« Vous n’avez pas le droit de penser autrement. » Dans une société totalitaire, c’est ce principe qui commande toute « information » depuis la maternelle jusqu’au journal du soir. Alors, quand chez l’individu une petite voix se fait entendre qui dit : »et pourquoi je ne pourrais pas penser le contraire ? », tout espoir n’est pas perdu pour la liberté. Nous vivons un grand moment de totalitarisme mou, de cette mixture de politiquement correct et de pensée unique, qui abêtit l’Europe et la France, en particulier, depuis des années. Comment ? 56% des Français seraient hostiles à l’accueil des migrants ! Insupportable ! La machine à décérébrer s’est donc mise en marche ! Vous devez penser qu’il faut accueillir les réfugiés ! Vous devez admirer la merveilleuse Angela Merkel et les Allemands qui se mobilisent pour en loger et nourrir un million, peut-être. Vous devez condamner le méchant Victor Orban qui érige un un mur de barbelés à la frontière hongroise de l’Union Européenne et fait matraquer les migrants en gare de Budapest. Vous devez applaudir à la décision du Président Hollande de s’aligner sur l’Allemagne pour répartir les arrivants entre les pays européens.
Comment opérer ce retournement de l’opinion ? Il y a des dates dans l’Histoire où le discours d’un homme politique a fait basculer une opinion par la force et la qualité de ses arguments. C’était l’époque où la politique dans les démocraties visait encore le néo-cortex, s’adressait à la raison des citoyens, cherchait à les convaincre. Parfois, comme ce fut le cas pour les discours prophétiques, mais rationnels de de Gaule en 1940, la conquête des esprits fut longue. Que de temps perdu ! L’émotion emporte la conviction des foules avec force et plus rapidement. Une photo-choc reprise par tous les médias, à laquelle se réfèrent tous les politiques avec une voix chargée de compassion, voilà qui va renverser le courant en un éclair. Un enfant de trois ans sans vie sur une plage… Comment rester insensible ? C’est inacceptable ! Il faut ne pas avoir de coeur pour empêcher ces gens qui fuient la guerre et les persécutions de trouver refuge en Europe. Les valeurs humanistes de celle-ci la rendent coupable de ne pas les accueillir à bras ouverts. Une émotion répandue à profusion et une conclusion immédiate qui est de l’ordre du réflexe plus que de la réflexion ; un langage subtilement adapté pour véhiculer le message avec des migrants qui deviennent tous des réfugiés ; la parole donnée exclusivement aux associations favorables à l’accueil des clandestins… Et le tour est joué !
Malheureusement, il y a toujours de mauvais esprits qui raisonnent. La famille de l’enfant est de nationalité syrienne et kurde d’appartenance. Elle a quitté Damas à cause de la guerre qui déchire la Syrie, s’est réfugiée à Kobané, la ville assiégée par l’Etat islamique et a fui par la Turquie pour rejoindre sans visa le Canada, où des parents vivent déjà. La responsabilité de la Turquie est claire : elle soutient l’Etat islamique, n’a rien fait pour aider les Kurdes de Kobané, bombarde ceux qui, la fuyant, se sont réfugiés en Irak, laisse passer les djihadistes européens en Syrie, aller et retour, et n’entrave pas l’activité des passeurs entre Syrie et Grèce. De plus, elle pourrait accueillir les Kurdes puisque une partie importante de sa population est constituée de Kurdes. Mais critiquer ce membre de l’Otan serait inconvenant. D’ailleurs les 120000 Arméniens chrétiens arrivés en France après la 1ére guerre mondiale venaient déjà de Turquie… où ils avaient été persécutés, pour beaucoup massacrés, par les Turcs et par les Kurdes aussi, les uns et les autres étant musulmans. La Turquie veut la peau de Bachar Al-Assad et entretient la guerre en Syrie contre le régime, avec le soutien des Etats du Golfe, celui des USA, et le nôtre. L’Etat islamique fait régner une épouvantable terreur sur une grande partie du pays qu’il contrôle. Nous faisons semblant de lui faire la guerre et il continue d’avancer. Cette inaction hypocrite rend coupables nos dirigeants, non de ne pas accueillir les réfugiés, mais de préserver ceux qui les font fuir au lieu de les écraser. Dans un esprit de solidarité, ils tiennent à faire partager cette culpabilité à l’ensemble de la population. L’oligarchie qui, pour notre malheur, nous gouverne, des commissaires européens aux chaînes d’information en passant par nos ministres, a diffusé le même message vibrant d’émotion : il faut les accueillir. Tous ? La sinistre réputation des islamistes fait confondre la fuite d’une minorité pourchassée avec la recherche de l’eldorado où un membre de la famille, ou du village, va aider les clandestins à se fondre dans la foule. Tous les migrants ne sont pas des réfugiés.
La différence de traitement entre les images des atrocités commises par l’Etat islamique et la photo du jeune enfant sur la plage turque saute aux yeux. Il ne faut pas faire de publicité aux djihadistes, dit-on. Mais un homme décapité, brûlé vif, une femme lapidée, réduite en esclavage et vendue au marché, cela peut aussi créer de l’émotion, une émotion, guerrière celle-là, qui déclencherait dans l’opinion le désir d’un juste châtiment dont nous avons largement les moyens. Manifestement, là-haut, on n’en veut pas. Le choix de la photo, la mise en scène peut-être, sa mise à la « une » en tout cas, le concert de plaidoyers de » journalistes » qui se veulent de plus en plus directeurs de conscience n’appellent qu’un verdict : l’Europe est coupable. Au nom des valeurs européennes, avec grandeur et générosité, il faut imiter Merkel et ouvrir toutes grandes les portes. Deux questions sont oubliées : comment vont évoluer les problèmes communautaires, notamment dans les pays où le taux de chômage est important et la concurrence pour l’emploi plus vive qu’en Allemagne ? L’accueil empressé de la vague actuelle de clandestins ne va-t-elle pas en appeler d’autres : une bonne affaire pour les passeurs, et malheureusement aussi pour les photographes spécialistes en tragédies ? Une troisième surgit : à qui profite réellement le crime ?
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