Par Lucien Zéléa
Pas plus que la famille, l’Église n’appartient au libéralisme.
Digne d’un match OM/PSG sans arbitre ni ballon, cette parade sociétale à laquelle nous assistons entre les partisans de la « Manif pour tous » et les indécrottables progressistes de l’Homo festivus +, participe à glorifier la bourgeoisie dans ce qu’elle a de plus pervers et de plus ostensiblement niais.
Libérale-libertaire, elle se réclame des « valeurs » conservatrices en guise de supplément d’âme et se montre bien incapable, fidèle à sa race, de cultiver un tempérament aristocrate face à la destruction pure et simple, aussi insidieuse qu’assumée, du lien charnel qui scelle une société.
Soutenu par les Baby boomers et les Papa pampers, cet « Indignez-vous » au parfum de dentifrice obéirait, nous dit-on, à un mouvement de contestation populaire qui prendrait les codes de la société du spectacle pour la retourner à son avantage.
Une perspective aussi innocente s’avère non seulement vouée à l’échec mais complètement faussée.
A l’image d’une Frigide Barjot, animatrice digne des confettis du « vivre ensemble » et favorable à une union civile entre personnes de même sexe, la « Manif pour tous » représente la parfaite consécration du catholicisme festif.
De leur côté, les évêques « assimilés » fonctionnaires ne cachent rien, pour la plupart, de leur pusillanimité, plus timorés encore que les habitués de cette révolte de pataugeoire.
Les penseurs chrétiens, quant à eux, en appellent au droit naturel et à la Doctrine sociale de l’Église en se contentant d’une feuille de route dans Le Figaro ou d’un entretien-canapé à la Procure, à croire que ce catholicisme à la Maritain, lequel prétend faire sa mue de la chrétienté, a vocation à vivre sa Croix au rayon « surgelés » en sauvant les bijoux de famille, avec la maison de campagne, la piscine et les habits de photo du dimanche, tout cela au nom d’une joie cosmétique, celle d’un cirque dans le désert, selon un réflexe glamour post-romantique. Salut pour tous !
En vérité, la question du privilège de vie pour tout enfant dépasse chacun, à commencer par les vertigineux docteurs de l’Homo festivus, qu’ils soient du gouvernement ou des médias institués, jusqu’à la propagande d’État et ses multiples ramifications en associations pleurnichardes.
Certes, bon nombre de catholiques ne suivirent pas la Barjot, surtout les plus concernés par la question, en témoigne la déconstruction pleine de justesse d’un Philippe Ariño.
Que les lecteurs de Libération se rassurent, avec leur bigoterie de poussette, tous ces cathos sont pour l’ensemble dénués de conscience politique.
Incapables de saisir le sens de la Tradition, avec ce qu’elle implique d’esprit de sacrifice, celui de nos pères, ennemis d’une Croix sans Christ, avec tous ceux qui ont édifié la France et veulent encore la sauver de son anesthésie libérale, les cathos de peau, dégoulinant d’un catholicisme de culture qui se réduit à tendre la joue et la fesse, ont sacrifié la prière pour la protestation.
Il suffit d’assister à ce spectacle techno, d’enfiler les lunettes couleur fushia tout en agitant les drapeaux roses « bon enfant », pour prendre la mesure de l’indécente niaiserie de ces escathos aussi farcis que la coquille de Rouen contre laquelle ils s’indignent. Définitivement, la Manif pour tous vient célébrer une gigantesque kermesse aux allures de mœurs américaines, une sorte de catholicisme délavé, un protestantisme honteux, une Tea party.
Or, une rébellion ne trouve ses raisons d’être qu’en engageant tout un corps, au risque de se convertir en Folies Bergères. Avec son discours victimaire, la boutique juridique des libéraux-conservateurs est la fille incestueuse de Mai 68, sa bonne Lulu. Si la bourgeoisie de droite a voulu récupérer cette indignation d’écolier, elle demeure, plus que jamais, l’agnelle de Berger, immortel ******* de la rondelle pour qui « louer son ventre pour faire un enfant ou louer ses bras pour travailler à l’usine » ne fait aucune différence. Souvenons-nous de Monsieur Copé, absolument pour le mariage gay (libéral de conviction), obligé de se présenter contre pour satisfaire son hypocrite éthique de responsabilité. Ce sera la même mécanique avec les diverses droites, surtout celles qui parodient le F.N.
Comme les idéologies sont neutralisées dans le système libéral où tout se vaut selon les caprices de la demande, les voilà complices de la com’ et du spectacle. La sensibilité politique est soumise à la tyrannie de l’opinion. La royauté seule – quand elle n’obéit pas à une culture romantique – permet de s’en extraire en refusant le diktat de la séduction que favorise l’électoralisme.
Derrière la Manif’ pour tous, c’est un corps pour tous qui est piétiné, inlassablement, sans que personne ne retire le mal en sa racine : tous ces enfants crèvent comme des ballons, parce qu’ils n’ont plus de père.
A la place, il ne reste qu’une nounou avec sa musique techno et sa parade Disneyworld, comme la Vilaine Lulu qui attend, non sans gourmandise, les Sarkozy, les Hollande, lesquels « ne lâcheront rien » en scellant d’une main commune, sur l’autel du Marché, ses sacrifices à jamais silencieux.
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