La France respecte une sorte de tradition qui veut que son évolution politique ne soit pas en phase avec celle des autres pays européens, voire occidentaux. Ainsi le gaullisme a régné dans notre pays en restaurant l’idée de l’indépendance nationale alors que celle-ci s’estompait ailleurs au profit de la construction européenne et de l’Alliance atlantique. Au moment où Thatcher et Reagan entamaient une révolution conservatrice fondée sur une libéralisation de l’économie associée à une conception plus musclée de l’autorité de l’Etat, les Français amorçaient leur descente aux enfers en envoyant Mitterrand à l’Elysée et Mauroy à Matignon. Tandis que Londres privatisait, Paris nationalisait, avec un rare talent pour le contre-temps, dont nous ne nous sommes jamais remis. Nos alternances décalées ont notamment créé des couples franco-allemand originaux, tels que Giscard-Schmidt ou Mitterrand-Kohl. Cette fois encore, en raison de l’étrange scénario des élections présidentielles de l’année dernière, le Président français inattendu se trouve en décalage par rapport au mouvement majoritairement observé ailleurs. Ce n’était pas prévisible. Le désastre économique systématiquement associé à la présence de la gauche au pouvoir, la réticence de plus en plus marquée par les Français à l’encontre de la construction européenne, la montée des problèmes liés à l’immigration, et notamment le terrorisme islamiste, devaient logiquement conduire la droite au pouvoir et faire du Front National, le principal parti d’opposition. Dans la plupart des pays occidentaux, un fort mouvement populiste est monté en puissance rappelant aux gouvernants que leur priorité devait être la protection des citoyens de leurs pays respectifs, aussi bien face à la menace islamiste que face à la mondialisation, parfois face à la technocratie bruxelloise.
Dans de nombreux pays, la gauche a été balayée, et l’horizon politique s’est réduit à un duo entre deux droites, soit associées au sein de la majorité au pouvoir comme en Autriche, en Belgique, au Danemark, ou en Finlande, soit en compétition comme en Hongrie. L’Allemagne et l’Italie connaissent une poussée populiste importante. Sociologiquement, la France aurait du subir la même évolution. L’opération menée contre Fillon a permis l’élection paradoxale d’un ministre pas très ancien de François Hollande. Or, ce candidat était par son origine et ses idées aux antipodes du populisme. Sa stratégie, bien isolée dans l’Europe actuelle, l’amène à tenter de réduire le champ politique de notre pays à un duo de gauches dont l’une se fait passer pour la droite, tandis que l’autre est l’extrême-gauche. On peut même s’interroger sur un certain degré de connivence tant chacun des comparses s’acharne à tenir son rôle. Ils ont d’ailleurs un point commun évident : ce sont d’excellents comédiens qui font carrière sur la scène politique. Mélenchon possède un fonds de jeu trotskyste, mais sa vie a été celle d’un notable socialiste, député, sénateur, ministre, près de Mitterrand ou de Jospin. Entre le Président actuel et lui, les échanges prennent souvent la forme de répliques théâtrales. L’indignation est renvoyée de l’un à l’autre, avec un grand sens de la répartie. Quant à la « Fête à Macron », quel meilleur moyen de personnaliser le débat et de fédérer ceux qui n’aiment pas la gauche autour de celui qu’elle prend ainsi pour cible ? Pour Macron-Jupiter , avoir l’extrême-gauche comme opposant principal est une opportunité qu’il faudrait inventer, si elle n’existait pas. Elle le rejette à droite et draine vers lui tous les naïfs modérés ainsi que ceux qui confondent la droite et l’argent.
Fondamentalement, Macron est de gauche. Simplement, il est le produit de la gauche « progressiste » qui a remplacé le désir de justice par la liberté nomade qui détruit sur son passage les identités et les communautés enracinées. Sa politique place l’économie avant la défense des valeurs, et met en avant l’élite mondialiste, sa langue et son mode de vie. La suppression de l’ISF sur les biens mobiliers, mais non sur l’immobilier, celle de l’exit-tax sont claires : il faut favoriser les très riches qui bougent beaucoup, et s’acharner sur ceux qui ont choisi la prudence et la sécurité, et sont attachés à la transmission d’un héritage. Les premiers de cordée feront ruisseler leur réussite sur les autres… En attendant, les retraités, propriétaires, épargnants seront appelés à combler les déficits. Le vrai problème sera de définir les « autres », bénéficiaires d’une telle politique. La politique familiale a disparu. La nation est appelée à se laisser broyer dans la machine bruxelloise. L’immigration poursuivra le remplacement de population que la gesticulation législative n’ a nullement l’intention d’enrayer. Il faut toutefois remarquer que des élus « en marche », toujours socialistes, ont osé braver leur mentor sur les immigrés quand ils se taisent sur les mesures économiques et fiscales. La gauche de l’étranger et celle du fric nomade, qui fait risette aux monarchies islamistes du Golfe, ne peuvent se faire passer pour la droite. Il est grand temps que celle-ci remonte sur scène, et qu’elle prenne conscience qu’elle est grandement unie sur l’essentiel !
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