Les violences qui ont accompagné la tenue du Comité Central d’Air France sont un événement, un symbole et une contre-publicité calamiteuse. Les images de cadres lynchés ont fait le tour de la planète. Une fois encore, le souvenir d’une populace déchaînée a rejailli du passé, celui d’une révolution exaltée dans les esprits alors qu’elle a lamentablement échoué dans les faits. Elle entretient la réputation d’un « peuple » incapable de réformes et prompt aux soubresauts révolutionnaires. Une entreprise qui véhicule l’image de notre pays dans le monde entier a montré un visage décourageant pour les touristes et les investisseurs. Surtout ne pas utiliser cette compagnie dont les employés sont brutaux quand ils ne sont pas en grève, trop chère et qui croule sous les déficits ! Pourquoi aller dans un pays où la sécurité est douteuse ? Pourquoi investir dans un pays où le dialogue social est aussi déficient et les syndicats dangereux ? Les drapeaux de la CGT flottaient une fois de plus sur la catastrophe. Les récidivistes de la casse économique ne sont pas plus discrets à Air France qu’ils ne l’étaient dans les ports ou les entreprises industrielles : une aubaine pour les concurrents étrangers ! Avec un aveuglement qu’à Londres on doit juger comique, l’intersyndicale évoque une entreprise « vecteur de la culture et de la diplomatie françaises » ! Si cet humour était volontaire, il ferait envie aux Britanniques !
Pour la 41ème année consécutive, la France va afficher un budget en déficit qui va alourdir une dette (96,5% du PIB) qui pèse elle-même sur le déficit. La plupart des pays, à l’exception des Etats-Unis dont la monnaie exprime la puissance planétaire, connaissent des déficits, des équilibres et des excédents qui alternent. L’idéal keynésien lui-même suppose qu’aux excédents des époques de croissance succèdent des déficits pour compenser la récession et faire face aux crises et à la casse sociale. La France a choisi depuis quarante ans la crise continue, le chômage et le déficit. C’est le seul pays où la réduction de ce dernier a fait parler de « cagnotte » et a libéré les vannes de la réduction du temps de travail ! La loi de finances pour 2016 avoue le désarroi de la cigale désemparée. Le déficit recule peu, de 74 à 72 milliards d’Euros. La dépense publique continue à croître, de 1,3%, malgré l’annonce de 16 milliards d’économie. Bref, la baisse n’est qu’une augmentation moindre… Les élections approchant, on diminue les impôts des ménages de 2 milliards parce qu’on a mesuré la nocivité économique d’une pression fiscale excessive… et ses ravages dans l’électorat. Cette petite mesure en faveur de la demande et de la consommation écarte de l’essentiel : le soutien à l’offre, à la production et à l’entreprise pour relancer l’emploi. Les dotations aux collectivités régressent. C’est plus facile puisqu’elles sont ou seront majoritairement dans l’opposition, mais c’était nécessaire. Comme l’actualité le souligne, la Justice, la sécurité, la défense demandent des efforts supplémentaires. C’est l’Etat régalien, l’Etat nécessaire qui crie famine. Le gouvernement doit aussi y penser. Dans cet exercice de jonglerie et de prestidigitation, on admire l’habileté de Bercy, mais dans un domaine éloigné du cirque, on aimerait davantage la continuité, la rigueur et la cohérence. L’adoption constitutionnelle de la règle d’or qui obligerait l’Etat, comme c’est le cas pour les collectivités, à n’emprunter que pour investir et non pour « fonctionner », hors situation exceptionnelle comme la guerre, serait une réforme décisive et salutaire.
Mais la France a de plus en plus de mal à passer pour un pays sérieux. Elle semble incapable de remédier à ses mauvaises habitudes, à son laisser-aller, comme les ratés de la Justice, par exemple, viennent encore de le faire entendre. La France n’est pas au tapis, mais elle est en panne. Depuis Pompidou, le moteur est cassé. Georges Pompidou était un conservateur de l’essentiel, par là capable de préserver les moyens du véritable progrès. Parvenu à tirer la France du stupide chahut gauchiste de 1968, sans effusion de sang, il a assuré le redressement économique du pays avec des taux de croissance exceptionnels pendant ses quelques années de présidence. Sa mort prématurée, qui coïncidait avec les effets du choc pétrolier, nous a laissés entre les mains de politiciens de plus en plus médiocres qui ont été les complices plus ou moins conscients du déclin de la nation.
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