Être ou ne pas être républicain ?

Tel est le dilemme qui inspire, si l’on ose dire, le discours contemporain. À dire vrai, c’est plutôt par défaut d’inspiration que le vocable est utilisé. Disons-le d’emblée, il ne recouvre pas le débat entre monarchie et république, il n’est pas non plus synonyme de démocratie. La démocratie, c’est le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple, et, il faut bien l’avouer, il y a trop de peuple dans ce mot.

Républicain : le mot est magique et relève de la pensée magique, il est une onction donnée par les clercs, journalistes, intellectuels, et repris pas les homoncules de la politique. Dès lors que vous avez reçu l’onction, vous êtes admis dans le cercle des gens fréquentables, mais si vous avez été déclarés non-républicain, vous êtes rejetés dans les ténèbres extérieures. Le mot est une absolution, Guérini à longtemps été considéré comme républicain, et en cherchant bien, Bertrand Cantat n’est pas loin de l’être, “il est des nôtres !” se disent-ils entre eux. Quand un député socialiste, maire de Conflans, rend sa carte du PS pour passer aux Radicaux de gauche, le président Jean-Michel Baylet le qualifie de républicain. Dignus dignus est intrare in nostro docto corpore, comme disait Molière. Il s’agit en l’espèce d’une bénédiction républicaine avec un subtil parfum de cassoulet et… de tablier de cochon. Valls lui-même, à qui la gauche de la gauche reproche vertement sa politique à l’égard des immigrés, croit devoir se défendre en se qualifiant lui-même de républicain. Le mot est prodigieusement utile en proportion inverse de ce qu’il perd du sens, l’eau bénite républicaine asperge un peu tout le monde mais le refus de bénédiction vaut exclusion. On dira de Finkielkraut qu’il est de moins en moins républicain, et de Richard Millet qu’il ne l’est plus du tout, rejoignant dans la géhenne ceux qui sont réputés congénitalement non républicains : le FN, principalement et même les cathos dont le clergé jadis, a fait de la surenchère pour se monter plus républicain que la république, liste non exhaustive. On notera au passage que dans cette mouvance, à qui on refuse d’administrer le goupillon républicain, on revendique paradoxalement et fortement l’idée républicaine et sa petite sœur batârde, la laïcité, c’est le cas aussi chez Dupont-Aignan à droite de la droite… républicaine , avec lui c’est carrément debout la république ! Ah bon, parce qu’elle était couchée ?

L’autre mot du consensus est logiquement antirépublicain. Comment expliquer ce paradoxe et que signifie alors être républicain dans la pensée de ceux qui usent abusent de ce mot ?

“Le carburant du discours républicain est épuisé, le moteur social tourne avec des carburants de fortune au rendement faible et dévoyé.”

Ce paradoxe tient à l’épuisement institutionnel du modèle républicain, qu’on s’en réjouisse ou qu’on le déplore. Car dans l’inconscient collectif des Français, il y a cette idée que la représentation nationale ne les représente plus, fruit de l’évolution des institutions voulues par le Général De Gaulle. Que la représentation parlementaire soir qualifiée de parlement croupion et voila que la dénonciation de ce travers devient de l’antiparlementarisme, en conséquence il ne sera pas républicain de vouloir que la république le soit ! Les excès de la fiscalité, l’incertitude législative, l’arbitraire et la multiplication des lois dont la rigueur s’applique surtout à ceux qui la respectent, ont, en quelque sorte, brisé le consensus républicain. La république du pillage devient illégitime mais se couvre par la rhétorique. De même, si vous avez le malheur de dénoncer l’usurpation représentative et émotionnelle des médias, vous n’aurez pas le label républicain. L’opinion comprend bien que le pays est gouverné par une oligarchie, voire une caste pérenne et auto-reproduite, qui use du vocable républicain pour cacher sa connivence, et l’on arrive, in fine, à l’idée qu’être républicain, c’est s’accommoder de cet état de fait, c’est le cri de ralliement du concensus, le devoir de bien pensance, la couverture jetée sur les turpitudes et les échecs accumulés depuis 30 ans, l’obligation de s’aligner sur la pensée unique.

Bref, la république n’est plus dans la république mais à cela s’ajoute une autre raison que l’affadissement institutionnel ne suffit pas à expliquer. La raison en est la mort de l’école, celle-ci qualifiée jadis de républicaine fabriquait des républicains à la république dans la droite ligne de ce qu’avaient souhaité ses fondateurs. L’école partageait un magistère avec la dite république, elle lui forgeait ses mots et ses concepts. Mais, morte l’école, morte la république ! Le carburant du discours républicain est épuisé, le moteur social tourne avec des carburants de fortune au rendement faible et dévoyé.

