Cachez cette crèche que sainte laïcité ne saurait tolérer ! Voilà en somme le message adressé par les militants de la libre pensée à ceux qui installent la Sainte Famille dans l’espace public. On frémit à l’idée de ce qu’ils exigeraient s’ils défendaient une pensée moins libre… Le tribunal administratif de Nantes a obtempéré et contraint le Conseil Général à démonter « le symbole religieux » de son hôtel administratif soumis à l’obligation de neutralité. Pendant ce temps, d’ex-femen se sont attaquées à la crèche de la Place de Bruxelles. Déguisées en policiers, elles ont enlevé le « petit Jésus », bastonné copieusement la Vierge Marie, et délogé toute la famille. On s’interroge sur ce qu’il adviendra de la Crèche de la Mairie de Béziers promise par le sulfureux Robert Ménard. Toutefois, une crèche qui sent le souffre, c’est quand même bizarre…
Rien n’illustre, en effet, davantage le niveau de crétinerie atteint par la société française, et européenne, que cette histoire de crèches ! Chesterton parlait d’un « monde moderne plein d’anciennes vertus chrétiennes devenues folles. » A première vue, les idées laïques ne se portent pas mieux. La laïcité consistait à séparer l’Eglise et l’Etat, le religieux du politique, parce qu’elle considérait qu’une Eglise catholique pendant plus d’un millénaire associée au pouvoir qu’elle sacrait, qu’un catholicisme, religion d’Etat, contrevenaient à la liberté de conscience des citoyens, à la liberté d’agir de leurs représentants. Pour autant, il n’était nullement question d’effacer une quinzaine de siècles de civilisation au sein de laquelle la religion chrétienne avait joué un rôle essentiel. La laïcité devient stupide à force d’excès et de contradictions. Prétendument héritière des Lumières elle se fait ignorante « chasseuse » de sorcières ! La religion est en somme condamnée à la Burka, tenue comme la femme musulmane chez les fanatiques à être invisible dans l’espace public ! Retranchée dans ses édifices, ou mieux encore dans le temple des consciences individuelles ! Les femen n’hésitent pas à profaner Notre-Dame et ne sont pas condamnées.
Ce qui est public doit être neutre ! Malheureusement, comme son nom l’indique et comme son histoire le prouve, la religion relie, célèbre des cultes, fonde des communautés qui transmettent un Bien Commun. Malheureusement, cet héritage, même s’il n’est plus l’expression d’une foi vivante, est au coeur de l’identité d’une culture, d’une civilisation. Pas étonnant que les révolutionnaires s’en soient pris aux reliques de Sainte Geneviève qui avaient arrêté les Huns devant Paris. Ils assumaient en cela une lointaine parenté, celle des adeptes de la table rase, de l’herbe qui ne repousse pas, de la page blanche sur laquelle on n’écrit rien parce qu’on n’a plus rien dans la tête, bref de la neutralité qui est refus d’identité. Les « Femen » de Bruxelles s’intitulent « collectif anonyme » : des personnes qui s’appellent « personne », mieux qu’un programme, un aveu ! Certains voudraient même interdire les sapins de noël, en oubliant que ce symbole là n’a rien de chrétien, qu’il est lié au solstice d’hiver. Mais la fête du solstice, avec laquelle les Chrétiens ont habilement fait coïncider la naissance du Christ, est dans le fond un vestige des cultes païens… La laïcité va donc, une fois encore, utiliser sa gomme afin d’effacer tout trace d’héritage, d’identité… Non, elle va, au contraire, nous inviter à libérer notre pensée en accueillant l’identité des autres, comme le repas de rupture du jeûne pour le Ramadan, à la Mairie de Paris le 9 Juillet dernier. Deux poids, deux mesures, diront les mécontents. Discrimination positive, diront les partisans. En fait, on voit là combien la laïcité inculte (!) est une de ces vertus chrétiennes devenues folles. En l’occurrence, il s’agit de l’humilité devenue vicieuse qui consiste à s’interdire ce qu’on favorise chez autrui. Ce sentiment, certains l’ont perçu dans l’image d’un Pape catholique écoutant religieusement un imam parler de Marie, pas de la Mère de Dieu, dans un pays qui a consciencieusement éliminé les Chrétiens de son territoire depuis un siècle. On peut y voir un magnifique exemple de respect de l’autre, mais on peut craindre que celui-ci ne verse très facilement dans la haine de soi.
La Mairie de Paris s’est défendue à la lettre « r » près : culturel et non cultuel. Bien sûr les santons provençaux, la visite des rois mages, le merveilleux entrelacs de récits et de légendes qui entourent la Fête de Noël, qui emplissent notre littérature et sont les sujets d’innombrables oeuvres d’art plastiques ou musicales, sont tout aussi culturels, mais doivent être tenus en suspicion, parce qu’il s’agit de « notre » culture et de son orgueil insupportable. Pourtant ce torrent de bêtises peut éveiller une salutaire réaction : la fierté d’appartenir à la civilisation qui a donné le Messie de Haendel comme les nativités flamandes ou italiennes, et même la joie, si l’on est croyant, de dire que le message du Christ est vraiment celui d’une religion de paix et d’amour qui n’a aucune raison de se cacher.
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