Quatrième débat de l’année mercredi au Parlement européen au sujet de la situation de la démocratie et de l’État de droit en Pologne, mais cette fois devant une assemblée en grande partie vide et sans vote de résolution. Il faut croire que le sujet lasse, et pour résumer l’absurdité de ces débats concernant un des pays de l’UE où la démocratie se porte le mieux, notamment à l’aune de la pluralité des médias et de la liberté d’expression, citons simplement les mots d’un député polonais prononcés au cours de ce débat : « Je regarde autour de moi et je vois des gens assassinés dans la rue, je vois des terroristes qui tirent sur les passants, ils violent des femmes, ils rentrent dans la foule avec un camion. Est-ce la Pologne ? Non, c’est la France, la Suède, l’Allemagne… »
C’est un échec, donc, pour cette opposition polonaise qui, ayant perdu le pouvoir en octobre 2015 à la suite d’élections libres, en appelle à ses amis de l’UE au sein de la gauche et de la fausse droite, pour attaquer le gouvernement conservateur de son pays. Cette fois, c’est un projet de loi sur les manifestations qui a été l’occasion pour les quelques députés libéraux et d’extrême gauche pas encore lassés par le sujet de s’inquiéter pour la démocratie polonaise. Ce projet de loi veut interdire la tenue d’une manifestation et de sa contre-manifestation en même temps et au même endroit. Quoi de plus normal dans une démocratie pour donner à chacun la possibilité de s’exprimer pacifiquement et en toute sécurité dans la rue ?
Mais l’opposition polonaise, enfin celle qui a perdu le pouvoir à l’automne dernier, va plus loin. Début décembre, le « comité de défense de la démocratie » (KOD), appelait avec plusieurs signataires des deux partis libéraux les plus outranciers dans leur opposition au PiS, à la désobéissance civique. Un appel que même la gauche post-communiste a désavoué. Tandis que cette droite libertaire qui se dit, comme le PiS, héritière du syndicat Solidarité descend désormais dans la rue pour défendre les retraites des anciens membres de la police politique du régime communiste, car le PiS veut réduire leurs pensions très avantageuses par rapport à la moyenne polonaise, et notamment par rapport aux pensions dont bénéficient ceux qui, dans l’opposition dans les années 80, ont perdu des années de cotisation parce qu’ils étaient en prison ou se voyaient refuser tout travail. Réparer cette profonde injustice était une des promesses du PiS. Précisons d’ailleurs pour les lecteurs français, que Lech Walesa, dont on sait aujourd’hui avec certitude qu’il a eu un passé de délateur au service des communistes, est à fond avec l’opposition « totale » contre ce gouvernement pourtant issu d’élections démocratiques.
« Opposition totale », c’est le qualificatif que cette partie de l’opposition polonaise se donne elle-même, et qui ressemble beaucoup à l’opposition totale contre Viktor Orbán en Hongrie, qui en appelle elle aussi régulièrement à l’intervention de Bruxelles, et encore aujourd’hui à l’opposition démocrate aux USA qui a elle-même bien du mal à accepter le résultat des dernières élections. Partout où les élites gaucho-libertaires perdent le pouvoir, les voilà qui remettent en cause la démocratie sous prétexte de la défendre contre les « populistes ».
Article publié originellement dans le quotidien catholique Présent du 16/12/2016
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