Le Zemmour du mardi. “L’Algérie, c’est la France ! Non, il ne s’agit pas de ressusciter François Mitterrand, ministre de l’Intérieur de la IVe République, mais de relever cette unanimité nationale qui a salué les méthodes pour le moins expéditives de l’armée algérienne contre les preneurs d’otages. Notre Président socialiste a donc applaudi mais aussi Jean-Pierre Raffarin, qui s’affichait il y a peu sous la bannière ‘Humanistes’. Personne à droite ou à gauche ne s’émeut. Nos habituelles consciences droitdelhommistes ne disent mot et qui ne dit mot consent. Les mêmes ne lésinaient pas sur l’emphase dans l’indignation pour dénoncer les méthodes musclées de l’armée russe de Poutine, dont s’inspirent les Algériens. Mais Bouteflika n’est pas Poutine : celui-ci est un boucher, celui-là est un ami. Comme s’ils arboraient tous un badge à la boutonnière : “Touche pas à mon Algérie”. En Angleterre, aux États-Unis, au Japon même, jusqu’en Australie, dans tous les pays qui ont eu des victimes, on s’est offusqué ou scandalisé. On a au moins demandé des explications au Gouvernement algérien. En France, rien. Circulez, il n’y a rien à voir. L’Algérie est sacrée. Elle le sera d’ailleurs de plus en plus dans les mois qui viennent.
En effet, elle est pour l’instant notre seule alliée dans cette aventure malienne où nos prétendus amis occidentaux brillent par leur absence, voire, pour les Américains, leur sourde hostilité. L’Algérie est le seul État digne de ce nom dans la région. Elle a ouvert son espace aérien à l’ancien colonisateur, la presse algérienne fulmine contre ce sacrilège. Si l’armée française, demain, s’enlisait dans le Nord du Mali, l’Algérie a tout pour être à la France ce que le Pakistan a été pour les Américains dans l’affaire afghane : le pire et le meilleur, l’allié et le traître, le roi du double jeu. Les terroristes que dénonce Hollande viennent pour la plupart d’Algérie. Chassés par l’armée française, ils repartiront d’où ils viennent. Mais Bouteflika n’a pas du tout envie de les voir revenir. Il est prêt à tout pour qu’ils restent loin de l’Algérie, même à les soutenir… en douce. Après tout, ils sont des frères arabes musulmans engagés dans une bataille contre l’infidèle français et, accessoirement, le Noir méprisé du Sud-Mali.
Il est impossible de contrôler les milliers de kilomètres de frontières qui séparent les deux pays. Le retour de ces chers djihadistes rappelleraient à la population algérienne les effroyables souvenirs de la guerre civile des années 90, après que l’armée algérienne a interrompu des élections démocratiques que les islamistes avaient gagnées. On évalue les victimes de cet affrontement inexpiable à 200 000 morts. Personne en France, pas même BHL, ne demanda alors l’intervention de l’armée française pour arrêter le massacre. On lui aurait ri au nez. L’Algérie n’est ni la Libye, ni la Syrie. L’Algérie n’est plus la France mais elle est plus que la France. L’Algérie et sa mauvaise conscience, un tabou mémoriel, comme une plaie jamais cicatrisée.”
39 Comments
Comments are closed.