Tout d’abord, il semble difficile de partager les louanges sur la lucidité et sur la dignité dont aurait fait preuve le capitaine Hollande en abandonnant son navire. Même s’il s’agit d’un pédalo, il n’a pas su le piloter et son expérience misérable s’est effectuée aux frais du pays. La classe politique ferait preuve dans cette affaire, toutes tendances confondues, d’une sorte de complaisance dommageable si elle allait au-delà des condoléances conventionnelles d’un soir.
Sur tous les points où Monsieur Hollande a balbutié des analyses positives de son action négative, ou bien il a délibérément menti aux Français, un métier qu’il maîtrise parfaitement, ou bien il s’est menti à lui-même. On est passé du “ça va mieux” au “ça va, tôt ou tard, aller mieux”. Ne dit-on pas “après la pluie le beau temps”. Et même sur le réchauffement climatique, il parlait en ce début de décembre glacial, à contre temps et à contre-emploi.
Il a fallu plusieurs minutes pour que l’on comprenne, puis pour que l’on sache, ce 1er décembre au soir, que le citoyen Hollande ne se considérait plus comme susceptible de réélection. Il renonçait piteusement à solliciter un deuxième mandat.
Il a échoué et il l’a même, trop timidement, reconnu. Le président normal est redevenu un fonctionnaire banal, et il restera en fonction jusqu’au printemps. C’est à tort qu’on compare l’indigne Monsieur Hollande avec le très respectable Paul Deschanel qui, du fait d’une courte dépression, avait été contraint de démissionner en 1920 (1). Ses vrais prédécesseurs, Émile Loubet qui fut président de 1899 à 1906, et Armand Fallières de 1906 à 1913, aux temps de l’union des gauches, n’avaient pas tenté de rester présidents. Mais on se situait alors, sous la troisième république, dans un ordre où le chef de l’État ne dirigeait pas, de fait, le gouvernement et ceci contrairement à la lettre de la constitution votée en 1875.
Aujourd’hui, curieusement, on transgresse le texte de 1958, mais on s’en écarte dans un sens inverse.
En théorie, l’article 21 dispose que le Premier ministre “dirige l’action du gouvernement du Gouvernement. Il est responsable de la Défense nationale. Il assure l’exécution des lois.”
Mais dans la pratique les choses, depuis un demi-siècle, ont fonctionné tout autrement et aucun des chefs de gouvernement, hormis les cas dits de cohabitation, n’ont jamais pu s’opposer aux desiderata présidentiels. L’opinion populaire le sent à sa manière, qui risque en partie d’exonérer Valls des erreurs de Hollande.
La situation actuelle, cependant, est encore différente. Dépourvu de caractère mais non de traîtrise, Hollande n’a pas échoué seul. Son discours télévisé, pour court qu’il fut, s’attribue de prétendus succès. Totalement illusoires et trompeurs, tel le faux équilibre des comptes de la sécurité sociale, ou la maîtrise de la dette, ils méritent tous d’être corrigés dans le bilan qu’en tirera la campagne présidentielle à venir : aucune des politiques suivies depuis 2012 n’a réussi.
Or, ces politiques ne tenaient pas seulement à la veulerie et au cafouillage de “Monsieur Petites Blagues” – son surnom jusqu’en 2011 au sein du parti socialiste. Cela tient de façon précise à l’idéologie socialiste, à l’existence d’une majorité parlementaire initialement socialo-communisto-écolo dont l’absence de convictions du chef de l’État n’a jamais su résoudre les contradictions.
Or, celles-ci ont été importées au sein même du groupe socialiste à l’Assemblée nationale qui détricote toute réforme qui ne va pas dans le sens de l’idéologie, du pédagogisme, du sectarisme des réseaux de pouvoir et des sociétés de pensées de gauche.
Il ne suffit pas de voir le chef cuistot remettre son tablier. Ses petits marmitons, ses gâte-sauces et ses soubrettes, tous ensemble et séparément, doivent être renvoyés à la production. Et leurs recettes pourries doivent être abandonnées.
> Jean-Gilles Malliarakis anime le blog L’Insolent.
- Après avoir remis sa démission à Alexandre Millerand, Paul Deschanel partit se reposer au sanatorium de Rueil. Son état s’améliora rapidement et il quittera Rueil trois mois plus tard. Il siège alors de nouveau à l’Académie des sciences morales et politiques et envisage un retour à la vie publique. Le 9 janvier 1921, il est élu sénateur d’Eure-et-Loir dès le premier tour de scrutin, par 50,35 % des suffrages (360 voix sur 715 votants). Il deviendra, en janvier 1922, président de la commission des affaires étrangères du Sénat. Rien de tout cela n’adviendra à Monsieur Hollande.
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