Don Quichotte, ses speakerines et Garcimore

Tribune libre d’Alain Versedetout

La parenthèse tragi-comique des Romulus et Remus de l’UMP n’a visiblement pas suffit à masquer l’impression d’improvisation constante que nous laisse chaque jour notre gouvernement. Malgré les déconvenues, les cafouillages et les discours contradictoires qui s’accumulent ainsi qu’une réalité qui ne cesse de se faire rappeler au bon souvenir de nos dirigeants, il nous semble nécessaire de leur rendre tout de même justice, en saluant leur incroyable incapacité de rebondir et de détourner l’attention du bon peuple avec des sujets de société qui n’ont a priori rien à voir avec les urgences de notre pays.

Quand on voit la foi que mettent nos moralistes professionnels à nous ânonner des bêtises et des contresens anthropologiques qu’ils nous présentent comme le sens de l’histoire, la quintessence de la modernité, le summum de la tolérance et de l’égalité, on serait presque touché par leur naïveté, leur sincérité, voire leur romantisme.

Certaines mauvaises langues pourraient toutefois être amenées à penser qu’au contraire, ils doivent être vraiment bien mal en point pour être obligés, pour se faire apprécier, de nous resservir les vieilles recettes néo-soixanthuitardes qui ont pourtant apportées plus de désenchantement, de désillusion et d’égoïsme que de réels progrès de société. Mais ce sont surement des mauvaises langues.

À leur décharge, il est quand même nécessaire de reconnaître que les choses ne sont pas très faciles pour eux : il ne se passe pas un jour sans que les « promesses » et les jolis discours rassurant du « moi président » ne viennent se fracasser contre le mur bétonné de la réalité.

On comprend alors que tel Don quichotte, prenant de plein fouet ses propres illusions, il puisse s’entêter dans l’erreur, de peur de prendre conscience de l’impasse dans lequel il s’est fourvoyé. Comme il n’a pas vraiment le choix, il se relève et repart courageusement au combat en désignant à la vindicte populaire des ennemis imaginaires dont lui seul et ses acolytes seraient les protecteurs. Et il faut admettre qu’il en a, du courage, jour après jour, seul contre tous, à nous expliquer inlassablement que le monde est réparti entre le camp des gentils dont il a la chance de faire partie et le camp de ceux qui refusent l’égalité et la justice, qu’il est temps de faire évoluer notre civilisation pour l’amener enfin vers la lumière et qu’il en sera le guide normal.

Plus les assauts contre les moulins à vent s’avèrent catastrophiques, plus le doute s’insère dans les esprits du peuple, plus il se doit d’y croire, plus il faut avancer dans l’erreur : alors, tel un lapin sorti du chapeau d’un illusionniste, il n’a pas le choix. Il est obligé de nous ressortir de sa culotte des idées putréfiées qu’il doit nous présenter comme nouvelles, indispensables aux progrès du genre humain. C’est sans doute sa manière de se rassurer.

À la moindre manifestation d’impuissance du président face au monde réel, nous avons alors droit à un couplet supplémentaire sur l’égalité, l’unité, la justice et la tolérance. Les Don Quichotte du gouvernement sont ensuite convoqués et invités à sortir de leurs ministères afin de nous resservir, en guise d’amuse-gueule, une version édulcorée des marottes des années 70, « liberté, égalité, sexualité » « la religion opprime » « famille je te hais » « la femme est l’avenir de l’homme » « l’homme est une femme comme une autre », « la liberté sans entrave » etc.

“À la moindre manifestation d’impuissance du président face au monde réel, nous avons alors droit à un couplet supplémentaire sur l’égalité, l’unité, la justice et la tolérance.”

Aux années 70, le gouvernement actuel n’a pas seulement emprunté les slogans et les utopies libertaires, mais aussi les recettes sophistiquées que la télévision française mettait en place pour faire face aux aléas du direct et aux incidents techniques qui étaient choses courantes. À cette époque, il fallait savoir improviser en temps réel et surtout ne pas montrer qu’on naviguait à vue ; ne pas donner une impression d’amateurisme. On faisait alors appel à de jolies speakerines capables de détourner l’attention des téléspectateurs et de leur faire croire que tout était maîtrisé. La plus célèbre, Denise Fabre, avait au fil des ans, monté un duo humoristique extrêmement efficace avec le magicien Garcimore : celui-ci avait le don de faire oublier sa frustration au spectateur, en sortant de son chapeau des souris blanches, en nous proposant des tours de passe-passe apparemment ratés qui se terminaient finalement en apothéose et révélant au final son immense talent de magicien.

Comme aux heures glorieuses de la télévision, afin d’effacer de la tête du téléspectateur cet affreux sentiment d’improvisation constante, notre président semble lui aussi faire appel à ses speakerines envoyées éteindre les incendies dans l’opinion publique. Chaque couac, chaque échec, chaque tergiversation, nous donne ainsi droit, en guise d’interlude, aux gesticulations et aux incantations des speakerines du gouvernement qui viennent nous expliquer que le gouvernement fait son travail et que l’on ne doit pas s’inquiéter puisque tout est de la faute à l’autre nabot (nabot qui, au passage, à force d’être l’explication de tous les problèmes, finit au demeurant par devenir sympathique aux yeux de l’opinion publique).

