Une France trop aidée ?

À en juger par l’actualité récente, et la déferlante de Bonnets-Rouges bretons, la France renoue cet hiver avec les ébullitions régulières qui l’agitent de temps en temps. Cette fois-ci, les mouvements de grogne ne prennent pas naissance dans le service public et ne sont pas alimentés par des syndicats orfèvres de l’immobilisme calculé, ce qui donne une dimension différente à ce qu’on observe : les politiciens semblent un peu perdus, tant dans la majorité que dans l’opposition, pour gérer ou tenter de récupérer ces mouvements.

Et les hésitations des uns et des autres devant ces protestations fiscales s’expliquent notamment par le rapprochement difficilement miscible de revendications contradictoires ; d’un côté, il semble évident que ces manifestations se basent sur un ras-le-bol fiscal que les dénégations des petits journaux de la gauche n’ont aucun succès à discréditer. Oui, à l’évidence, le peuple en a assez de se faire tondre, surtout qu’en face s’accumulent les résultats pathétiques voire catastrophiques, en plus de dettes gigantesques que rien, dans la situation actuelle, ne permet de justifier réellement. D’un autre côté, on ne peut s’empêcher de noter les revendications, moins audibles mais bien présentes, d’une continuité des subventions qui arrosent assez généreusement la Bretagne.

 

Si le message de grogne fiscale est parfaitement compréhensible, celui d’une conservation des subventions l’est nettement moins : pour redistribuer, il faut d’abord aller ponctionner, et dans ce cadre, cette grogne comme beaucoup d’autres montre qu’elle comprend au moins une part de revendications purement catégorielles et qui échappe au bon sens économique. Il semble logique d’accompagner la baisse de la pression fiscale, la baisse de la ponction, d’une baisse proportionnelle de la redistribution. Ce raisonnement, peu semblent prêt à le faire ou, tout du moins, à le revendiquer haut et fort.

Pourtant, il y aurait tant à y gagner !

En effet, depuis des décennies de collectivisme plus ou moins discret, depuis le basculement de l’État français dans la redistribution tous azimuts, le peuple français s’est clairement habitué à l’idée que sans celle-ci, le pays sombrerait dans le chaos. En cela, il aura été fort bien aidé par une classe de politiciens de plus en plus médiocres et démagogues, qui, dans le seul but de conserver ses prébendes, avantages et postes lucratifs, aura brossé le peuple dans le sens du poil, celui qui ne grattouille pas et ne remet en rien ses conceptions pourtant fausses.

Bercé dans l’illusion que cette redistribution, toujours croissante, pourrait fonctionner quoi qu’il arrive, toute une génération de Français s’est faite à l’idée qu’il en serait ainsi ad vitam aeternam : retraite, assurance santé, protection contre le chômage, aides de plus en plus nombreuses pour tous les petits et gros tracas de la vie, politique extrêmement accommodante de distribution de l’argent des autres (les riches ou les générations à venir, peu importe). D’années en années s’est alors instauré l’idée que sans ces milliers de béquilles, le peuple tomberait, s’effondrerait, perclus de douleurs, de bleus et de ces horions infligés par, tour à tour, le (méchant) patronat, le (vilain) libéralisme, la mondialisation (ignoble) ou le capitalisme aussi triomphant qu’horrible, apatride et cosmopolite.

Et chaque jour, chaque mois, chaque année qui passent voient se multiplier les politiciens qui, ayant rangé leurs gonades dans un placard poussiéreux d’un autre siècle, abondent dans ce sens. Tous se bousculent au portillon, prétendant avoir la bonne solution pour aider toujours plus de personnes, pour assister toujours plus de malheureux, pour protéger toujours plus de misérables et de nécessiteux.

Et plus ils « aident », plus il y en a.

Mais le peuple français a-t-il tant besoin d’aide ?

La France, cet hexagone aux paysages magnifiques, à trois façades maritimes, au centre de l’un des endroits les plus densément peuplés et les plus riches du monde, aux infrastructures routières nombreuses et bien entretenues, au réseau ferré développé, qui ne manque ni d’eau, ni de soleil, ni de terres arables, parcouru par des milliers kilomètres de fibre optique qui la placent dans les pays les mieux dotés en matière de télécoms, ce pays qui dispose d’une population vigoureuse et nombreuse, qui sait produire tant de richesses, ce pays a-t-il vraiment besoin de toutes ces aides ?

Où est passé le peuple qui vit naître sur son sol des individus comme les frères Lumières, les Blériot, Michelin, Foucault, Eiffel ou Pasteur, qui révolutionnèrent le monde par leurs inventions et dont les bienfaits sont encore palpables aujourd’hui ? Pourquoi un peuple qui découvrit le PVC, inventa l’aspirine, le tube au néon ou le béton précontraint devrait voir dans l’avenir une telle menace au point de se recouvrir d’un gros maquis d’aides et de redistribution, couvertures si épaisses qu’on ne peut s’empêcher maintenant de les comparer à un linceul ?

Qu’est devenue la patrie de Bastiat dont les écrits sont connus dans le monde entier mais soigneusement ignorés ici ? Qu’est donc devenu ce pays qui réussit à produire, en 1789, une Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen qui servit et sert encore de référence en matière de droits essentiels ? Où est passée la vigueur et le courage de ce peuple qui découvrit la moitié de ce qui allait devenir les États-Unis et le Canada, qui, il y a moins de deux siècles, tutoyait le premier empire mondial ?

