par Hubert Montmirail*
On ne le dit pas ouvertement, mais l’atmosphère est à la prudence au Gouvernement. Prudence évidemment dans le ton adopté : les ministres font profil bas. En séance publique, au Sénat, ils défendent une optique minimale. Ce jeudi 4 avril, ils ont été peu enthousiastes. Si peu que l’on se demande où sont passées les envolées du mois de février… Les parlementaires de gauche essayent de rappeler aux ministres qu’ils ne doivent pas reculer. Un signe ? Peut-être. Prudence aussi dans la portée du dispositif que l’on veut instaurer. Exit la GPA ou la PMA, repoussée au motif que ce n’est pas l’objet du projet de loi Taubira. La réalité est bien là : comme la saisine du Comité national d’éthique, il s’agit bien de portes de sortie. Certes solennelles et apparemment objectives, mais bien commodes pour éviter de s’aventurer dans des sentiers douteux.
François Hollande est conscient de l’impopularité du projet de loi en question ; il sait que les manifestations ont été tout, sauf dérisoires ; il se rend enfin compte que les Français ne sont pas emballés. C’est le moins qu’on puisse dire. Mieux : le président de la République sait que les ministres, dans leur déplacement, rencontrent ces Français excédés, jusque là silencieux, mais bien déterminés à se faire entendre depuis le 24 mars dernier. Ils se rendent compte que les simples citoyens se contrefoutent des promesses sociétales. Au fond, ils ont peur de voir les années à venir ternies par ces manifestants excédés. Sont-ils prêts à endurer tout cela ? Il y a bien un après 24 mars, et ce peu importe les divergences entre les organisateurs de la Manif pour tous ou les récriminations de Civitas. Au fond, cette opposition d’une partie notable du pays n’a pas besoin de chef identifiable. Bien au contraire, cette relative dispersion démontre que le refus du mariage dit pour tous est un mouvement profond. Un mouvement aussi profond que la désagrégation de ces 40 dernières années…
Alors que les perspectives économiques et financières s’avèrent inquiétantes, le mariage homosexuel ressemble de plus en plus à de l’enfumage. Comment des hommes de gauche, quelquefois lucides, ont-ils pu tomber dans un panneau aussi grossier ? Quand on fait du sociétal, c’est simplement parce que l’on sait que la politique de rigueur devient la seule politique. C’est parce que l’horizon quotidien devient sombre : il faut donc faire diversion. C’est un signe évident de faiblesse.
Et puis il y a cette inquiétante conjonction : la menace qui pèse, par exemple, sur le budget des armées. Or, s’il est raboté, il est sûr que les militaires apprécieront peu. Ils ont beau être les silencieux de la grande muette, mais ils ne veulent pas participer au sabordage de leur armée. Peut-on imaginer que François Hollande continue dans un climat aussi sensible ? Ici et là, le président de la République rencontrera des Français en colère. Avec une aussi faible cote de popularité, une panique consécutive à l’affaire Cahuzac ou une suspicion généralisée sur les hommes politiques, François Hollande sait qu’il manie un cocktail explosif qui risque de griller son quinquennat. Peut-il se permettre de consumer les 4 années restantes de son mandat ? Surtout lorsqu’il ne dispose plus d’un quelconque parapluie primo-ministériel. Parce que le quinquennat pousse le Président à davantage s’engager à travers des propositions, il peut aussi conduire le chef de l’État à dénouer la situation en écartant un projet de loi aussi dangereux et incertain pour son autorité. Monsieur le Président, vous n’osez pas le dire, ni même le faire comprendre, mais cela sent peut-être le recul !
*Hubert Montmirail est collaborateur d’élu.
36 Comments
Comments are closed.