Reste néanmoins une autre interprétation de la RES publica, la chose publique, le Bien commun quelque chose comme ce tout supérieur à la somme des parties. Ce tout s’est perdu au fil d’un usage clanique et oligarchique et c’est en vain que l’on cherche celui qui, dans ce temps d’indécision dont l’actuel président en est l’archétype, saura prendre la décision pour le Bien Commun. “Pour prendre une décision il faut être un nombre impair et trois, c’est déjà trop” affirmait Clémenceau. Quand c’est un grand “républicain” qui nous le dit !

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64 Comments

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  • 0 / 10
  • Ampelius , 3 novembre 2013 @ 16 h 49 min

    ALLONS ALLONS je vais vous mettre d’accord sur Nouvelles de France c’est plutôt la partie tête que la particule!

  • monhugo , 3 novembre 2013 @ 16 h 50 min
  • mariedefrance , 3 novembre 2013 @ 17 h 10 min

    Comment faut-il comprendre votre “Bravo les Bretons” ?
    QUI va payer les 800 millions d’€ prévus au contrat initial, contrat qui ne sera donc pas honoré puisque nos flamby and co préservent leur électorat ?

    En effet, Je suis très partagée concernant les mouvements au sein de la très socialiste Bretagne.

    D’un côté, ils manifestent pour sauver un monde en perdition dans la mondialisation, soumis aux règles européennes guidées par les USA.

    De l’autre, c’est précisément à cause du vote de 56% de ces Bretons que les hommes politiques et la classe médiatique ont adopté un consensus mou concernant l’économie.
    La France est totalement figée alors que le reste du monde avance, et on conserve un modèle social datant de 1945, date à laquelle le PC était le premier parti de France et au gouvernement.

    Des réformes auraient dû être faites depuis bien longtemps et nous en somme à subir la mondialisation sans en récolter le moindre fruit.
    Nous en sommes encore à philosopher.

    Des gens perdent leur emploi mais le drame, le vrai, c’est qu’ils n’en retrouveront sans doute jamais un autre.

    Tant que nous serons taxés de la sorte, tant qu’il y aura autant de dépenses publiques sans que jamais vienne à l’esprit de nos zélites qu’il faut qu’elles diminuent, tant que notre code du travail ne sera pas revu, que nos différents mille-feuilles ne se rétrécissent pas, il y aura du monde dans la rue !

    Trop de corporatisme, trop de communautarisme………. etc..

    nous connaissons la litanie.

  • de Kercohan , 3 novembre 2013 @ 17 h 19 min

    Si à l’état civil on me demande mon nom, en 2013, je réponds “de Kercohan”. Qu’il y ait ou non Monsieur, ou Madame, ou un prénom, ce qui suppose effectivement, mais tout le monde sait cela, de Kercohan.
    Si je parle de moi je dis “je (suis un) Kercohan” et ainsi de la famille “les kercohan”.
    Ici, c’est le nom, l’état civil, si vous préférez.
    Maintenant, veuillez m’excuser, mais je n’ai pas à justifier quoi que ce soit et encore moins l’habitude de discutailler avec les vieilles dames. Bonsoir

  • de Kercohan , 3 novembre 2013 @ 17 h 55 min

    @Ampelius : si vous ne savez pas quoi faire, vous pourriez demander un strapontin au “petit journal” d’Anal+ pour y poser votre cul.

  • Ampelius , 3 novembre 2013 @ 19 h 34 min

    Non je me contente de publier des articles sur Nouvelles de France!

  • johnDeuf , 3 novembre 2013 @ 20 h 04 min

    dommage que mon commentaire ait sauté pour une omission . je n’avais pas fait le copier que je fais habituellement avant de lancer l’enregistrement du commentaire. Je ne le recommence pas.
    J’expliquais en quoi consistent les 3 principes de la République: Liberté, Egalité et Fraternité
    la Liberté qui a mené l’Europe à l’ère de la science quand les autres en sont encore au XXI ème siècle au temps du dogme L’Egalité qui interdit par exemple la discrimination positive et la Fraternité qui nous mène à la Nation et interdit de cité les communautaristes divers que d’autres communautaristes font entrer etc… je ne vais pas revenir

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