Mais, lorsque le prêchi-prêcha des Denise Fabre du Redressement productif ou de l’Intérieur sensés nous montrer que les techniciens du gouvernement agissent pour le bien de tous, ne suffisent plus à calmer et rassurer le téléspectateur moyen, il devient urgent d’agir et de sortir une nouvelle fois de la trousse à pharmacie la solution ultime, les Garcimore de service, Mme Duflot et Mme Belkacem. Au moins elles, elles ne ratent pas une gaffe ou une énormité pour nous faire rire et c’est quand même moins endormant que les interludes ennuyeuses à en en mourir que sont les interviews du Premier ministre.

Et il est vrai que depuis quelques temps, nos Garcimore se surpassent en bon mots et en tour de passe-passe. Mme Duflot nous a bien fait rire en expliquant à l’Église qu’elle devait faire la charité, et la sémillante Mme Belkacem nous a encore une fois mystifié avec ses idées géniales d’imposer aux hommes le congé parental de 3 mois ou, dès la maternelle, d’empêcher les filles de jouer à des jeux de filles et interdire aux garçons de jouer au pompier, afin de lutter, dixit, « contre les violences conjugales ». Il fallait oser, et elles osent, elles. Surtout que leur argumentation qui consiste à dire que si on n’est pas d’accord avec elles, c’est par ce que l’on est qu’un affreux macho, est une ritournelle qui fait toujours son effet.

La sociologie de supermarché étant visiblement leur fonds de commerce, nous attendons avec impatience qu’elles nous proposent d’imposer la parité en matière de grossesse sous peine de suppression des allocations familiales, l’obligation pour les hommes de se mettre en congé grossesse par solidarité avec les femmes, ou pourquoi pas de leur imposer des douleurs abdominales et des nausées toutes les fins de mois, car nous le savons bien, ces lâches, quand ils peuvent se défiler, ils en profitent !

Face à des propos d’une tenue et d’un niveau intellectuel frôlant celui de l’adolescent pré-pubère justifiant un vol à l’étalage parce que la fin du monde sera pour le 21 décembre et qu’il n’y a plus de temps à perdre pour en profiter et que, d’ailleurs, ça même été dit sur Skyrock et Fun Radio, j’entends déjà les mauvais coucheurs hurler à l’imposture, à l’incompétence et dénoncer la stupidité indigne de ministres en exercice pour réclamer la démission de nos magiciennes. Qu’ils se rassurent toutefois, car, comme Garcimore qui ratait tous ses tours, elles ont elles aussi le don extraordinaire de créer le contraire de ce qu’elles veulent engendrer. Il suffit qu’elles lancent leurs idées géniales dans les gazettes pour créer dans l’opinion des réactions opposées à ce qu’elles sont censées produire.

Je conçois toutefois, qu’à la différence de nos pantins du gouvernement, M. Garcimore finissait par faire illusion, qu’il nous faisait passer de bons moments et qu’il n’avait pas en charge les affaires d’un pays. ….

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13 Comments

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  • Lach-Comte , 8 décembre 2012 @ 13 h 04 min

    Même vous, vous allez arriver à nous prouver que si les femmes qui se sont succédées dans les gouvernements et, de plus en plus, ailleurs, dont on nous disait que ça allait “changer la politique” (sic!) et tout le reste, depuis Mitterrand, sont nulles et crasses et définitivement pas à leur place, c’est à cause des hommes qui les choisissent et qu’ils font exprès de les prendre nulles et crasses pour qu’on soit dégoûté de toutes ! Faut le faire … !

  • Philippe , 8 décembre 2012 @ 16 h 46 min

    Sauf que ce regretté Garcimore, quand il loupait un tour, disant en riant: “des fois ça marche, des sois ça marche pas”. Avec nos magiciens, ils affirment sans rire, faîtes nous confiance ça marche.

    j’en rirais bien si ce n’était pas avec nos sous qu’ils jouent.

    je me souviens que notre même Garcimore avait dit un jour, après une longue absence: “Quand y é souis rentré, y é reçou oune lettre marquée : déclaration de revenous” y é répondou, oui, y é souis révénou.

  • Gérard (l'autre) , 8 décembre 2012 @ 22 h 01 min

    OUI Hille …. jusqu’au jour où ce français naïf fait une révolution !
    Et là … ça ne saurait tarder !

  • ranguin , 9 décembre 2012 @ 7 h 57 min

    Nous devons faire un constat affligent : Nous n’avons pas de véritables politiques.
    Nous élisons sur des promesses (jamais tenues) des hommes sans grandes envergures. En revanche, nous rejetons ce qui est valable.
    Nos hommes politiques (femmes aussi) sont bons à changer. Les hommes sont machistes par éducation et les femmes serviles par habitude. Il faut changer tout cela pour remettre un peu d’ordre.
    La question demeure : Sommes nous prêts ?

  • Ghalloun , 10 décembre 2012 @ 16 h 55 min

    Le pouvoir est une affaire d’hommes, en dépit de certaines exceptions remarquables. La répartition des postes de ministres aux “females” en est un signe éloquent : elles ont presque toutes des postes secondaires. Et celles qui ont les plus beaux maroquins ne brillent pas, mais alors pas du tout, par leur compétence.

  • ranguin , 10 décembre 2012 @ 18 h 10 min

    Et pour cause, nos politiques sont nuls mais pas fous. Une femme trop intelligente, et il y en a, leur ferait trop d’ombre. On remarquerait alors que si du côté de la barbe est la toute puissance il n’en est pas moins vrai que la co…..rie y règne en maître.

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