La France est actuellement victime de la supercherie la plus sournoise de son Histoire. Une mystification à l’échelle d’un peuple est en marche. Cette sorte « d’escroquerie en bande organisée » consiste à duper le maximum d’électeurs en les trompant sur les hommes qui sont au pouvoir, ou veulent y parvenir, sur ce qu’ils veulent y faire, sur ce qui les unit. Deux constats s’imposent toutefois à ceux qui n’ont pas succombé à la macronite aiguë inoculée par les grands médias. D’une part, jamais le brouillard de la confusion des idées et des valeurs n’a autant envahi la pensée politique au point d’inverser les hiérarchies et de renverser les rôles. D’autre part, l’accélération du temps politique, parée du subterfuge du changement, du renouvellement des hommes et des perspectives, risque d’entraîner les Français sur un chemin dont ils s’apercevront trop tard qu’il n’était pas du tout celui qu’ils souhaitaient emprunter.
Les hommes d’abord. Ces Tartufes sont arrivés avec les banderoles de la morale déployées au vent du renouveau. Le Secrétaire Général d’En Marche est un député socialiste du Finistère, qui comme beaucoup de ses collègues a surtout voulu survivre, et le plus confortablement possible, selon leur habitude, à la débâcle ô combien méritée après le mandat calamiteux dans lequel il a été acteur et complice. Richard Ferrand n’a pas seulement profité des pratiques de l’Assemblée nationale qui ne regardent qu’elle, constitutionnellement, mais a largement utilisé son emploi de directeur général des Mutuelles de Bretagne pour enrichir sa « famille », à travers une location ciblée de telle sorte qu’elle fût contraire aux intérêts de la mutuelle et très favorable au propriétaire de la SCI bailleresse, la compagne pacsée du sieur Ferrand, qui sera par ailleurs chargée de prestations, de même que son ex-épouse par le généreux directeur. Ce dernier sera toujours rémunéré par les Mutuelles de Bretagne, une fois devenu député, tandis qu’il emploiera le compagnon de la nouvelle directrice générale. On comprend à travers ce montage que le mouvement, qui s’est donné pour but de changer le système, a pour secrétaire général un expert en matière de système. La justice a traîné les pieds pour s’intéresser à la question. On se souvient qu’elle avait couru de manière inouïe sur l’affaire Fillon, ancienne et fiscalement transparente, quand l’opération du récent ministre à la cohésion des territoires avait été sciemment dissimulée. Le fait que dans un cas il s’agissait de briser l’élan du favori de droite à l’élection présidentielle, et dans l’autre d’éviter des remous défavorables à la victoire législative de la majorité « présidentielle » n’est bien sûr que pure conjecture. Heureusement, le ministre de la justice, lui-même mis en examen, connu pour la rectitude de sa pensée, et la fidélité à ses alliances, est chevaleresque. Chevalier servant, François Bayrou, garde des sceaux, a retweeté un communiqué de sa collègue De Sarnez, visée par l’ouverture d’une enquête préliminaire. La solidarité est un devoir. Le président l’a d’ailleurs exigée. Chevalier blanc, Bayrou va déposer un projet de loi pour redonner confiance dans la vie démocratique. Le terme de « moralisation » a été écarté parce que la loi et la morale ne se confondent pas, dit-on, mais cette justification est une fumisterie. La moralisation concernait les élus, quelle farce ! La confiance, elle, est l’affaire des électeurs, si faciles à rouler !
Le vote des Français de l’étranger est révélateur de la phase politique trouble que traverse notre pays. D’abord, moins de 20% des électeurs ont voté, comme si beaucoup étaient dans l’incertitude voire le rejet. Ensuite, les candidats d’En Marche sont largement en tête, au premier tour, dans la quasi-totalité des circonscriptions. Cela annonce-t-il la réussite globale de l’imposture ? Il est probable que les votants de l’étranger, plus sensibles à l’image artificielle, mais positive du nouveau président, qu’à celle de leurs députés hors-sol, aient amplifié ce mouvement de conformisme béat. Enfin, et surtout, ce vote décalé de ceux qui vivent la mondialisation et en vivent, accentue la fracture avec la France de l’intérieur, notamment périphérique, confrontée aux problèmes et tenue à l’écart des solutions. Le mépris d’en haut pour les gens d’en-bas, illettrés bretons, ou immigrés comoriens, ouvriers sans costumes ou jeunes n’ayant pas l’intention de devenir milliardaires, est toujours prêt à percer le masque d’un président pourtant habile à jouer la comédie de la sincérité. La duplicité, le jésuitisme sont au pouvoir. La stratégie pour le posséder tout entier commande tout chez celui dont l’ambition est dévorante. A sa suite, il y a ceux qui se sont reconnus en lui, comme ce ministre du budget, « de l’action et des comptes publics », qui s’est fait une spécialité de la trahison et grimpe à toute vitesse son échelle de perroquet. Quant à moi, première victime de son « talent », le fait que les derniers en date soit Fasquelle, menacé de délation fiscale, et Ciotti, ex-frère en Sarkozie, récompensé d’être venu le soutenir dans le Nord, par une expédition « punitive » à Nice, m’amuse plus que cela ne m’attriste. Le marigot « de droite » est très encombré par les crocodiles chiraquiens et sarkozystes qui ont été à bonne école. La majorité présidentielle n’aura pour seule orientation écologique, sous la pancarte décorative et biodégradable de M.Hulot, que le recyclage des élus du marais, socialistes survivants et républicains arrivistes, riches de calculs et avares de convictions. Habiller ce ramassis du vêtement de la morale aurait poussé trop loin la truanderie.
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