Méthodes de lecture : France-Info raconte n’importe quoi

Prétendre, comme ose le faire France-Info le 4 novembre 2013, que Marion Maréchal-Le Pen « dit faux » quand elle dénonce la France empêtrée dans les méthodes globales d’apprentissage de la lecture relève de la plus pure imposture ! À cet égard, il est intéressant de noter auprès de qui Gérald Roux, journaliste de France-Info, prend ses sources ! Entre autres « spécialistes » (sic) : Anne-Marie Chartier, « docteur en sciences de l’éducation » (tout un programme !), spécialiste (sic) des méthodes de lecture, et un psycho-linguiste, Jacques Fjalkow (encore tout un programme !), autrement dit, que des gens bien cadrés dans le système de déconstruction actuelle de l’institution scolaire.

Les textes officiels démentent l’affirmation de France-Info

Or, les textes officiels relatifs aux programmes du CP (cours préparatoire) stipulent expressément : « Au CP, l’apprentissage de la lecture passe par le décodage et l’identification des mots… », ce qui signifie, en langage « décodé », qu’il s’agit d’utiliser des méthodes de nature globale. Ce sont les seules méthodes envisagées par les instances officielles, de même que les seules contenues dans les manuels de lecture proposés au CP par l’institution scolaire.

Dénoncées par ceux qui les ont subies et par les parents d’élèves, décriées par de nombreux psychologues, orthophonistes et neurologues, elles n’en continuent pas moins d’être préconisées par les instances officielles, d’être recommandées pour ne pas dire imposées par la plupart des formateurs, conseillers pédagogiques et inspecteurs, tous fondus dans le même moule des IUFM (récemment rebaptisés Ecoles supérieures du professorat et de l’éducation) et très majoritairement pratiquées dans les écoles.

La pratique le confirme…

Certes, les méthodes purement globales ne sont plus utilisées mais les méthodes de nature globale, appelées également « semi-globales » ou « mixtes » – que les instances officielles prennent bien la précaution de ne surtout plus nommer tant leur simple évocation suscite des cris d’orfraie – sont très majoritairement utilisées et ont – hélas ! – de beaux jours devant elles pour notre plus grand malheur, celui de nos enfants et de la société tout entière. Car elles ont les mêmes effets désastreux que les méthodes globales pures et c’est par l’usage de ces méthodes que le décervelage des têtes se fait.

C’est ainsi que Rachel Boutonnet, auteur du Journal d’une institutrice clandestine, qui a « clandestinement » et courageusement fait usage de la méthode syllabique au sein de l’Education nationale après avoir subi les errements pédagogiques de l’IUFM, pratiqué les méthodes « semi-globales » et constaté les dégâts causés, affirme que les méthodes de nature globale « transforment les enfants qui pourraient être brillants, des bons élèves, des enfants vifs, en des enfants perdus qui se persuadent peu à peu d’être idiots et fichus … qu’ elles font des dégâts qui ne se révèlent pas nécessairement tout de suite chez tous les autres à des degrés divers, qu’elles touchent même ceux qui lisent bien », ajoutant : « La méthode globale sera résolument écartée quand les programmes ne parleront plus d’ “identification des mots” mais de “lecture”, que l’on ne parlera plus d’analyse mais seulement de synthèse… ».

Comment reconnaître une méthode syllabique d’une méthode de nature semi-globale ?

Des différences capitales distinguent ces deux types de méthode :

– La méthode syllabique ou alphabétique, traditionnellement utilisée dans l’institution scolaire et dont l’efficacité n’a jamais été démentie, est basée sur la logique ; elle consiste à commencer l’apprentissage de la lecture par la connaissance de la lettre – voyelle ou consonne – puis de la syllabe, ensuite du mot, pour arriver à la construction de la phrase, s’appuyant en cela sur l’apprentissage de la grammaire – analyse logique – pour déterminer la fonction des mots dans la phrase afin de bien comprendre le sens de ce qui est lu, ce qui a aussi pour conséquence de permettre de déterminer l’orthographe des mots. Il s’agit donc d’une construction qui va du simple au complexe de façon progressive, s’appuyant à chaque étape sur les acquis antérieurs, où l’enfant est amené développer une logique et à orthographier correctement.

