« Aucune nouvelle coproduction ne sera lancée tant qu’Arte n’aura pas l’assurance que la liberté d’expression, le pluralisme éditorial et l’indépendance de la télévision publique en Pologne sont garantis » a écrit la chaîne dans un communiqué publié aujourd’hui. Il s’agit bien sûr d’une allusion à la loi sur les médias publics votée récemment par le Parlement polonais et qui permet au gouvernement de nommer directement les dirigeants de la radio et de la télévision publique sans passer par le conseil de l’audiovisuel polonais resté aux mains de politiciens proches du gouvernement précédent. Le fait que le gouvernement de Donald Tusk, l’actuel président du Conseil européen, avait fait virer tous les journalistes conservateurs sauf un (Jan Pospieszalski, dont l’émission avait été raccourcie à 30 minutes et repoussée à tard dans la soirée) n’avait jamais gêné Arte.
Mais le plus drôle, c’est que le président d’Arte, l’Allemand Peter Boudgoust, qui a écrit au nouveau président de la télévision publique polonaise, Jacek Kurski, dirige aussi la chaîne publique régionale allemande SWR. Or à l’approche des élections dans les lands du Bade-Wurtemberg et de la Rhénanie-Palatinat, gouvernés tous les deux par une coalition des sociaux-démocrates (SPD) et des Verts, M. Boudgoust vient de prouver qu’il était lui-même aux ordres du pouvoir politique ! En effet, la télévision SWR voulait comme il y a cinq ans inviter dans ses studios tous les leaders des partis qui ont de fortes chances d’entrer au parlement local. Parmi ces partis, il y a le parti conservateur anti-immigration Alternative pour l’Allemagne (AfD). Mais les ministres-présidents de ces deux lands et leur allié au sein de leur gouvernement ont exigé que l’AfD soit exclu des débats à la télévision publique SWR. Monsieur Boudgoust, directeur de la SWR et président d’Arte, qui exige « l’assurance que la liberté d’expression, le pluralisme éditorial et l’indépendance de la télévision publique en Pologne sont garantis », s’est gentiment exécuté. Il a décidé que l’AfD ne serait pas invité dans les studios de la SWR. Pour sauver la face, il a été décidé que cette exclusion concernerait tous les partis qui ne sont pas encore au parlement, soit Die Linke (La Gauche) dans le Bade-Wurtemberg et les Libéraux en Rhénanie-Palatinat.
Il y a cinq ans, ces partis étaient encore invités aux débats de la campagne électorale, ce qui est la moindre des choses dans une télévision publique, et il faut souligner ici que la télévision publique polonaise sous Jacek Kurski, contrairement à la télévision publique allemande dirigée par le président d’Arte, invite des représentants de tous les partis politiques dans ses émissions.
Faut-il rappeler aussi à Peter Boudgoust et aussi à la Française Anne Durupty, vice-présidente de la chaîne, que la présidente de France Télévisions Delphine Ernotte nommée par un CSA lui-même nommé par le pouvoir politique socialiste a renvoyé le 1er novembre dernier Philippe Verdier, le présentateur de la météo de France 2, pour avoir publié le livre Climat Investigation dans lequel il remet en cause la thèse du réchauffement climatique et dénonce les intérêts financiers qui se cachent derrière. Et aussi qu’elle a renvoyé Julien Lepers, l’animateur de « Questions pour un champion » depuis 27 ans, après avoir dit qu’elle voulait moins de blancs de plus de 50 ans !
Voilà donc pour la liberté d’expression, l’indépendance et le pluralisme éditorial chez France Télévision. Une télévision où tous les journalistes sont d’accord entre eux et avec les gouvernants sur bien des sujets majeurs (avortement, euthanasie, « mariage » gay, immigration…).
Nota bene sous Sarkozy, c’était le président de la République qui nommait directement le président de France Télévision et personne n’avait protesté en Europe, ce qui montre qu’il y a dans l’UE des pays plus égaux (Allemagne, France…) que les autres (Pologne, Hongrie…).
Quant aux médias publics en Allemagne, leur réputation a été mise à mal par leur silence de plusieurs jours après les agressions sexuelles de la Saint-Sylvestre : la chaîne publique WDR a son siège à quelques centaines de mètres de la gare de Cologne et n’était apparemment au courant de rien, la chaîne publique ZDF a reconnu avoir refusé de publier un reportage sur ce sujet dans ses informations du soir… Plus récemment, le 17 janvier, la correspondante de la chaîne WDR aux Pays-Bas, Claudia Zimmermann, qui travaille pour cette chaîne depuis 23 ans, a affirmé au cours d’une discussion à la radio hollandaise Limburg 1 qu’il y avait à la WDR un « ordre d’en haut » pour « parler de manière positive des immigrants et soutenir la politique d’Angela Merkel ».
Alors finalement, que la chaîne de propagande franco-allemande Arte souhaite suspendre sa coopération avec la télévision publique polonaise avec laquelle elle était liée par un accord d’association depuis 2001, pour la production et la diffusion « de programmes de qualité en Europe », ce n’est peut-être pas plus mal pour les Polonais.
(Sur la soumission des médias publics – et pas seulement – au pouvoir politique en France, voir l’article de Valeurs Actuelles “Tous les médias (ou presque) dans la main du pouvoir” )
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