Pierre Toullec, ancien président des comités français de soutien de McCain et Romney, vous vous mobilisez contre Donald Trump, pourtant en tête dans les sondages pour les primaires républicaines. Pourquoi ce revirement ?
En 2008, j’ai soutenu la campagne de John McCain en trainant des pieds. En 2012, j’ai soutenu celle de Mitt Romney avec un immense enthousiasme et espoir. Je n’ai pas fait de revirement politique, à une exception.
Les dernières années m’ont effectivement démontré que je faisais fausse route avant 2008 lorsque je me qualifiais de Néoconservateur et que je défendais cette vision. J’ai publiquement fait mon mea culpa sur cette question il y a quelques jours en vidéo. Pour autant, j’étais déjà à l’époque et je reste libéral. Au cours des années, je suis entré plus dans le détail de l’analyse économique. Après avoir validé ma licence en management des entreprises et mon master en business international, je me suis replongé dans l’analyse du fonctionnement pur de l’économie, me permettant de devenir professeur d’économie en janvier 2015. En parallèle, j’ai lancé la série-web centrée sur l’économie Hent ar Frankiz dont Nouvelles de France est partenaire.
Ces expériences m’ont conforté dans mes idées libérales et aidé à mieux comprendre l’ensemble des tenants et aboutissants purement économiques de cette philosophie humaniste. Plus que jamais je soutien les idées fondamentales de la droite Américaine et si Mitt Romney s’était représenté à la présidentielle, je me serais à nouveau lancé dans l’aventure avec un immense plaisir.
Au contraire, Donald Trump représente tout ce qui ne va pas dans la politique Américaine. Ami proche de Hillary et Bill Clinton et habitué à corrompre les politiciens, ce sont ces deux éléments qui lui ont permis de réussir sa carrière.
Sur Facebook, j’ai créé la page des Français contre Trump face au risque de le voir remporter la primaire dans les prochaines semaines, mais j’espère toujours le voir échouer au dernier moment, permettant la suppression de cette page une fois qu’il sera retourné à la vie privée.
Donald Trump est pourtant un entrepreneur à succès et il a contre lui tout l’establishment pro-réglementation, mondialiste et progressiste…
Donald Trump n’est pas un entrepreneur au sens économique du terme. Toute sa carrière a été construite sur l’exploitation des politiques inflationnistes de la Banque Fédérale Américaine (la FED) en utilisant massivement l’endettement et le paiement d’hommes et de femmes politiques pour s’assurer des faveurs et permettre d’obtenir à moindre coût des terrains privés, souvent déjà utilisés par d’autres propriétaires, à travers l’outil de l’Eminent Domain1, c’est-à-dire la possibilité pour l’Etat de s’emparer de toute propriété privée pour l’exploiter d’une autre manière. En versant de fortes sommes aux élus, Donald Trump a été en mesure d’utiliser massivement les pouvoirs de l’Etat Fédéral et des Etats fédérés pour exproprier des propriétaires pour réaliser d’importants profits personnels. Il s’est vanté d’avoir utilisé cette pratique anti-marché libre au cours des débats Républicains. C’est un adepte du capitalisme de connivence et n’a aucun respect pour les idées libérales.
Il n’y a qu’un type de propriété privée que Donald Trump respecte et défend : la sienne.
Vous dîtes même que vous préfèreriez Hillary Clinton à Donald Trump…
C’est vrai. Sur les programmes économiques et internationaux, il n’y a pas de différence fondamentale entre Hillary Clinton et Donald Trump. La victoire de l’un ou de l’autre n’aurait pas de conséquence très importante sur la politique Américaine et ses conséquences sur l’Europe.
Ma préférence pour Hillary Clinton dans ce cadre est simple : malgré son incompétence et les nombreux scandales qu’elle traîne, elle ne passe pas son temps à insulter ses adversaires, à se moquer des ethnies non-blanches et ne prône pas la fermeture économique des frontières. Pour ces trois raisons, Hillary Clinton aurait une bien meilleure allure comme présidente des Etats-Unis comparé à Donald Trump.
Comment les médias US de droite réagissent-ils à sa candidature ?
De manière générale les médias et les militants de droite sont très perturbés par la candidature de Donald Trump. La meilleure preuve en est que dans les sondages, moins de 50% des Républicains interrogés donnent un favori, et sur cette proportion inférieure à 50%, seuls 35% des électeurs potentiels répondent « Donald Trump ».
Plusieurs journalistes de droite parlent encore d’un ultime recours contre Donald Trump : Mitt Romney. A ce jour, il reste le seul suffisamment populaire pour écraser Donald Trump en quelques jours sans même avoir à monter une campagne. Ses réseaux sont toujours présents. Mitt Romney a même révélé il y a quelques jours que l’un des candidats à la primaire Républicaine l’avait approché pour lui demander de se lancer courant janvier 2016 pour remporter cette primaire et virer le plus rapidement possible Donald Trump du Parti Républicain.
Le danger de regarder simplement les affinités des médias, même de droite, est que plusieurs d’entre eux jouent la sécurité : leurs clients potentiels semblent fascinés par le phénomène « Trump », donc ils vont en parler et potentiellement positivement. Cependant, les articles de fonds qui étudient sérieusement son programme sont globalement très négatif à son égard, même à droite.
Les médias les plus libéraux, tels que Reason Magazine, sont ouvertement contre Donald Trump.
Les autres médias de droite sont généralement divisés et différents journalistes du même média vont avoir des analyses très différentes de sa candidature. C’est notamment le cas de National Review, Human Events et The Weekly Standard.
Plus rares mais présents aussi, certains médias tels que Red State, beaucoup plus portés sur la question de l’immigration notamment, vont avoir un discours beaucoup plus positif envers « The Donald ».
Vous-même, pour qui voteriez-vous ? (dans l’idéal et en vote utile) Pourquoi ?
La réponse à cette question implique un « si j’étais Américain ». Je tiens à commencer par préciser que je ne suis pas intéressé par quitter la Bretagne pour les Etats-Unis ni à devenir citoyen Américain. La politique et l’économie Américaine me passionnent mais je suis et je reste Breton.
Si j’étais Américain, au cours de la primaire Républicaine, je voterais sans aucun doute Rand Paul qui, au vu de l’évolution très rapide des sondages, a toujours une chance de l’emporter. Il est désormais devant Jeb Bush dans les derniers sondages. Lors du vote pour la présidentielle le 8 novembre 2016, qui que soit le candidat démocrate en face, Rand Paul aurait de même mon soutien.
Dans le cas où Rand Paul ne serait pas candidat du Parti Républicain en Novembre, cela dépendra beaucoup du candidat qui aura remporté la primaire. Si Donald Trump est le candidat de la droite Américaine, alors le vote le plus utile sera pour le Parti Libéral (Libertarian Party) pour faire clairement passer un message au Parti Républicain contre son revirement vers un socialisme non assumé mais clairement défendu. Dans le cadre d’un duel Hillary Clinton – Donald Trump, il s’agirait d’un non-choix étant donné leur proximité idéologique en économie et en politique internationale. Le vote le plus utile sera alors clairement et sans aucun doute pour le Parti Libertarien dont la primaire vient de débuter. Ses trois principaux candidats sont Austin Petersen, John McAfee et Gary Johnson.
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