Christophe Colomb, navigateur italien au service des monarques catholiques espagnols Isabelle de Castille et Ferdinand d’Aragon et ses hommes ont-ils été les premiers explorateurs à fouler le sol du Nouveau Monde, le 12 octobre 1492 ?
Non, répond le Président de la Turquie Tayyip Erdogan. Dans un discours délirant, prononcé le 15 novembre lors d’une rencontre avec des organisations musulmanes d’Amérique du Sud, le Chef d’Etat turque a expliqué que « des navigateurs musulmans sont arrivés en Amérique en 1178 » et que « Christophe Colomb avait aperçu une mosquée » en croisant le long des côtes cubaines, ce qui constitue la preuve selon Erdogan, que « l’islam était largement répandu en Amérique avant l’arrivée des premiers navigateurs européens en 1492 ».
Le président turque a repris la thèse d’un historien de réputation douteuse, Youssef Mroueh, qui a publié en 1996 un article affirmant que des musulmans avaient colonisé l’Amérique trois siècles avant l’arrivée des chrétiens. Les colons européens auraient ensuite détruit les moquées et soigneusement dissimulé toute trace traces d’un passé glorieux de l’islam sur la terre d’Amérique. A l’appui de sa thèse, Mroueh cite le journal de Christophe Colomb. Le célèbre navigateur aurait aperçu une mosquée au sommet d’une montagne à Cuba.
En réalité, comme l’admet la quasi-totalité des historiens, il ne s’agit que d’une métaphore poétique de Colomb, qui s’est servi de cette image en décrivant la beauté des rivages cubains. Quelques pseudo-chercheurs musulmans se sont emparés de cette citation pour forger de toute pièce un mythe destiné à glorifier l’islam. Aucune découverte archéologique n’apporte le début d’une preuve à l’appui de telles affirmations.
La chose aurait pu faire sourire et rester anecdotique, si la théorie de l’Amérique précolombienne musulmane n’avait pas été reprise par le président d’un Etat faisant partie de l’OTAN et ayant la prétention de rejoindre l’Union européenne.
Dans son discours, Erdogan a comparé ensuite le christianisme à l’islam. Contrairement au christianisme, « convertir les gens par la force et par l’épée n’a jamais fait partie de l’islam » a-t-il déclaré. « Notre religion n’a jamais été un outil d’exploitation » a affirmé le président de Turquie.
C’est, sans doute, la raison pour laquelle la Turquie d’Erdogan est devenue un véritable pays de transit pour les djihadistes. Les candidats au djihad, cherchant à rejoindre les bandes terroristes de l’Etat Islamique profitent visiblement d’une discrète complaisance des autorités turques.
En revanche, la Turquie a refusé de porter toute assistance aux combattants kurdes à Kobani, assiégée par des terroristes de l’Etat Islamique. En même temps, l’armée turque empêche des Kurdes de Turquie de passer la frontière pour se porter au secours de Kobani.
Cette Turquie, complaisante vis-à-vis des djihadistes, et dont le président soutient publiquement des mensonges historiques grotesques forgés pour la gloire de l’islam, est censée être notre allié, et même plus que ça : notre futur ami et partenaire au sein de l’Union européenne ! Elle fait partie, avec la France et d’autres pays occidentaux, de la « coalition » américaine destinée à combattre l’Etat islamique. Tout comme l’Arabie Saoudite réputée pour son rôle de sponsor du terrorisme islamique. Un véritable jeu de dupes.
On a du mal à voir l’intérêt de la France dans ce jeu trouble mené par les Etats-Unis, fondé sur des alliances contre nature, des mensonges, des faux semblants et des stratégies douteuses, voire l’absence d’une véritable stratégie contre l’EI. On prend le parti des sunnites contre les chiites pour avoir accès à leur pétrole ? Mais aujourd’hui, il y a du pétrole et du gaz partout, il y en à profusion aux Etats-Unis et en Russie. Encore, faut-il savoir choisir ses alliances et ne pas se laisser mener par le bout du nez. Faute de quoi, on risque de devenir le dindon de la farce.
Le mot de Voltaire reste aujourd’hui singulièrement d’actualité : « mon Dieu, gardez-moi de mes amis !».
Post-scriptum. L’« affaire » du discours du président Erdogan sur la découverte de l’Amérique a suscité pas mal de réactions dans la presse anglo-saxonne. Elle a été largement ignorée dans la plupart des pays européens. La page YouTube qui hébergeait la vidéo de cette prestation du président turque a été fermée il y a quelques jours.
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