Anesthésié par des décennies de confort aussi doucereux qu’artificiel issu d’un collectivisme de plus en plus intrusif, et de la création d’une dette colossale, le peuple a oublié qu’il n’a, en réalité, jamais eu besoin de ces tombereaux d’aides et de béquilles, de ces tonneaux de moraline épaisse et gluante qui l’empêchent à présent de progresser. Toujours plus replié sur lui-même, regardant avec obstination vers le passé, tremblant de peur à l’idée de se projeter dans l’avenir, il a laissé les clefs du pays à une clique de parasites politiques, syndicalistes et corporatistes qui se sont empressés de piller tout ce qu’il y avait à piller.

Comment s’étonner du discours de la vermine lorsqu’enfin, le peuple se réveille un peu de sa léthargie comateuse et demande des comptes : « Tout ceci n’est pas sérieux, si vous protestez contre les ponctions, c’est que vous protestez contre le vivre-ensemble, voyons, contre toutes ces douces protections qu’on a mis en place pour vous ! Demander à réduire la taille de l’État, non, ce n’est pas diminuer la ponction, ce n’est pas réduire les gabegies, les gaspillages, les avantages iniques d’une petite clique de prébendiers, c’est, bien sûr, diminuer le coton moelleux des hôpitaux, le capitonnage précieux du chômage, la protection douillette et indispensable d’une retraite bien méritée, assurément ! »

 

Pas étonnant que le peuple sente monter l’explosion sociale ! Qui les écoute ? Qui, dans le spectre politique, ne s’en tient pas à des solutions d’exclusion, de repli, d’abandon, de distribution de bonbons ? Qui est capable de susciter l’espoir ? Qui regarde vers l’avenir et abandonne l’idée d’un État protecteur tous azimuts pour qu’enfin puissent s’exprimer les formidables ressources qui sommeillent dans les individus de ce peuple qui a montré, pendant des dizaines de siècles, qu’il sait relever tant de défis ?

Qui est capable de dire : oubliez l’État, oubliez le socialisme, oubliez cette sécurité chimérique que vous n’avez jamais eu et que vous n’aurez jamais ?

Et maintenant, qui aura le courage de dire « Faites-vous confiance ! » ?

> h16 anime le blog hashtable. Il est l’auteur de Égalité taxes bisous.

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22 Comments

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  • 0 / 10
  • xrayzoulou , 5 décembre 2013 @ 18 h 23 min

    Les banques se paient largement sur nous, si on a beaucoup d’argent, ils déroulent le tapis rouge, sinon, comme moi on a pas grand chose, ils disent on vous rappellera et on attend !!!!! Gouvernement, banques, retraités chapeaux combien donnent-on à ces gens. Ne parlons pas des immigrés qui ont droit à tout, s’ils sont antifrançais. Je suis sûre que dans peu de temps (laissons passer la trêve des confiseurs et la bombe explosera et ce ne sera pas une bombe glacée. Que toute cette racaille disparaisse, et qu’enfin nous ayons des hommes d’honneur pour nous gouverner pourquoi pas Louis XX ? car on nourrie un tas de cochons qui nous coûte très chers.

  • olivier , 5 décembre 2013 @ 19 h 38 min

    Il faut supprimer toutes les subventions. La subvention, c’est l’asservissement du subventionné et du contribuable. L’oligarchie l’a bien compris qui s’achète une clientèle électorale et des assujettis.
    Ronald Reagan : “la pire phrase que vous pouvez entendre est celle-ci : je suis membre du gouvernement et je viens vous aider”

  • Aristote , 6 décembre 2013 @ 9 h 19 min

    La Bretagne ne demande pas tellement des subventions ( cela c’est la réponse du gouvernement qui ne satisfait pas les Bonnets Rouges) . Elle demande des privilèges et une autonomie relative , moins couteuse pour l’ Etat .
    Bref elle demande de la subsidiarité , principe qui pourrait d’ailleurs être bénéfique dans de nombreux autres domaines .
    Ce n’est pas non plus une revendication individualiste , elle est portée par la province en tant que telle . Il s’agit de reconnaître des communautés réelles ( pas au sens du communautarisme individualiste) entre l’ Etat et l’individu .
    Le socialisme comme le jacobinisme ou le libéralisme individualiste ne peuvent ni ne veulent supporter cela .

  • MarcS , 6 décembre 2013 @ 10 h 47 min

    Les plus choyés par les politiques et qui coûtent le plus cher à la nation sont les fonctionnaires et assimilés (EDF, SNCF, agents des collectivités….), mais les autres sont tellement aveuglés par leurs problèmes qu’ils ne voient pas ces inégalités criantes et quand ils les voient ce qui est de plus en plus fréquent… ils décident d’être eux aussi fonctionnaires, c’est logique (c’est le cas de 76% des jeunes arrivant dans la vie active d’après un récent sondage).
    La fin logique de cette situation sera donc l’avènement du communisme ou autrement dit :la misère pour tous (sauf pour les apparatchiks).

  • xtemps , 6 décembre 2013 @ 13 h 45 min

    Et bien rentrez chez vous et fermez les volets,comment croyez vous que la France a été faite,si avec de tel propos que vous tenez,mais la France n’aurait plus existé depuis longtemps.
    Regagniez votre confiance en vous même,c’est regagner la France,la France a toujours eu des défis pour exister comme pour tous les peuples sur terre.

  • Delaye , 6 décembre 2013 @ 13 h 52 min

    à JL75. Ce torchon bolchevique que personne ne lit devrait être payé par les communistes et leur cgt avec l’argent volé depuis des décénies dans les caisses des organismes où ils se sont infiltrés, et pour lequel ils ne seront jamais condamnés, en dépit des constatations de la Cour des Comptes et du rapport Peruchon (pas sûre de l’orthographe)

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