Le sort des Chrétiens d’Orient a ému nombre de nos compatriotes, notamment sur les réseaux sociaux.
La France, par la voix de son Président, aura mis beaucoup de temps, trop sans aucun doute, pour réagir, et inviter poliment le nouveau Président irakien à assurer la protection de ses compatriotes, de tous ses compatriotes quelle que soit leur religion.
C’est, dans la forme, un signe parmi d’autres de la déconnexion de ce pouvoir avec son peuple.
Au fond, cette absence de réaction à la hauteur de l’enjeu, n’a rien de surprenant. Tout au contraire s’inscrit-elle dans la logique adoptée par l’Occident et en premier lieu les États-Unis d’Amériques depuis plusieurs décennies désormais.
Rappelons en effet, que la guerre du Golf, dans sa seconde version, avait pour objet de protéger les intérêts de l’Occident, en luttant contre le terrorisme, se débarrassant au passage, d’un dictateur devenu gênant.
La France en ce temps-là avait eu le courage remarqué, de s’opposer à l’intervention en Irak par la voix de son Président (c’est sans doute là, la seule décision de véritable courage qu’ait prise Jacques Chirac) magnifiquement portée à l’ONU par un flamboyant Dominique de Villepin.
Le propos mérite d’être repris :
« Une telle intervention ne risquerait-elle pas d’aggraver les fractures entre les sociétés, entre les cultures, entre les peuples, fractures dont se nourrit le terrorisme? (…)
Et c’est un vieux pays, la France, d’un vieux continent comme le mien, l’Europe, qui vous le dit aujourd’hui, qui a connu les guerres, l’occupation, la barbarie. Un pays qui n’oublie pas et qui sait tout ce qu’il doit aux combattants de la liberté venus d’Amérique et d’ailleurs. Et qui pourtant n’a cessé de se tenir debout face à l’Histoire et devant les hommes. Fidèle à ses valeurs, il veut agir résolument avec tous les membres de la communauté internationale. Il croit en notre capacité à construire ensemble un monde meilleur. »
Cette doctrine, la France l’a malheureusement abandonnée en Afghanistan d’abord, puis en Libye sous l’égide du Président Nicolas Sarkozy.
François Hollande, devenu Président, loin de rompre avec cet abandon d’un rôle premier et moteur de notre beau pays, a poursuivi sinon amplifié cette attitude belliqueuse en particulier à l’égard de la Syrie, heureusement sans succès, grâce à la clairvoyance et la ténacité de la Russie.
L’objet, chaque fois, est de proposer, de soumettre, lesdits peuples et leurs dirigeants à la démocratie et par conséquent à nos valeurs occidentales, parangon de toutes les valeurs.
Pour quel résultat ? Les chrétiens d’Irak comme ceux de Syrie en payent le prix fort.
De démocratie, dans aucun de ces pays il n’y a. En réalité, y règne une démocratie de façade, incapable de masquer le chaos dans lequel les populations vivent, mais surtout se montrant incapable d’enrayer l’islamisme radical et son cortège de massacres, d’excisions, de mariages forcés etc.
Les chrétiens, faut-il le rappeler, ont vécu en paix en Syrie, en Irak.
Nous les avons en réalité, il faut bien le confesser, condamnés à la terreur islamique de l’EIL, les sacrifiant sur l’autel de notre vision démocratique d’un monde hors sol, où toutes les valeurs, toutes les civilisations se valent.
Par là même, nous avons condamné au néant, à la vacuité de leurs combats, les milliers de soldats occidentaux qui ont payé de leur propre vie, comme ceux qui continuent chaque jour de souffrir dans leur chair, et qui aujourd’hui peuvent légitimement se dire « tout ça pour ça ».
Honte à l’Occident qui ne sait plus penser au-delà de ses petits intérêts économiques, qui se refuse à comprendre les enjeux de civilisation qui se jouent depuis des siècles au Moyen-Orient, berceau de toutes les civilisations.
Honte à nos dirigeants, qui de Sarkozy à Hollande, ont ruiné le destin singulier de la France au Moyen-Orient.
Ne pas savoir affirmer ce destin, l’assumer, comme l’avait courageusement fait Jacques Chirac, mettant en cela ses pas dans ceux du Général de Gaulle, c’est risquer de voir sa propre identité remise en cause.
C’est également et par conséquent prendre le risque d’importer ce conflit de civilisation sur notre propre sol, comme hélas les algarades de ces dernières semaines à l’occasion des manifestations pro palestiniennes n’ont été que les prémices.
Sans doute « ne savent-ils pas ce qu’ils font », nos dirigeants à courte vue, qui n’osent plus penser par eux-mêmes, s’alignant sur la pensée toute puissante de nos amis américains.
Cependant devant l’Histoire, ils seront, ne leur en déplaise, tenus pour responsables de la fin d’une civilisation et d’un certain art de vivre fraternellement quelle que soit sa communauté, sa religion, sa race.
Désormais comme le dit si bien Monseigneur Aillet, « que les occidentaux, qui ont largement contribué au chaos qui s’est instauré en Irak, aident les chrétiens persécutés à rester sur leur terre ».
Sortons de cette hypocrisie, qui consiste à se déclarer prêt à accueillir les persécutés, position qui n’est qu’un aveu de faiblesse, d’une France incapable de faire valoir sa position au concert des nations occidentales.
Se souvenir du serment de protection de la France, incarné par Saint-Louis, envers les chrétiens d’Orient honorerait notre classe politique. Alors courage Monsieur Hollande, prenez enfin la mesure de ce que vous incarnez au-delà de votre personne, un grand pays, une grande nation dont la voix est autant indispensable, qu’attendue.
> Emmanuel Humeau est avocat.
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