Ce n’est pas l’explosion mais l’implosion qui menace l’UMP. Un parti explose lorsque ses sensibilités ne se supportent plus, lorsque ses tendances deviennent contradictoires, lorsque ses chefs s’opposent, suivis de soutiens prêts à en découdre. Ce n’est pas le spectacle qu’offre l’Union pour un Mouvement Populaire. A sa tête, il y a un Président qui comptait revenir en sauveur et gagner les primaires en vue des présidentielles, comme à la parade. Or, le retour est loin d’être triomphal. Les sondages ne décollent pas, comme si le magicien talentueux de 2007 avait perdu la main. A peine est-il revenu pour tirer le pays du désastre après avoir sauvé son parti du marasme, que le pouvoir socialiste se refait une santé en s’offrant le luxe de l’inviter au troisième rang de la fête, et qu’à la première législative partielle, l’UMP est éliminée alors qu’elle en avait gagné douze avant son retour. Le chef ne devait pas avoir de rival, et voilà qu’avec la déférence hypocrite que l’on doit à un pouvoir légal un peu fragile, on conteste les positions de celui-ci, en douceur certes, mais efficacement puisque la motion du « patron » a été mise en minorité. S’agissant de l’option du parti pour le second tour de la législative qui a vu son candidat éliminé, Juppé veut faire barrage au Front National en votant pour le candidat socialiste. Fillon s’en tient au ni-ni. S’essayant à la synthèse, entre deux conférences dans les émirats pétroliers, Nicolas Sarkozy voulait laisser les militants et sympathisants UMP voter comme ils voulaient… sauf pour le FN. Raté !
Cette cacophonie est riche d’enseignements. Depuis longtemps, et déjà lorsque j’en étais membre, j’ai dénoncé le vide sidéral de ce mouvement qui veut le pouvoir, présente des candidats, mais qui arrivé aux « affaires » n’a pas de ligne de gouvernance claire, pas plus que ne sont claires les idées de ses élus. Manifestement l’appétit du pouvoir et les ambitions de carrière ont tué le reste, c’est-à-dire les valeurs et les projets qui doivent animer la politique. La France est confrontée à des périls angoissants. La montée du chômage qui devrait cesser avec la baisse du pétrole et de l’Euro et non en raison des réformes que ses gouvernements auront été incapables d’entreprendre, la multiplication des conflits à l’est de l’Europe, au Moyen-Orient, en Afrique, la menace du terrorisme sur notre territoire au sein d’une population qui y vit en crachant sa haine de la France, le recul des performances de notre système éducatif, l’échec manifeste de la politique du logement, les dysfonctionnements de notre justice sont autant de signes inquiétants qui témoignent de l’insuffisance de ceux qui ont dirigé et dirigent notre pays. La responsabilité de la gauche dans cette débâcle est immense, mais l’incapacité de la « droite » à abolir les lois suicidaires et à remonter la pente grâce à des réformes courageuses a fait d’elle la complice du déclin.
Alors que l’exécutif multiplie les prises de parole et les annonces en se réclamant d’un « esprit du 11 Janvier » illusoire qui a transformé un échec en succès, les « politicards » de l’UMP, très contents d’eux, comme toujours, vont se trémousser dans les couloirs de leur siège pour savoir s’ils soutiennent ou non le PS dans une législative partielle ! Evidemment, ils n’étaient pas d’accord entre eux et sont fiers comme des adolescents boutonneux, d’avoir eu un débat, comme si c’était, pour eux aussi, la première fois. On préférerait qu’ils débattent des vrais problèmes du pays. Malheureusement les questions qui se posent à eux sont d’un autre ordre : comment se positionner pour être LE candidat aux présidentielles ? De quel candidat faut-il baiser les babouches pour être grand vizir ou faire partie du sérail ? Pour le reste, ils ne sont d’accord sur rien, soit parce qu’ils n’ont pas eu le temps d’y penser, soit parce qu’européens ou souverainistes, écolos ou productivistes, libéraux ou dirigistes, progressistes ou conservateurs, laïcards ou cathos, atlantistes ou pro-russes, amis ou ennemis des « petits blonds », ils ne forment plus un parti avec quelques lignes solides, mais une sorte de grand magasin de la politique où il y en a pour tous les goûts aux différents rayons. Le comble, c’est qu’aujourd’hui, le PS avec ses thèmes récurrents et ses deux grandes sensibilités, idéologique ou pragmatique, semble, comme on dit, plus lisible.
L’élection législative partielle du Doubs ne peut justifier de barrage anti-Front National. Qu’il y ait trois députés de cette formation sur 577 est légitime par rapport à ses scores nationaux. Brandir cet argument relève du positionnement tactique en vue d’autres échéances. Sarkozy, qui ne peut plus siphonner, en « buissonnant », le FN désormais fidélisé, se replie sur l’option centriste que Juppé occupe déjà, côté gauche. Fillon refait surface en gardien du temple « ni-ni ». Non seulement, ce ballet des postures est malhonnête, mais en plus il accrédite la connivence UMPS. En fait, le duel franc-comtois est intéressant puisqu’il confronte des lignes politiques clairement opposées. L’Euro et l’Europe fédérale contre le souverainisme, l’immigration et le multiculturalisme contre l’identité à l’abri des frontières, un Etat-providence mâtinée d’une pincée de libéralisme contre un Etat renforcé et dirigiste. L’UMP serait bien en peine d’offrir un choix aussi clair. Née de l’union entre les gaullistes, les démocrates-chrétiens et les libéraux, elle pourrait, elle-aussi, enrichir le débat en étant fidèle aux idées qui l’ont fondée : au patriotisme des premiers, elle associerait l’idée d’une construction spirituelle de l’Europe, fondée sur ses valeurs chrétiennes, et défendrait l’idée d’un Etat libéral, tout en muscles pour la sécurité, mais soucieux de préserver la liberté et le dynamisme de la société civile en réduisant la fiscalité et la réglementation. Mais la fidélité est-elle dans l’ADN de l’UMP ? On peut en douter !
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