Oui, la théorie du genre existe

On entend ici ou là que la théorie du genre n’existe pas. C’est un mensonge.

Il n’y aurait pas de « théorie du genre » mais seulement des « études de genre », car la théorie serait unifiée là où les études de genre seraient diverses. Curieux, car « gender theory » est attesté dans le monde anglo-saxon, tout comme « gender studies ». De fait, une théorie admet une pluralité de directions, d’hypothèses et de disciplines, voire de théories encastrées (comme la théorie des équilibres ponctués dans le darwinisme) : penser la théorie comme un bloc monolithique n’est rien entendre à ce qu’est la science.

Oui, réplique-t-on, mais la traduction en français par « théorie » n’est pas bonne, car le mot « théorie » suppose que ce n’est pas une question de fait, que les hypothèses peuvent être mises en doute. Non seulement c’est faux (par exemple, la théorie de l’évolution par sélection naturelle n’est pas, y compris en France, considérée comme pouvant être sujette au doute), mais c’est en l’occurrence d’une grande arrogance (leur discours n’est pas théorique et ne saurait être mis en doute) Le concept de genre, qui est en effet très souple, repose tout de même dans les « études de genre » sur un présupposé culturaliste (scission entre culture et nature), qui repose lui-même sur des hypothèses très lourdes. Bref, c’est non seulement une théorie, mais aussi une théorie douteuse. Ce qui garantit l’unité et donc l’existence-même (c’est de la logique élémentaire) d’un champ disciplinaire aussi divers que les études de genre est bien non seulement le concept de genre, mais aussi la théorie qui le sous-tend.

Accordons que l’on n’enseigne pas la théorie du genre à l’école. Certes ; on la met en pratique. Il s’agit d’une entreprise de déconstruction systématique inspirée par certains théoriciens du genre, comme Judith Butler. Nous sommes loin de simples disciplines académiques qui ont leur légitimité.

“Il s’agit par la déconstruction générale et l’hybridation universelle de neutraliser toute personnalité un peu solide, pour pouvoir diriger à loisir des êtres fragiles, désorientés et atomisés.”

Peillon et Vallaud-Belkacem s’en défendent à grand cri : la théorie du genre n’existe pas, il s’agit de promouvoir « l’égalité ». Il faut bien comprendre ici la novlangue du régime. Leur concept d’égalité n’a rien à voir avec l’égalité, il renvoie à une pure indifférenciation. En quoi le fait de considérer que s’habiller en rose pour une fille ou en bleu pour un garçon n’a rien de naturel, ou, plus grave, que les garçons pourraient très bien porter de la dentelle et des fanfreluches, à la manière de Louis XIV, a-t-il quoi que ce soit à voir avec l’égalité ? En quoi porter une robe rose ou des dentelles ferait des femmes des dominées ? Quant à la fameuse déconstruction des « stéréotypes », il s’agit de déconstruire des normes sociales, qui, dans la soif de toute-puissance narcissique du libéralisme post-moderne, doivent être déconstruites du fait même qu’elles sont des normes.

Bref, ne dites plus indifférenciation généralisée, dites « égalité ». Ne dites plus déracinement, dites « liberté ». Ne dites plus héritage, ou plus généralement normes, dites « stéréotypes ». Une bataille sémantique, fondée sur la falsification systématique, est lancée par le régime pour prendre le contrôle des esprits.

On accuse ceux qui retirent leurs enfants de l’école d’attaquer « l’école de la République ». Mais cette école n’existe plus. La théorie du genre ne dissout pas l’école, elle n’est qu’une des nombreuses manifestations du délitement de l’ensemble de la civilisation française. L’école n’a pas attendu la théorie du genre pour tomber : elle a commencé depuis longtemps par miner les connaissances pouvant non seulement conduire à une pensée critique réelle, mais à la possibilité même d’une société commune. La génération de névrosés qu’on prépare en brouillant les identités sexuelles n’est qu’une pièce de ce dispositif général. Faut-il rappeler que de nombreux théoriciens du genre (comme Judith Butler ou Donna Haraway) sont inspirés par la philosophie post-moderne qui se fonde sur la fluidité universelle, c’est-à-dire sur la dissolution de tout sujet, de tout ce qui pourrait subsister ?

Il s’agit par la déconstruction générale et l’hybridation universelle de neutraliser toute personnalité un peu solide, pour pouvoir diriger à loisir des êtres fragiles, désorientés et atomisés.

