L’anniversaire de l’élection de François Hollande éveille la compassion. Il s’en donne du mal pour essayer de rebondir. Il tente de faire d’un bilan calamiteux aux yeux des Français pour les deux premières années du mandat, l’occasion d’un nouveau départ, l’onction d’une virginité retrouvée. Sur BFM, il fait même pénitence : il a des regrets. Enchantement du Vendredi Saint ? Le regard des catholiques s’adoucit déjà. L’ambiance les émeut. Patatras ! Il regrette de ne pas avoir fait voter la loi sur le mariage unisexe plus tôt. Ben voyons, pour un petit apparatchik technocrate, bousculer l’anthropologie, inscrire un changement de civilisation dans la loi, ça n’est qu’une question de « timing » parlementaire. Si on avait été plus vite, il n’y aurait pas eu tant d’imbéciles dans la rue. Les Français ne se seraient pas intéressés à la question… On comprend que le référendum ne soit pas sa tasse de thé. Notre homme d’appareil n’est décidément pas un grand démocrate. Alors, le ton empreint d’une apparente sincérité pour évoquer l’amour de la France, la confiance nécessaire ne prend pas. Hollande a été sifflé à l’issue du premier acte. Il essaie simplement de sauver le spectacle et peut-être le rôle-titre. Le monologue qui débute le second acte est confus : on n’apprend qu’une nouvelle. Les élections départementales et régionales sont reportées. Ouf, le PS pourra encore tenir deux ans et le gouvernement échapper à un nouveau vote-sanction en 2015. Le Président a-t-il jamais quitté la rue de Solferino ?
“Ce que le Premier ministre italien a décidé en quelques semaines, notre Président y pense au bout de deux ans, mais après avoir abrogé dès son arrivée la réforme de son prédécesseur qui allait dans le même sens, la fusion des départements et des régions.”
Le reste de cette célébration en forme de contrition et de promesse se perd dans la confusion. On avait l’inversion, on aura le retournement. Cette redondance est intéressante pour les psychanalystes. L’inversion de la courbe du chômage était la pensée-phare. Elle éclairait l’avenir, et de report en renvoi, elle s’est éteinte dans la brume des chiffres tronqués et des commentaires alambiqués. Alors, le retournement, c’est un retour du refoulé, une conjuration implicite de la guigne dont le locataire de l’Elysée doit se croire poursuivi. C’est aussi un mot malheureux qui évoque tout-de-suite une veste qu’on retourne. Et c’est d’ailleurs ce qu’il fait en clamant son amour des entreprises. Du coup ses électeurs ne comprennent plus : ils ont élu un socialiste qui se révèle libéral, le crime par excellence dans notre pays. Bon, un libéral avec 57% du PIB en dépenses publiques, c’est pas banal, mais quand on a pendant dix ans d’opposition sans cesse accusé la majorité précédente de collusion avec le patronat et fustigé ses cadeaux aux riches ou son démantèlement des services publiques au point de l’inhiber, la pauvre, dans ses timides tentatives, doit-on s’étonner que le peuple de Gôche y ait cru, au socialisme ? Pendant le début du mandat, les flèches n’étaient jamais acérées contre les patrons, les propriétaires, les actionnaires. Le matraquage fiscal avait même été présenté comme une mesure de justice sociale pour garder les acquis sociaux, la retraite à 60 ans, les 35 heures, et maintenir voire augmenter le nombre des fonctionnaires. Les riches allaient payer… et les Français ont reçu deux nouvelles, une bonne et une mauvaise. La bonne, c’est qu’ils étaient nombreux à être riches. La mauvaise, c’est qu’ils allaient payer. Ils ne sont pas contents. Mais, le temps travaille pour nous. Comme les affaires s’arrangent dans les autres pays, ceux qui ont fait les réformes, voire les sacrifices, forcément, ça va arriver chez nous. Il suffit d’attendre en faisant ce que d’autres ont fait parfois depuis 25 ans, baisser les charges pour être plus compétitifs et diminuer les dépenses publiques en supprimant quelques étages du Millefeuille. Ce que le Premier ministre italien a décidé en quelques semaines, notre Président y pense au bout de deux ans, mais après avoir abrogé dès son arrivée la réforme de son prédécesseur qui allait dans le même sens, la fusion des départements et des régions.
“Comme disait Marx, lorsque l’Histoire se répète, la première fois, c’est une tragédie, la seconde une comédie…”
L’attelage exécutif est-il bien parti ? Un Premier ministre dont le bilan à l’Intérieur apparaît chaque jour plus négatif semble néanmoins jouir du soutien d’une opinion publique, ravie du changement et impressionnée par son éloquence du menton. Le Président peut donc rétablir le dialogue avec les Français, aller au devant d’eux. Il a déjà pris un bain de foule en face de l’Elysée. Quelle audace ! Pour le coup, il s’agit d’une curieuse inversion… des rôles, une tentative quasi monarchique dans le style Louis XIII-Richelieu, revu par Dumas. Et sans Reine ni Milady. Elles ont été virées. Un monarque proche et sympa, un Premier ministre actif et impérieux, pour une France à redresser. Comme disait Marx, lorsque l’Histoire se répète, la première fois, c’est une tragédie, la seconde une comédie…
14 Comments
Comments are closed.