dessus des seuils, et vont donc voir leurs aides réduites. C’est ce que Bercy appelle la contemporanéité. En français, le fait de se baser sur des données de revenus de l’année en cours, et non plus de l’année n-2.
Économie attendue en 2020 : 1,2 milliard d’euros. Et notre ministre des comptes publics, Gérald Darmanin, envisage d’adapter toutes nos aides sociales dépendantes du revenu à ce nouveau système. Il est vrai que ça doit être tentant, compte tenu de l’argent que ça fait rentrer dans les caisses.
Contrairement à ce que nous serine le gouvernement, les recettes de l’impôt sur le revenu seront bien supérieures en 2020 à celles de 2019, grâce à ces petites astuces, qui font plus que compenser la petite baisse annoncée.
Évidemment cela ne se reproduira plus. C’est le cadeau des contribuables pour l’année de transition. Les revenus exceptionnels de cette année, 2019, seront en effet taxés à la source, comme les autres. Mais il n’y a pas que cela. Le prélèvement à la source permet un taux de recouvrement encore meilleur que celui qui prévalait auparavant, qui était déjà l’un des meilleurs du monde, à 98,50%. En limitant ainsi les fraudes ou les oublis, l’État a récupéré encore un petit milliard, et là de façon probablement durable.”