Les sommets diplomatiques nous ont habitués à confondre l’agitation avec l’action. Les dirigeants se rencontrent, témoignent de la qualité exceptionnelle de leurs relations, font des déclarations qui montrent qu’ils ont saisi le problème à pleines mains… et on se rend compte par la suite que rien n’a changé sinon en pis, que le but n’était nullement de régler la question, mais d’occuper le terrain médiatique et de faire croire aux peuples que leurs « chefs » sont utiles et même efficaces. Ainsi en est-il et en sera-t-il du mini-sommet du 28 Août à Paris consacré à l’immigration africaine en Europe par la Libye. Emmanuel Macron y a invité Angela Merkel pour souligner une fois de plus sa volonté de restaurer le couple franco-allemand dans son rôle de moteur de l’Europe. C’est évidemment un premier faux-semblant puisque depuis la réunification, la constitution d’un bloc économique autour de l’Allemagne avec les pays libérés du joug soviétique, et les réformes courageuses menées Outre-Rhin, le duo a été totalement déséquilibré au détriment de Paris. S’ajoute à cela le fait que l’immigration n’est pas perçue de manière identique de part et d’autre. La population allemande vieillit et connaît le plein-emploi. Le poids de l’histoire inhibe ses réticences à accueillir l’étranger, même si la résistance s’accroît en raison des attentats islamistes, des débordements commis par des migrants et du refus d’accepter les « réfugiés » formulé par les voisins du groupe de Visegrad. La France offre une image opposée. Le chômage y perdure. L’immigration africaine, essentiellement musulmane, totalement inutile économiquement, devient insupportable. Depuis les campements improvisés par des clandestins qui veulent être reconnus comme demandeurs d’asile jusqu’aux agressions commises au nom de l’islam, en passant par les frictions provoquées par les revendications communautaires en matière alimentaire ou vestimentaire, et ce qui est le plus grave, la constitution de zones où l’assimilation culturelle et politique n’est plus possible en raison de la démographie des quartiers, la France devient méconnaissable. Beaucoup de Français n’acceptent pas cette évolution suicidaire dont leurs responsables politiques sont complices. Le jeu des régularisations et des acquisitions de nationalité masque le processus de changement de population. Il ne peut y avoir de démocratie sans un « démos », un peuple qui a conscience de son identité et de son destin.
A cette réunion ont été associés les pays du sud qui servent de transit aux migrants, l’Italie qui a déjà reçu 100 000 Africains sur ses côtes cette année, et 600 000 depuis 2014 à partir de la Libye, et l’Espagne qui connaît un nouvel afflux par le Maroc. Paolo Gentiloni et Mariano Rajoy étaient donc présents. L’inutile Federica Mogherini représentait l’Union Européenne dont on mesure constamment l’inefficacité. Les pays, qui de l’autre côté de la Méditerranée, servent de passage au flux migratoire, et voient prospérer sur leur sol ce nouveau trafic humain, étaient également conviés avec les Présidents Idriss Déby du Tchad et Mahmadou Issoufou pour le Niger. Enfin, Fayez Al-Sarraj, représentait la Libye. Son titre est trompeur : il est le Chef du gouvernement d’union nationale de Tripoli, reconnu par la « communauté internationale », mais ne contrôle qu’une faible portion du territoire, et encore, avec les Frères Musulmans de Misrata. L’Homme Fort du pays est le maréchal Khalifa Haftar. Le Président français avait récemment réuni les deux rivaux. Mais le chaos libyen a rendu le projet de « hotspots » en Libye lancé par Macron irréalisable. C’est pourquoi il tente aujourd’hui de le reculer au Tchad et au Niger. Il s’agit d’organiser sur place l’accueil et le contrôle des migrants afin de séparer les réfugiés qui y recevront le statut de demandeurs d’asile des migrants économiques. Les ONG qui soutiennent l’immigration n’y sont pas favorables puisque cela crée une sélection et donc une discrimination à leurs yeux inacceptable. Les responsables politiques africains préféreraient qu’on leur donne les moyens du développement et du contrôle de leurs frontières. Ils dénoncent la mauvaise solution qui va transformer le tri en appel d’air.
Cette critique est justifiée. Elle pointe du doigt l’ambiguïté pour ne pas dire l’hypocrisie qui enveloppe la manière dont l’occupant actuel de l’Elysée traite le sujet. Chaque solution consiste à cacher ou à déplacer le problème tout en donnant un signal pour l’accentuer. Plus un migrant dans la rue, que ce soit à Calais ou à La Chapelle ? Cela signifie la multiplication des centres d’hébergement. Les clandestins qui se trouvent à la frontière italienne rêvent de la passer pour être accueillis par la générosité française. Chaque jour, certains la franchissent. C’est pourquoi, s’il faut remonter à la source du problème, c’est d’une toute autre manière, non pour faciliter le flux, mais pour le tarir. La restauration d’un Etat contrôlant l’ensemble du territoire libyen est dans ce but décisive. Celle-ci ne peut se faire, semble-t-il, que par le biais d’Haftar, de même que la fin de la guerre en Syrie passe par la reconquête de la totalité du pays par l’armée syrienne. L’Europe n’a pas à assumer les conséquences des mauvaises gouvernances. Elle a, en revanche, intérêt à ce que le Moyen-Orient et l’Afrique se développent pour être des partenaires économiques sérieux. Il est plus utile que les migrants trouvent du travail chez eux plutôt que d’en chercher en Europe.
Le règlement de Dublin qui laisse au premier pays membre de l’UE où arrivent les migrants le soin de déclencher la procédure d’asile est inepte. L’Italie les accueille mais ne les garde pas. Ils se précipitent donc en France, puisque les autres frontières, autrichienne, slovène et suisse sont plus fermées. La solution des quotas proposée par Mme Merkel se heurte au refus des pays du groupe de Visegrad. On semble ne pas voir que la procédure d’asile, conforme aux droits de l’homme, ne peut concerner que des personnes effectivement menacées dans certains pays en raison de leurs croyances ou de leurs positions politiques. Lorsqu’un pays connaît des désordres voire une guerre civile, la masse des gens qui vont revendiquer le titre de réfugiés va mêler quelques personnes réellement en danger, et sans doute pas sur l’ensemble du territoire, à tous ceux qui saisiront le prétexte mis en exergue par les médias pour chercher à mieux vivre ailleurs. Les Afghans, les Erythréens, les Somaliens ou les Syriens correspondent à ces situations ambivalentes. On s’en est aperçu lorsque Mme Merkel a cru devoir ouvrir son pays au-delà du raisonnable. Tous les migrants étaient devenus syriens, voués à périr sous les coups du terrible dictateur ou à mourir en traversant la mer. Depuis, les bateaux les prennent en charge au plus près des côtes afin de limiter la traversée sur les embarcations de fortune fournies par les passeurs. La solution consiste comme toujours à accroître le problème au lieu de le résoudre. Il est donc nécessaire de revoir totalement les fondements juridiques de l’immigration et de l’asile, qui répondent à des exigences morales dépassées par les évolutions de notre temps, tant sur le plan démographique que sur celui de la communication.
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