Tribune libre d’Henri Dubreuil*
C’est l’histoire de 800 000 soldats partis à la guerre, l’espoir de la victoire chevillé au corps, pour défendre valeurs et bon sens face à un ennemi belliqueux et fourbe. Ces 800 000 soldats arrivent un matin au pied d’une cité fortifiée pour affronter cet adversaire et le contraindre à la reddition. Ni le courage, ni l’entraide, ni la détermination ne leur font défaut. Pourtant, rapidement, malgré leur nombre, ils sont inexorablement refoulés. Quelques groupes isolés parviennent bien à harceler l’ennemi, mais la victoire totale tant espérée n’est pas là.
« Mais pourquoi donc sommes-nous incapables de vaincre », s’écrie désespéré un soldat. Alors un vieux gradé, fatigué, de lui répondre.
« Regarde mon ami. Ouvre tes yeux et sors de ta naïveté touchante. Tu es parti au combat plein de morgue. Mais as-tu songé un instant que le nombre ne fait pas tout ? Regarde comme nos troupes sont désorganisées. Regarde comme elles sont divisées sur la tactique à suivre et le meilleur chemin à prendre pour attaquer l’ennemi. Regarde comme notre intendance est déficiente. Déjà, notre artillerie manque de poudre. Nos fantassins de munitions. Nos cavaliers de chevaux. Regarde la nourriture qui s’épuise et l’eau qui fait défaut. Mais contemple surtout le doute qui commence à étouffer nos propres troupes.
En face, l’ennemi est indomptable car il est organisé et fort d’une logistique imparable. Il peut tenir un siège. Il sait que nous nous épuiserons à force d’attaquer de la sorte. »
Cette histoire n’est ni un conte pour enfant, ni le récit de la bataille de Waterloo, ni même une leçon militaire. Elle est simplement le reflet de ce que fut la grande manifestation contre le mariage pour tous.
La mobilisation fut massive. La volonté des participants fut totale. Le succès fut réel. Pourtant, rien ne freinera le train fou du mariage gay ! Le dimanche 13 janvier, une grande partie du peuple de France a dit « non ». Mais ce dimanche, il s’est aussi heurté de plein fouet à sa touchante naïveté. Il est impossible d’arrêter en une journée un sens de l’histoire en marche depuis plus de deux siècles. Et ce sens de l’histoire inscrit désormais le mariage pour tous à son programme. Ainsi, les amendements de l’opposition sont inexorablement repoussés. Les articles du projet de loi sont mécaniquement adoptés.
Car ce sens de l’histoire a fait des valeurs chrétiennes et humanistes son premier adversaire. Mais il a étendu son combat bien au-delà. Il défend la dénaturation complète de l’homme, l’asservissement individuel, la disparition des références culturelles, l’éclatement des structures traditionnelles, la mondialisation (celle à marche forcée) et la réécriture du passé !
“Il est impossible d’arrêter en une journée un sens de l’histoire en marche depuis plus de deux siècles.”
Nous avons laissé ce sens de l’histoire envahir les médias, l’école, la culture, la politique et même la rue. Nous lui avons laissé déterminer ce qui était bon et mauvais, ce qui était moral et immoral, ce qui était permis et interdit, ce qui était progressiste et réactionnaire.
Ce sens de l’histoire avance inexorablement dans tous les domaines. Contemplons par exemple les évolutions sociétales de ces dernières décennies avec le divorce généralisé, la contraception plébiscitée, l’avortement légalisé (puis l’allongement progressif de sa durée légale et son remboursement désormais intégral), l’eugénisme toléré – avec l’IMG qui, jumelé au dépistage anténatal de la trisomie 21 obligatoirement proposé à toute femme enceinte, conduit à l’élimination de 96% des enfants à naître déclarés atteints de cette maladie – le PaCS institutionnalisé ou encore la théorie du genre enseignée. Désormais, c’est le mariage gay et l’euthanasie qui pointent leur nez. Demain, ce sera le tour de la polygamie (polyandrie et polygynie), de la zoophilie, de l’eugénisme vulgarisé, de la procréation médicalement assistée, de la gestation pour autrui et même du clonage. Voilà ce que ce sens de l’histoire nous réserve. Construire un homme neuf, artificiel, détaché de son environnement naturel, sans référence familiale, désorienté et donc bien plus facilement manipulable et servile.
Tout le mensonge de ce sens de l’histoire est de faire croire au progrès. En réalité, nous sortons de l’ère judéo-chrétienne pour nous replonger vingt siècles en arrière. Notre nouvelle société postchrétienne est le reflet des civilisations païennes de l’Antiquité où régnait une totale désacralisation de la vie, la loi du plus fort et l’absence de tout respect de la dignité humaine.
Évidemment, je les entends les défenseurs de ce projet ubuesque et les moqueurs en tout genre. Ce type est fou, stupide, haineux ! Comment peut-il écrire des bêtises pareilles ? Jamais nous ne construirons une telle société !
Vous avez raison, jamais nous ne construirons une telle société. Nous la construisons déjà ! Et vous le savez très bien, mesdames et messieurs les censeurs et autres moralistes. Car les promesses des défenseurs du mariage gay de s’arrêter à cette revendication n’ont absolument aucune crédibilité au regard de l’histoire écoulée. La politique des petits pas permettra lentement mais sûrement de faire voter demain toutes ces lois scélérates. Et malheureusement, l’esprit humain est si faible qu’il s’habitue progressivement au pire.
Mais plutôt qu’un long discours qui échouerait à vous convaincre de votre vilenie, je vous laisse méditer cette déclaration prononcée le 9 octobre 1998 par le Garde des Sceaux du Gouvernement Jospin, Madame Elisabeth Guigou, lors du débat à l’Assemblée National sur la proposition de loi instaurant le PaCS.
« Le PaCS est radicalement différent du mariage parce qu’il n’est pas question, ni aujourd’hui, ni demain, que deux personnes physiques du même sexe, quelque soit leur sexe, puissent se marier. Comme l’a dit la Commission européenne des droits de l’homme de Strasbourg, je cite, « ce serait une dénaturation du mariage et de sa fin sociale que des personnes, dont la catégorie sexuelle emporte par elle-même la constatation d’une inaptitude physique à procréer, puissent se marier. » »
*Henri Dubreuil est diplômé en économie et en finance.
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