– Les méthodes de nature globale appelées « semi-globale » ou « mixte » utilisées depuis plusieurs décennies sont responsables d’un taux de dyslexies et d’illettrisme impressionnant. Basées sur la mémoire, visuelle et auditive, elles consistent à engager un processus totalement inverse de celui de la méthode alphabétique ou syllabique, faisant mémoriser à l’enfant des phrases apprises par cœur pour les décomposer en mots – ce qui est appelé « l’identification des mots » – , puis en syllabes, pour aboutir in fine à la connaissance du code alphabétique, autrement dit des lettres, ce qui est appelé le « décodage ». Il s’agit donc, non seulement d’un processus totalement inverse de celui de la méthode alphabétique ou syllabique, mais, par surcroît, sans qu’il y ait l’apprentissage d’une logique de l’agencement des mots, ce qui altère forcément la compréhension des phrases et l’orthographe qui en résulte.

L’usage de cette dernière méthode est traître à plus d’un titre : d’une part, si l’enfant a une bonne mémoire, il peut apprendre à lire apparemment d’une façon correcte mais sans qu’il comprenne ce qu’il lit, et beaucoup de parents sont abusés par ce phénomène en disant : « Mon enfant sait lire » ; d’autre part, le processus de décomposition du mot en syllabes puis en lettres qui aboutit in fine à la connaissance du code alphabétique laisse à penser à beaucoup de parents qu’il s’agit d’une méthode syllabique et ne s’en émeuvent pas.

Or, les travaux du Dr Wettstein-Badour ont mis en évidence que la pédagogie sculpte le cerveau et conditionne le développement de la pensée conceptuelle et nous savons que l’usage des méthodes de nature globale ne permettent pas que la lecture se transforme en automatisme, entraînant un flottement des connaissances. Ordonner, structurer, restituer le savoir devient un problème, des fautes sont faites modifiant le sens des phrases et il faut du temps pour mettre en relation des connaissances « empilées » et plus ou moins confuses. De même, il devient impossible d’obtenir le maintien d’une concentration soutenue.

Cela, ceux qui nous gouvernent le savent et pourtant…

Marion Maréchal-Le Pen a raison

Marion Maréchal-Le Pen a raison de dénoncer l’engluement du système français dans la pérennisation de l’usage de ces méthodes ; elle ne le dira jamais ni assez, ni assez fort, puisque ces méthodes sont toujours utilisées, s’apparentant à de véritables lavages de cerveau qui justifient la déconstruction du système éducatif dans la mesure où les enfants deviennent ainsi incapables d’effectuer des études aussi structurantes que celles qui sont possibles pour la majorité d’entre eux avec des méthodes alphabétiques ou syllabiques.

Mais se pose la question de savoir comment les autoproclamés « spécialistes » (sic) de la lecture peuvent avoir l’outrecuidance, pour ne pas dire plus, d’affirmer que « la méthode globale n’a jamais été utilisée, seulement de manière marginale (sic) … qu’en France elle n’a pas été enseignée de manière généralisée, loin de là (sic) … qu’en France on a l’impression que la méthode a été très présente, c’est un mythe (resic) » et d’ajouter que : « l’explication se trouve peut-être dans le fait qu’on a assisté, dans les années 1960-1970, à une offensive de quelques pédagogues en faveur d’un apprentissage qui pouvait s’apparenter à la méthode globale ».

Il ne faut pas manquer d’aplomb, à moins que ces « spécialistes » aient eux-mêmes été victimes de ces méthodes et soient incapables d’analyser la réalité de la situation.

En tout cas, pour ce qui est de France-Info, c’est un faux.

> Claude Meunier-Berthelot est l’auteur de Bas les masques – De la désinformation sur l’école et est chercheuse à la Fondation Polémia.

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46 Comments

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  • tonton de la tontounette , 7 décembre 2013 @ 16 h 04 min

    et avant aussi ; la création du monstre “éducation nationale” est assez récente ; c’est depuis lors un vieux piège balisé à 100 lieux à la ronde dans lequel veulent tomber tous les gouvernements.

  • tonton de la tontounette , 7 décembre 2013 @ 16 h 09 min

    Si on pouvait prouver que ce sabotage de l’Instruction publique, de l’intelligence nationale, était l’oeuvre d’une puissance étrangère attachée à la perte de la France, ce serait un casusbelli ! peut-être faut-il chercher à qui le crime profite !

  • montecristo , 7 décembre 2013 @ 18 h 45 min

    FIFRE Jean Jacques

    Ne faites pas attention … !
    Elle ne lit QUE pour corriger les fautes !

    Votre intervention, très bien écrite, est exactement ce que tout le monde constate.