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24 Comments

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  • V_Parlier , 3 février 2014 @ 11 h 06 min

    Sans parler des grèves d’enseignants! J’espère qu’à la prochaine les grévistes seront convoqués par Peillon (on peut réver, hein…)

  • V_Parlier , 3 février 2014 @ 11 h 29 min

    Si j’essaie de rester naïvement neutre, une chose continue de me sidérer, et j’ai l’impression d’être le seul à le remarquer:
    On apprend aux hommes à être le genre typique qui ne plait pas aux femmes du monde d’aujourd’hui. Qui ne l’a pas remarqué n’a pas longtemps été célibataire, car il faut savoir que si les femmes ne veulent certes pas être “dominées” au sens strict (ce qui se comprend), elles souhaitent néanmoins que les hommes aient l’air d’être plus ou moins dominateurs. N’avez vous jamais lu ces annonces sur les sites de rencontres qui sont toutes les mêmes, et où le prétendant se doit d’être avant tout grand (avec taille requise bien au dessus de celle de la promise), avec toutes sortes de descriptions d’attributs physiques virils (tout en restant poli bien sûr), et sans oublier le “sûr de lui”, “protecteur” ?
    On peut certes souvent s’étonner de telles exigences souvent très prétentieuses mais ce n’est pas le sujet. Ce qu’il est important de remarquer est que la biologie pure et simple parle dans ces annonces, alors qu’il ne m’étonnerait pas que toutes ces inscrites au bonheur futur se déclarent fermement féministes. Il est donc clair qu’on cherche à fabriquer des hommes qui ne plaisent pas aux femmes (des mous indécis féminisés, à défaut de les rendre tous petits) mais aussi des femmes qui ne plaisent pas aux hommes (paranoïaques de la persécution sexiste et donc invivables, et se “relookant” comme des hommes, barrquées et à la coupe de cheveux militaire parce-que c’est à la mode etc…).

    Ah, certes, c’est un droit de s’arranger comme on veut, même si çà ne plait pas. Après il ne faudra pas se plaindre! Mais le pire est qu’ici il ne s’agit pas de décisions personnelles mais de projet planifié. Je pense qu’il capotera car depuis des millénaires, sous tous les pouvoirs ayant existé et quelles que soient les religions, un tel projet n’a jamais réussi. Même dans les sociétés matriarcales il y a autant de différenciation entre les sexes. C’est d’ailleurs une occasion supplémentaire de remarquer à quel point nos maîtres à penser sont naïfs et ridicules (en plus d’être dangereux pour d’autres raisons). Tout ce qu’ils réussiront à faire, c’est de créer des disputes dans les familles en apprenant aux élèves à faire les comptes pour vérifier lequel de ses parents n’est pas conforme et se comporte “mal” en répondant aux “stéreotypes”. C’est peut-être simplement là qu’est la lutte contre la famille.

  • Josselin , 3 février 2014 @ 13 h 27 min

    Combat perdu d’avance !!

    Voilà à quoi vous renvoient les jeunes parents si vous avez le malheur d’etre critique :

    http://www.huffingtonpost.fr/elisabeth-roudinesco/theorie-du-genre-ecole_b_4713800.html?utm_hp_ref=france#slide=3382464

  • Kanjo , 3 février 2014 @ 15 h 48 min

    si elle est née musulmane, elle est apostat, et donc condamnée à mort par sa famille. je comprends qu’elle haïsse cette famille !

  • Kanjo , 3 février 2014 @ 16 h 05 min

    Vous avez remarqué qu’avant de critiquer les parents qui ont retiré leurs enfants, ils ont commencé par caricaturer leur discours, en se moquant d’une prétendue crainte irraisonnée. Evidemment que jusqu’à présent, aucun homo n’est venu officiellement se masturber ou se faire sodomiser en classe ! Après avoir lâché cette énormité, Manuel valls a beau jeu de démentir. Mais ce n’est pas (pas encore) cela le danger. Le danger, c’est le viol psychologique, le viol de la conscience.
    Mais les socialos n’ayant pas de conscience, ils ne peuvent pas comprendre.
    Une collègue russe m’a dit que, enfant, ses parents lui avaient bien expliqué qu’il ne fallait rien croire de ce qu’on lui enseignerait à l’école.
    Le temps est venu pour les parents français d’expliquer à leurs enfants qu’il ne faut rien croire de ce qu’on leur dit à l’école, que le véritable enseignement soit fait à la maison.

  • micaelli , 3 février 2014 @ 18 h 29 min

    Il y a un moyen de satisfaire tout le monde : Supprimer tous les WC pour Dames ….
    Après tout , il n’ y a aucune loi qui interdit aux ” gendériennes ” de faire pipi DEBOUT
    ni aux ” gendériens ” de le faire accroupis dans les vespasiennes créées il y a déjà quelques temps par un empereur Romain ……

  • samovar , 3 février 2014 @ 19 h 22 min

    Je rêve d’une manif anti-féministe où toutes les femmes seraient en talons hauts et en robes toutes plus jolies les unes que les autres et avec des hommes tous plus heureux les uns que les autres. Ce serait bien, au printemps, et sur un trajet pas trop long, ou même sur une grande place avec des arbres et des fleurs …

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