La France, terre de liberté, d’égalité et de fraternité, n’en est pas moins une terre civilisée où la fraternité s’entend dans un cadre strictement encadré par l’État, dans laquelle l’égalité doit s’exprimer en tout, pour toutes et tous, au maximum possible et sans discussion, et où la liberté saura se cantonner à ces espaces que le politique lui réservera en les rétrécissants tous les jours…
À commencer par la liberté d’expression, cette enquiquinante liberté qui permet à chacun d’exprimer son opinion, aussi dissidente, irritante et politiquement incorrecte soit-elle. Dans cette optique, rappelons qu’en France, la pression sociale, celle qui permet à tous de comprendre qu’il y a des choses qui se disent et d’autres qui, au plus, se chuchotent, cette pression sociale, celle qui calme naturellement les velléités des imbéciles à utiliser leur liberté d’expression pour dire des âneries, cette pression sociale, en France, n’est jamais suffisance : il faut donc à tout prix restreindre la liberté d’expression pour pallier cette pression déficiente.
C’est ce que s’emploie donc à faire tout gouvernement en place depuis plusieurs décennies. Chacun ajoute ainsi son rouleau de fil barbelé autour de la liberté d’expression pleine et entière pour éviter que les joyeux citoyens français profitent de trop vastes espaces de libertés et laissent un peu trop vagabonder leurs idées et leurs propos.
Il ne se passe donc plus une année sans que l’une ou l’autre loi soit votée pour restreindre aussi fermement que possible la liberté des uns et des autres à exprimer une idée. Dernièrement, ce fut une loi « anti-fake news », écrite par l’habituelle brochette de clowns à roulettes gouvernementaux ce qui n’a d’ailleurs pas manqué de se retourner contre le gouvernement. On retrouve d’ailleurs le même syndrome du n’importe quoi législatif pour museler technologiquement la liberté d’expression au niveau européen, ce qui ne manquera pas d’avoir moult effets de bords ridicules et contre-productifs.
Malheureusement, force est de constater que l’acharnement législatif pour bâillonner légalement les citoyens ne parvient pas à faire taire toute dissidence, toute voix discordante dans le chœur encore imparfait des louangeurs de la Solidarité Pervasive, Totale & Universelle Française.
C’est ainsi que le vendredi 29 mars, bêtement munis de leur liberté d’expression et d’une absence de lucidité face à la pression sociale pourtant claire de la société française, des militants du groupe anti-immigration « Génération Identitaire » (GI) ont sauvagement déployé une méchante banderole géante depuis le toit de la Caisse d’allocations familiales de Seine-Saint-Denis sur laquelle on pouvait nettement lire « De l’argent pour les Français, pas pour les étrangers ».
Sur le plan de la communication, l’opération est un magnifique succès. La presse, au bord de l’apoplexie devant un tel acte absolument pas compatible avec la République du Bisounoursland, s’est immédiatement empressée d’utiliser tous les moyens à sa disposition pour titrailler violemment en direction générale de cette droite aussi extrême que groupusculaire, identitaire et anti-vivrensemble.
Notons fugacement que tout le monde semble indifférent au fait que ce même groupe veut continuer la distribution de pognon des autres (sous seule condition de nationalité) ; le collectivisme a encore de beaux jours devant lui.
Dans la foulée, devant un tel outrage, il a rapidement été question de trouver la parade contre ces individus vraiment trop nauséabonds. Leur envoi dans des camps de rééducation étant – pour le moment – impossible, il faudra trouver un autre moyen de les empêcher de penser de travers. Et cela peut commencer par la dissolution de Génération Identitaire que n’ont pas manqué de réclamer vivement syndicats (CGT et FO en tête), partis politiques (PS en premier) et associations lucratives sans but (l’inévitable SOS Racisme) afin que soit mis un terme à ces débordements qui, selon ces frétillants soldats de la bien-pensance, sont « xénophobes » et « stigmatisent les allocataires » horriblement ce qui, au passage, revient à valider complètement l’idée véhiculée sur la banderole selon laquelle l’argent des autres est d’abord distribué aux étrangers…
Malheureusement, il y a un hic.