    Mais il ne s’agit même plus de savoir lire ou écrire.

    Pour les étudiants d’aujourd’hui, le coeur est dans les talons, Clovis un Evêque de l’Antiquité et Sartre un Maréchal d’Empire.
    Tout comme de Gaulle qui est un aéroport !

  • montecristo , 7 décembre 2013 @ 19 h 28 min

    Hèrvé Bazin disait :

    “Avant 68, on demandait à un étudiant ce qu’était une table et il répondait : T.A.B.L.E. … en épelant ! Après 68, il répondait : c’est une surface plane avec 4 pieds !”

    Je trouvais très bien, à l’époque, que l’on ait voulu développer le sens journalistique, d’observation, de déduction, d’analyse …. etc

    Rappelez vous ! ! !

    Le temps du prof qui assénait son cours en disant “c’est comme ça et pas autrement” … était révolu.

    Cela partait, me semblait-il, de bonnes intentions. Qui, malheureusement, ne dureront pas.

    Et … je ne pensais pas que les étudiants d’aujourd’hui ne sauraient plus écrire une TABLE sans faire de fautes.

    En changeant les idées, il fallait sans doute conserver les “méthodes”.

    Mais ce siècle est celui des apprentis sorciers … dans tous les domaines !

  • Alma , 8 décembre 2013 @ 16 h 21 min

    Bien sûr, qu’il y a un fondement scientifique! C’est ce que Mme Wettstein-Badour a révélé en appuyant son études des méthodes de lecture sur l’IRM. L’imagerie médicale a parfaitement montré comment fonctionne le cerveau lorsque l’on utilise telle ou telle méthode… Selon la méthode utilisée, c’est l’un ou l’autre hémisphère qui fonctionne et cela ne développe pas les mêmes capacités. Après, comme le cerveau est un organe très complexe, chez certaines personnes, il “compensera” de lui-même les lacunes de la méthode utilisée. Cela dépend de l’inné de chacun.

    Mme W-B était neurologue et ses études sur les méthodes de lecture étaient à la pointe de la modernité, puisqu’utilisant l’IRM… Malgré cela, “on” a refusé de l’écouter lors des nombreuses démarches qu’elle a effectuées aux différents échelons administratifs de l’EN.

  • Alma , 8 décembre 2013 @ 16 h 23 min

    …son étude… bien sûr!

  • Sacha , 9 décembre 2013 @ 9 h 16 min

    L’IRM indique quelles régions sont concernées, mais n’indiquent absolument pas COMMENT elles fonctionnent. Or si vous regardez de près certains résultats d’IRM, vous constaterez que sont concernées simultanément deux zones principales : celles (en fait elles sont deux : Broca et Wernicke) et la zone occipitale plus concernée, elle, par la vision. Mais les expériences prouvent que s’activent également des zones plus diffuses et encore mal connues, mais dont on sait que la lésion entraîne des apraxies et des atechnies (donc que l’analyse technique, en outil, est concernée).
    Et c’est tout ! Et c’est beaucoup aussi : car si l’on ne se contente pas de gloser sur des résultats empiriques (en prétendant justifier des méthodes d’apprentissage par des coïncidences), en procédant au contraire par élaboration d’un modèles explicatif dérivé d’une véritable théorisation de l’écriture, on constate justement que le modèle de la double analyse (linguistique + technique) pourrait expliquer ces “illuminations” (artefacts !) cérébrales révélées par l’IRM.
    Ce que je vous dis là, vous ne le trouverez pas dans Wikipédia (source d’informations douteuses), mais dans une presse extrêmement spécialisée. J’y ai travaillé des années durant, personnellement. Ma conclusion, et celle de l’équipe, est qu’il ne peut y avoir de “zones de la lecture” dans le cerveau, et encore moins de “zones des méthodes” Du reste, il y a désaccord entre les neurosciences et la neurologie sur l’existence de localisations cérébrales fixes. Mais c’est une autre histoire.
    Je maintiens donc ce que je dis : aucune méthode d’apprentissage ne peut se targuer de scientificité. Il ne s’agit-là que de pragmatique socialement marquée, rien de plus.
    Je suggérais plus haut que ces recherches étaient confidentielles; elles le demeurent, mais en fait, un neurologue, O. Sabouraud (aujourd’hui décédé, mais que j’ai rencontré) a publié en 1995, chez Odile Jacob, un ouvrage, “Le langage et ses maux”. La lecture du chapitre XV est très éclairante.

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