Des unions nationales ?

Tribune libre de Christian Vanneste*

78% des Français souhaitent l’union nationale entre la droite et la gauche, et une majorité la verrait du PS au FN. Le responsable politique en tête pour figurer dans un tel gouvernement s’appelle FrançoisBayrou. Ce souhait est à rapprocher de la crainte de 70% des Français et de 80% des ouvriers de voir se produire une explosion sociale dans notre pays durant l’année qui vient. Un sondage n’est pas, Dieu merci, une élection. Ce voeu irénique présente deux visages. D’une part, il s’appuie sur des réalités qui le justifient. D’autre part, il paraît surréaliste dans le pays où tout s’oppose à sa réalisation.

L’Allemagne a connu des grandes coalitions entre la CDU-CSU et le SPD qui ont servi de transition à l’arrivée de la gauche ou au retour de la droite. Mais le consensus des deux centres d’outre-Rhin sur l’Europe, sur la monnaie et sur l’Atlantisme déborde même sur un réalisme économique et social partagé par les chrétiens-sociaux et les sociaux-démocrates. Angela Merkel a hérité des réformes de Gerhard Schröder dans une continuité positive. Les Britanniques, pour leur part, ont illustré de manière exemplaire le principe de l’union sacrée face à la menace nazie en 1940. Aujourd’hui encore, conservateurs et libéraux-démocrates sont unis, malgré des programmes pour le moins contradictoires. À côté de ces modèles, d’autres unions se réalisent, certes face à un danger, mais aussi avec la volonté de préserver un système et ses prébendes, en dépit de son échec consommé, et malgré une hostilité croissante du peuple. Il s’agit de pays dont les résultats économiques sont catastrophiques, dont la gouvernance est défaillante et qui se trouvent confrontés à une montée de ce que les princes qui nous gouvernent appellent le populisme en se pinçant le nez. C’est la Grèce lassée du ping-pong KaramanlisPapandréou, où un gouvernement présidé par la Nouvelle-Démocratie est aussi soutenu par le Pasok. L’un et l’autre avaient à se faire pardonner une entrée frauduleuse et suicidaire dans l’Euroland, une démagogie érigée en méthode et une collection de déficits pour financer les dépenses publiques inutiles d’un Etat improductif. C’est la Belgique, ce pays dont l’État ne sert plus qu’à faire croire qu’il existe vraiment, alors qu’il a pu se passer de gouvernement pendant près de 18 mois. Malgré sa grosse dette (95% du PIB), les affaires sont bonnes, surtout en Flandre qui voudrait bien vivre seule et ne plus avoir à financer le socialisme wallon, lequel détient pourtant le poste de Premier ministre. C’est dire combien ce gouvernement a peu d’importance. Il maintient l’illusion de l’unité parce que la séparation passe par Bruxelles. Le boulet, c’est Bruxelles. Le boulon, ce n’est pas le roi, c’est l’Europe, à moins qu’on aille vers une Europe des Régions, avec un district fédéral. Pour des pays artificiels comme la Belgique, cela peut se concevoir. Pour la France, c’est inenvisageable. Pour l’Espagne, ce serait tragique.

“C’est d’un sursaut dont nous avons besoin, et celui-ci ne passe ni par l’union illusoire, ni par le consensus émollient. Il passe par un choc, une union des vraies droites européennes capable de mettre en œuvre l’indispensable révolution conservatrice et d’incarner le réveil de l’Europe des nations.”

Reste l’Italie, championne de l’inventivité politique, la fameuse combinazione. Pays antique, mais État récent, menacé d’éclatement entre nord et sud, capable de passer de la démagogie berlusconienne à la rigueur de Monti, sans élection, pour aboutir après l’alternance à gauche, à un gouvernement condamné à faire du Monti avec un numero 1 socialiste et un numero 2 de droite. Ce tour de prestidigitation a pour but de garder le pouvoir dans les mains de ceux qui ont placé l’Italie dans la situation lamentable qu’elle connaît, et de mettre hors-jeu le bouffon Beppe Grillo et ses nombreux élus, qui ont eu le toupet de dire que le roi était nu.

La France ne ressemble à aucun de ces exemples. Le seul point commun réside dans le fait que les deux grands partis se partagent la responsabilité de l’effondrement économique et social que nous subissons, le PS pour avoir réalisé des réformes suicidaires, l’UMP pour n’avoir pas eu le courage de faire les réformes salutaires. Deux camps sont profondément opposés dans la nation : l’affrontement sur l’absurde mariage unisexe l’a montré et amplifié. Ces deux forces ont leur enracinement dans une société divisée entre la France protégée d’un secteur public obèse et la France exposée  de l’économie réelle. La France sacrifiée de la production industrielle et agricole, sortie du système tend à constituer une troisième force rejetée par les deux autres. La tradition idéologique de la gauche, avec un marxisme résiduel, un gauchisme soixante-huitard stupide et prétentieux, une lecture de l’Histoire manichéenne qui discrimine, n’est pas un terreau fertile à l’union. Seule la vacuité abyssale de la pensée politique à « droite » pourrait la laisser entrevoir lorsque les technocrates carrièristes de l’UMP, partisans d’une Europe Fédérale, prêts à se rallier à la loi Taubira, après avoir fait mine de s’y opposer, se diront que rejoindre sur les bancs du gouvernement leurs anciens condisciples de l’ENA qui ont fait carrière à gauche ne serait pas déraisonnable pour sauver l’Europe du populisme, la France de l’infréquentable FN, et… leurs ambitions du naufrage.