Pour dissoudre un mouvement, encore faut-il une raison légale un minimum solide. Ce serait dommage que, dans l’emballement d’une dissolution trop rapide, l’appareil d’État serve finalement à donner raison à Génération Identitaire dans un grand barouf médiatique.
Il s’agira donc de trouver une motivation crédible ce qui promet de ne pas être aussi simple que prévu : le groupe ne revendique aucune violence (zut), se fait même fort de vouloir créer un débat pacifique (flûte), et ne veut même pas remettre en cause la République (et caca boudin). Autrement dit, il va falloir échafauder autre chose pour dissoudre légalement le groupe.
Heureusement, une lumière s’est allumée au bout du tunnel : il semblerait bien que Brenton Tarrant, le terroriste de Christchurch, ait fait un don à l’association avant son départ pour l’autre côté du globe. Aubaine ! L’association devient dès lors récipiendaire de fonds issus d’un terroriste et peut donc éventuellement être elle-même classée comme terroriste…
Pas de doute : selon Romain Espino, représentant du mouvement Génération Identitaire, il y a eu des dons de Tarrant en septembre 2017 :
« Nous avons retrouvé deux traces de dons pour un montant total de 1.000 euros »
Ah, enfin, les impétrants identitaires sont coincés, ils ne pourront pas s’en sortir à bon compte !
Bon. Soit, le raisonnement derrière est particulièrement tortueux. Espérons qu’il ne viendra à l’idée de personne de tenir exactement le même vis-à-vis des Caisses d’Allocation Familiale qui ont, de façon tout aussi certaine et connue, financé des djihadistes ; ceci aboutirait à dissoudre les CAF au même titre que Génération Identitaire. Au moins, la distribution de pognon des autres (aux Français comme à tous les autres) s’en trouverait durablement interrompue, ce qui pourrait constituer une solution aux demandes véhémentes des identitaires.
En pratique, on comprend qu’un motif aussi emberlificoté pour dissoudre ce mouvement cache fort mal l’opportunisme politique des pouvoirs publics, produisant des motifs de dissolution comme des saucisses industrielles avec cette foi zélée limitée aux seuls dossiers de cette extrême-droite aux griffes de plus en plus limées. Dans le même temps, on ne s’étonnera plus guère de l’inertie de ces mêmes autorités devant les Black Blocs et toute la myriade d’associations prétendûment antifascistes mais effectivement violentes et destructrices qui officient sur base hebdomadaire depuis des mois ou à toutes ces bonnes occasions qui sentent la sueur, le foin et l’herbe amusante depuis les ZAD jusqu’aux manifestations de syndicalistes à merguez.
S’il semble assez évident que dissoudre Génération Identitaire permet au gouvernement d’engranger quelques voix à l’approche d’élections européennes particulièrement électriques, on ne peut que constater la mollesse pathologique du même gouvernement concernant les groupuscules d’extrême-gauche qui détruisent les commerces chaque samedi depuis des semaines.
Les Français constatent le Deux Poids Deux Mesures ; ils constatent l’aplatissement complet des forces de l’ordre autant devant la gauche bien-pensante que l’extrême-gauche violente ; ils constatent l’acharnement des autorités à vouloir taire certaines opinions, tout en se plaçant hypocritement en héraut de la liberté d’expression ; ils constatent l’orientation des débats, l’enfouissement rapide des questions qui dérangent, le lynchage médiatique systématique de ceux qui osent penser en dehors des clous républicains officiels.
Ces constats, difficilement escamotables, finissent par rendre les actions du Camp du Bien redoutablement contre-productives. Un beau matin, le retour de bâton promet d’être cinglant.
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