Habitués aux contingences du combat quotidien, nous réfléchissons forcément en fonction de la situation présente, non selon des scénarios imaginaires. Pourtant, il n’est pas interdit d’envisager différentes situations lorsqu’on agit. Imaginons le recul de François Hollande, au printemps 2013, au plus des fort des manifestations contre le « mariage pour tous ».
Si la manœuvre est politiquement risquée, elle n’est pas, en soi, inenvisageable. Après tout, Hollande aurait pu reculer comme il le fit pour une partie du programme de sa campagne présidentielle. Il aurait très bien pu renoncer au “mariage pour tous” comme il renonça à s’opposer à l’adoption du pacte de stabilité. Il est sûr qu’une bonne partie des Français se serait réjouie de ce recul, même si certains électeurs et soutiens du PS auraient rechigné.
Et si Hollande avait reculé ? Il est certain que l’opposition au “mariage” homosexuel se serait fracturée entre une majorité obligée d’accepter l’union civile et une minorité isolée en raison d’un combat plus cohérent, mais moins compris de tous…
Et si Hollande avait reculé ? Il est probable que l’irénisme aurait été de mise : en échange d’un refus du mariage homosexuel, il aurait fallu plus d’ouverture à l’égard du mode de vie homosexuel, donc être plus gay-friendly. C’eût été des déclarations dégoulinante de niaiseries en faveur des unions homosexuelles, comme on a pu en avoir de la part d’opposants au mariage homosexuel comme Frigide Barjot…
Et si Hollande avait reculé ? On aurait difficilement fait échec à la reconnaissance de l’homosexualité dans les écoles ; les théories du « genre » auraient trouvé une forme inédite et inattendue de propagation avec, cette fois-ci, la complicité d’opposants au mariage homosexuel…
Et si Hollande avait reculé ? Il est plausible que le mouvement de détricotage du mariage aurait continué de plus belle : l’union civile aurait récupéré tous les aspects du mariage (successions, etc.), à l’exception des garde-fous symboliques que sont l’adoption et la filiation. Bref, le mariage réduit à la portion congrue. Maigre consolation… Face au mariage, une panoplie inespérée allant du concubinage à l’union civile en passant par le PaCS… Un catalogue complet donnant aux plus jeunes une vision brouillée de la famille. Par ailleurs, dans cette hypothèse alternative d’union civile, l’adoption aurait été indirectement possible par le biais de l’adoption simple, admise en droit français…
“Heureusement que François Hollande n’a pas lâché, car il est certain que, le cas contraire, beaucoup d’entre-nous l’auraient fait. Oui, en permettant ce « mariage pour tous », Hollande a réveillé les consciences et créé une opposition aussi soudée que variée. Merci Monsieur le Président !”
Et si Hollande avait reculé ? Cela aurait été la grande coagulation des mous de gauche, de droite et du centre avec la mise en l’écart des catholiques de Tradition, des patriotes honnêtes et des vrais contestataires de tout poil (partisans de Dieudonné, mais pas seulement), le tout au profit d’un consensus bêlant et vide, qui aurait été, en fin de compte, favorable à Hollande, à l’instar de ce qui arriva à Mitterrand en 1988…
Et si Hollande avait reculé ? On aurait pu imaginer l’épiscopat français sommant les fidèles de prier davantage pour les familles homosexuelles ou des théologiens cherchant à réfléchir sur une manière de « vivre en Christ »… Au diable le péché de chair et les exhortations de Saint-Paul, neutralisées ou lues à la lumière des « signes des temps » du 21ème siècle…
Bref, il ressort de tout cela que la victoire aurait été empoisonnée. Elle aurait empêché le développement d’un vaste mouvement de contestation et de réveil.
Alors… Heureusement que François Hollande n’a pas lâché, car il est certain que, le cas contraire, beaucoup d’entre-nous l’auraient fait. Oui, en permettant ce « mariage pour tous », Hollande a réveillé les consciences et créé une opposition aussi soudée que variée. Merci Monsieur le Président ! Vous nous avez fait le plus grand cadeau en empêchant cet endormissement qui aurait été fatal si vous aviez reculé. Grâce à vous, il y a des manifestations qui se multiplient, des veilleurs qui témoignent et des comités qui accueillent vos ministres. Vous vous demandez : pourquoi ce mouvement ? Qui l’a créé ? Ou même : qui est derrière ? Je réponds : vous-même, Monsieur le Président. Cette force qui a poussé beaucoup de gens à se souder et à persévérer vient de votre refus net. Votre grand vizir, Monsieur Valls, a fait la même chose. Grâce à vous, nous avons retrouvé la culture de la manifestation, le bonheur des sit-ins et le manuel de la parfaite mobilisation urbaine. Merci !
Avant de vous remercier à nouveau, je vous propose une réflexion théologique ; je ne sais pas si les charges de votre mandat vous donnent le temps de réfléchir sur les insondables mystères de la Providence. On dit que le plus grand désastre du démon a été précisément ce qu’il a cru être signe éclatant de sa victoire : la Croix. Cette épreuve fut un grand éveil. Je ne sais pas si vous marquerez les millénaires, Monsieur le Président, mais vous avez certainement marqué les décennies à venir.
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