Il faut avoir parfois le courage d’avoir peur. Rien de plus exaspérant, sans doute, que les gens qui vous font part d’inquiétudes sans fondement, sinon ceux qui ne veulent pas voir le danger là où il est. Ils ne prennent en considération que les gens qui leur font payer très cher, généralement aux frais des contribuables, des avis qui ne valent rien. La liste serait trop longue de ces conseillers, de ces gourous, de ces spin-doctors qui fonctionnent comme les médecins de Molière. Craignons résolument l’enfer car on peut être assuré, si par malheur le Seigneur ne prenait pas pitié de nous, de les y retrouver.
Ils n’acceptent pas, en effet, d’appeler un chat un chat. Ils refusent les mises en garde, ils dédaignent les informations que leur donnent, gracieusement, gentiment, les lanceurs d’alerte.
Ainsi en est-il de l’accusation d’islamophobie. Phobeïn, en grec, prononciation érasmienne en usage en occident, cela veut dire : craindre. Le propre du terrorisme consiste précisément à susciter la peur chez ses adversaires. Ce n’est certainement pas à ses victimes, ce n’est pas aux cibles qu’il a lui-même désignées, de faire un mea culpa, et moins encore de feindre d’ignorer le danger.
Depuis les anarchistes et nihilistes du XIXe siècle, personne ne peut l’ignorer : tout acte terroriste se veut un acte de propagande. Les ancêtres communs du bolchevisme et du djihadisme parlaient alors de propagande par le fait. C’est même l’essentiel du mode de propagation et de gouvernement de ce système.
Les jacobins français de la période révolutionnaire n’ont pas agi autrement. Les contemporains le savaient, qui n’ignoraient pas les exploits de ces gens qui se disaient patriotes, et noyaient les Nantais dans la Loire, massacraient les Vendéens, guillotinaient ceux qu’ils appelaient des suspects. La Marseillaise est devenue, plus récemment qu’on ne le croit l’hymne national de l’État, et dans la circonstance actuelle on est prié de la respecter. Je trouve même fort émouvant d’avoir entendu le prince William à la tête du peuple anglais l’entonner à Londres quoique, tant qu’à faire d’un refrain républicain, et de se savoir en guerre, on peut juger le Chant du Départ plus approprié au combat.
Mais il serait peut-être nécessaire aussi de rappeler l’identité des fameux “Marseillais” de 1792. Leur chef s’appelait Jourdan Coupe-Tête, tout un programme. Il se vantait d’avoir égorgé et décapité le gouverneur de Launay en juillet 1789, on pense qu’agent du duc d’Orléans, il fut au cœur des journées d’octobre qui terrorisèrent Marie-Antoinette et contraignit le roi à quitter Versailles, puis, après avoir conduit la révolution en Avignon, il revint à Paris en 1792 et mena l’arrestation de la famille royale.
Témoin des événements révolutionnaires, Mallet du Pan était alors ce qu’on appelle aujourd’hui un lanceur d’alerte. Quelques rares dirigeants européens lucides, à Londres et à Vienne l’écoutèrent, quand il expliquait ce que cette révolution allait engendrer en Europe et dans l’opinion durable des Français.
Mais qui écoute les lanceurs d’alerte ?
> Jean-Gilles Malliarakis anime le blog L’Insolent.
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