L’Union pour Maintenir nos Places n’est pas la solution pour l’Europe en déclin, ni pour la France en pleine décadence. Les Européens, les Français souhaitent évidemment que leurs responsables s’entendent pour les sortir de la crise. Mais dans les pays dont la situation est la conséquence de l’action de ces « responsables », il serait salutaire de s’en défaire plutôt que de les laisser aggraver les mesures qui nous ont conduits là où nous sommes. La France, et la plupart des pays du sud de l’Europe, ont subi une mauvaise gouvernance qui les place en sujets économiques de l’Allemagne plus qu’en partenaires. Certes, la République fédérale souhaite des débouchés solvables, mais le lent rééquilibrage, s’il se produit, ne résoudra pas le problème d’un continent qui vieillit et s’asphyxie, ni d’une France qui ne cesse de tomber. C’est d’un sursaut dont nous avons besoin, et celui-ci ne passe ni par l’union illusoire, ni par le consensus émollient. Il passe par un choc, une union des vraies droites européennes capable de mettre en œuvre l’indispensable révolution conservatrice et d’incarner le réveil de l’Europe des nations. Bossuet disait : « Dieu se rit des hommes qui chérissent les causes dont ils déplorent les effets. » Ecoutons-le et attaquons-nous aux causes si nous voulons vraiment changer les effets.

*Christian Vanneste est un ancien député UMP du Nord.

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38 Comments

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  • 0 / 10
  • manicou , 29 avril 2013 @ 12 h 05 min

    Eh bien bon, maintenant on voudrait réunir les 2 incompétents (ump/ps) pour nous gouverner alors que ce sont eux même qui nous ont mis dans cette situation en nous dirigeant depuis des déscénies à tour de rôle.
    Bravo! Ils pourront ainsi s’unir (l’union fait la force/farce) pour finir leur oeuvre de destruction.
    Avec ça on est sauvé!
    Mais quand comprendrons nous qu’on ne peut pas continuer indéfiniment a “chérir les causes dont on déplore les effets”?

  • marcogr , 29 avril 2013 @ 12 h 07 min

    Ah le vieux fantasme d’une minorité réactionnaire qui voudrait que la légitimité d’un gouvernement de gauche soit forcement une erreur et soit contestable…
    Nous sommes dans une démocratie et ceux qui sont élus pour nous représenter doivent avoir la possibilité de faire ce pourquoi ils sont là…
    Pourquoi soudainement, certains pourraient ils changer le jeux démocratique de la 5em république?

  • J.P Lussan , 29 avril 2013 @ 12 h 12 min

    Pourquoi le F.N. infréquentable? Pourquoi”leurs ambitions de naufrage”? Précisez votre pensée Mr Vanneste .Cela ressemble en effet furieusement à un discours de politicien que vous ne voulez pas être

  • Gisèle , 29 avril 2013 @ 12 h 13 min

    SVP Ou est passée la page concernant le clash entre Marine Le Pen et Anne Sophie Lapix ???

  • A. , 29 avril 2013 @ 12 h 22 min

    Dixit: “Nous sommes dans une démocratie et ceux qui sont élus pour nous représenter doivent avoir la possibilité de faire ce pourquoi ils sont là…”
    ***
    Nous sommes dans une fausse démocratie verrouillée et subvertie, avec des médias militants et menteurs, qui défendent des intérêts privés voire étrangers, avec des découpages électoraux et des lois qui essaient de vider le vote des électeurs de tout effet sur le résultat.
    Un des objectifs prioritaires est de déverrouiller la démocratie.

  • Francois Desvignes , 29 avril 2013 @ 14 h 54 min

    Quand on entend parler de la part des apparatchiks du régime “d’union nationale”, on comprend tout de suite que :

    1/ Le Titanic tangue dangereusement
    2/ Il n’y a aucune solution sérieuse de renflouement
    3/ Le coulage à pic est imminent
    4/ on souhaite juste diluer les responsabilités en formant un gouvernement fourre tout où personne ne sera responsable de rien pour n’avoir strictement rien entrepris et où chacun servira de fusible au copain pour ses fautes antérieurs.

    Une usine à gaz pour perdurer dans le naufrage, le temps de faire accepter au peuple sa noyade.

    Question : nous prendraient-ils pour des cons?

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